exposition sur la crise  postélectorale de 2010-2011 à Abidjan

« Consolider cette paix qui nous appartient »

Un agenda relatif aux droits humains pour la Côte d’Ivoire

Des visiteurs regardent une photo, le 19 mars 2014, dans le cadre d’une exposition sur la crise  postélectorale de 2010-2011 à Abidjan, Côte d’Ivoire.    © 2014 Issouf Sanogo /AFP/Getty Images

Sigles et acronymes

AFJ-CI

Association des femmes juristes de Côte d’Ivoire

CDVR

Commission Dialogue, Vérité́ et Réconciliation

CGFR

Comité de gestion foncière rurale

CNE

Commission nationale d’enquête

CONARIV

Commission nationale pour la réconciliation et l’indemnisation des victimes

CPI

Cour pénale internationale

CSEI

Cellule spéciale d’enquête et d’instruction

CSM

Conseil supérieur de la magistrature

CVGFR

Comité villageois de gestion foncière rurale

DAP

Direction de l’administration pénitentiaire

DDR

Désarmement, démobilisation et réintégration

DST

Direction de la surveillance du territoire

FN

Forces Nouvelles

FRCI

Forces républicaines de Côte d’Ivoire

HCDH

Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (OHCHR en anglais)

OGE-CI

Ordre des géomètres-experts de Côte d’Ivoire

ONUCI

Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire

PNCS

Programme national de cohésion sociale

RDR

Rassemblement des Républicains (parti politique du Président Ouattara)

RTI

Radiodiffusion-télévision ivoirienne

Carte de la Côte d’Ivoire

Côte d’Ivoire. © 2013 John Emerson / Human Rights Watch  

Résumé

Le 25 octobre 2015, le peuple ivoirien élisait le Président Alassane Ouattara pour un second mandat, à l’issue d’un scrutin jugé libre et équitable par l’Union africaine (UA) et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Par ailleurs, cette élection a été en grande partie dépourvue de la violence qui avait accompagné les scrutins précédents de 2000 et 2010.

Cela fait moins de cinq ans que la Côte d’Ivoire s’est sortie d’une décennie de conflit et de troubles, imputables à la fois à des différends politiques et à des tensions ethno-communales, qui avait conduit à la crise postélectorale de 2010-2011. Le refus du Président de l’époque, Laurent Gbagbo, de reconnaître la victoire de Ouattara à l’élection de 2010 s’était soldé par un conflit armé durant lequel au moins 3 000 civils avaient été tués et plus de 150 femmes violées, de graves atteintes aux droits humains ayant été commises par les deux parties.

À l’approche de l’élection du mois d’octobre, le Président Ouattara a axé sa campagne sur la promesse de consolider la paix et la sécurité et de prendre des mesures pour que les citoyens ivoiriens ordinaires puissent bénéficier de la croissance économique du pays. Afin de préserver la Côte d’Ivoire du conflit et de l’instabilité qui ont caractérisé le pays pendant tant d’années, le gouvernement du Président Ouattara devrait profiter de son second mandat pour veiller à l’accomplissement de progrès primordiaux en matière de renforcement de l’État de droit et résoudre les problèmes profonds à l’origine de la violence du passé.

Lors de trois missions de recherche menées en octobre 2014 et mai et juillet 2015, Human Rights Watch a évalué les progrès réalisés par le gouvernement pour venir à bout des problèmes hérités du passé violent du pays, et interrogé les Ivoiriens sur les principales priorités des cinq prochaines années en matière de droits humains. Human Rights Watch a ainsi mené des entretiens avec plus de 200 victimes d’atteintes aux droits humains, des agents du gouvernement local et des chefs traditionnels, des juristes et des magistrats ivoiriens, des membres des forces de sécurité, des organisations nationales et internationales de la société civile, des défenseurs des droits humains, des organisations humanitaires, des journalistes, des agents des principaux ministères et des diplomates et des agents des Nations Unies (ONU) et d’institutions financières internationales.

Une femme passe devant des affiches de campagne à Abidjan le 21 octobre 2015, quatre jours avant l’élection présidentielle du 25 octobre. © 2015 Luc Gnago/Reuters

 

Premier mandat de Ouattara

Les interlocuteurs de Human Rights Watch ont déclaré que le Président Ouattara a consacré une grande partie de son premier mandat à la gestion des conséquences immédiates de la crise postélectorale de 2010-2011. Parmi les progrès évoqués, citons une amélioration de la sécurité à l’échelle nationale, une diminution des exactions perpétrées par les forces de sécurité, un soutien accru à l’égard des enquêtes judiciaires sur les atrocités passées, la réouverture des tribunaux et des prisons dans tout le pays et la réussite de la médiation sur les conflits fonciers menée par les chefs traditionnels et les agents du gouvernement local.

Human Rights Watch constate cependant que, si des progrès ont eu lieu dans certains domaines clés, dans de nombreux cas les mesures positives du premier mandat du Président Ouattara n’ont marqué que le début d’une longue route vers des réformes significatives. Dans d’autres cas, le gouvernement n’a même pas abordé certains problèmes plus profondément ancrés. Le gouvernement du Président Ouattara devrait faire davantage pour assurer une responsabilité impartiale envers les atteintes aux droits humains passées, faire face aux faiblesses persistantes du système judiciaire, achever le processus de réforme sectorielle, offrir une justice réparatrice aux victimes et résoudre le problème de la dépossession de terres dans l’ouest de la Côte d’Ivoire.

Impunité relative aux violations commises par le passé

Pendant la décennie de conflit et de troubles qui a conduit à la crise postélectorale de 2010-2011, de graves atteintes aux droits humains ont été commises par toutes les parties, y compris par les forces de sécurité de l’ère de Gbagbo et les rebelles des Forces Nouvelles qui ont fini par aider Ouattara à prendre le pouvoir. La culture d’impunité qui a permis aux auteurs de ces crimes d’échapper à la justice et, ainsi, de ne pas avoir à rendre compte des atrocités commises, a joué un rôle clé dans la perpétuation de ces exactions.

Aucune des personnes responsables d’atteintes aux droits humains commises lors de la violence électorale de 2000 ou du conflit armé de 2002-2003 n’a été condamnée pour les crimes allégués. De même, cinq ans après la crise postélectorale de 2010-2011, la grande majorité des commandants et des chefs impliqués dans de graves atteintes aux droits humains – de part et d’autre du clivage militaro-politique – n’ont pas été tenus de rendre compte de ces exactions.

Le Président Ouattara a déclaré qu’il s’engageait à ce que soient poursuivies en justice les personnes qui avaient commis des atrocités lors de la crise postélectorale, et à ce que les futurs procès se tiennent dans les tribunaux nationaux. Cependant, bien que les enquêtes des juges ivoiriens aient récemment progressé, on ignore toujours si le gouvernement Ouattara soutient suffisamment les efforts de la magistrature pour traduire en justice les auteurs des crimes, notamment les commandants des forces pro-Ouattara.

En 2011, le gouvernement a créé la Cellule spéciale d’enquête (maintenant renommée la Cellule spéciale d'enquête et d'instruction, CSEI), composée de juges d’instruction et de procureurs chargés d’enquêter sur les crimes commis pendant la crise postélectorale. Après avoir pâti d’un soutien gouvernemental insuffisant pendant plusieurs années, la CSEI a reçu des ressources plus importantes fin 2014 et, en 2015, elle a inculpé plus de 20 auteurs de crimes – dont des hauts commandants des deux parties au conflit – pour leur rôle dans des atteintes aux droits humains perpétrées pendant la crise postélectorale. Le soutien qu’accorde le gouvernement à la CSEI est toutefois fragile. À la mi-2015, la CSEI a fait l’objet des pressions de l’exécutif, qui souhaite qu’elle termine prématurément les enquêtes importantes en cours.

Au niveau international, le procès de l’ancien Président Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé, ancien ministre de la Jeunesse et chef d’un groupe de milice pro-Gbagbo, devrait s’ouvrir à la Cour pénale internationale (CPI) début 2016. La CPI a également inculpé Simone Gbagbo, l’épouse de l’ancien Président, pour crimes contre l’humanité commis pendant la crise postélectorale, mais la Côte d’Ivoire a refusé de la transférer à La Haye pour qu’elle y soit jugée.

À ce jour, cependant, la CPI n’a encore procédé à aucune inculpation pour les violations commises par les forces pro-Ouattara pendant la crise postélectorale. L’orientation unilatérale des dossiers de la CPI a polarisé l’opinion publique autour de la Cour et nui à la perception de sa légitimité, notamment parmi les sympathisants de Gbagbo. Le bureau du Procureur de la CPI vient seulement d’intensifier ses enquêtes de terrain sur les forces pro-Ouattara. Bien que le Président Ouattara ait déclaré qu’aucun autre suspect ne serait déféré devant la CPI, ces enquêtes restent un moyen de pression crucial pour réclamer une justice impartiale au niveau national.

Pendant son second mandat, le Président Ouattara devrait apporter un soutien approprié à la CSEI et éviter toute ingérence politique dans les dossiers relatifs aux atteintes aux droits humains, notamment ceux qui impliquent les commandants ayant combattu à ses côtés lors de la crise postélectorale. Il devrait également apporter sa coopération aux enquêtes de la CPI et déférer les suspects que la CPI veut juger. En outre, Ouattara devrait déclarer publiquement et sans équivoque qu’il n’accordera la grâce à aucun individu reconnu coupable de crimes constituant une atteinte grave aux droits humains.

                                                                                                                                                     

Reconstruction du système judiciaire et amélioration des conditions pénitentiaires

Le Président Ouattara a fait des progrès en matière de reconstruction du système judiciaire, ravagé par les crises successives qu’a traversées la Côte d’Ivoire, et il a réussi le redéploiement de personnel judiciaire dans des régions du nord du pays qui, avant la crise postélectorale de 2010-2011, échappaient au contrôle du gouvernement.

Cependant, un nombre insuffisant de mesures ont été prises pour résoudre les problèmes sous-jacents et moins visibles qui rongeaient déjà les tribunaux ivoiriens avant même la crise postélectorale. Si le manque de volonté politique du gouvernement explique qu’il n’ait pas mis en œuvre certaines des réformes qui auraient dû être en place pendant le premier mandat de Ouattara – telles que l’adoption de lois pour renforcer l’indépendance de la justice – d’autres réformes ont été entravées par le budget modeste affecté aux tribunaux et à la magistrature. En 2014, le budget de la justice ne représentait en effet que 1,4 % du budget national global.

Alors que le gouvernement du Président Ouattara entame son second mandat, plusieurs domaines prioritaires méritent que l’on s’y attelle de toute urgence pour permettre au système judiciaire de protéger les droits des Ivoiriens de manière adéquate, notamment le manque d’indépendance de la justice, la corruption, les détentions préventives d’une durée excessive, les mauvaises conditions pénitentiaires et le manque d’accès à une assistance judiciaire.

Le gouvernement du Président Ouattara n’a guère pris de mesures pour assurer l’indépendance de la justice par rapport à l’exécutif. Le ministre de la Justice n’a pas finalisé les projets de lois élaborés en 2012 qui permettraient, d’une part, de renforcer l’indépendance du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), l’organe chargé de nommer les magistrats et d’assurer leur discipline, et, d’autre part, d’empêcher une ingérence politique dans la promotion et l’évaluation des juges.

Par ailleurs, le gouvernement n’a pas pris suffisamment d’initiatives pour venir à bout de la corruption dans le secteur judiciaire. Bien qu’en 2011 Ouattara ait promis l’expulsion des juges corrompus, des juristes ivoiriens ont déclaré à Human Rights Watch, qu’à leur connaissance, aucun n’avait été discipliné ou poursuivi pour corruption depuis 2012.

Les tribunaux ivoiriens continuent également de recourir de manière excessive à la détention préventive, qui concerne environ 40 % des personnes incarcérées. La prévalence de ce mode de détention et la lenteur à laquelle les affaires sont réglées aggravent la surpopulation dans les prisons ivoiriennes, près de la moitié d’entre elles étant gravement surpeuplées. Une fois en détention, de nombreux individus, notamment ceux qui sont accusés de crimes graves, doivent attendre des années avant d’être jugés ou libérés. Qui plus est, le gouvernement ivoirien ne s’est pas penché de manière adéquate sur les problèmes chroniques du secteur correctionnel, notamment le manque de nourriture adéquate, la piètre qualité des installations sanitaires et l’insuffisance de l’accès aux soins de santé.

Le gouvernement du Président Ouattara n’a par ailleurs guère agi pour résoudre les difficultés du système ivoirien d’assistance judiciaire. Dans les affaires pénales, de nombreux prévenus ne reçoivent l’assistance d’un avocat qu’au moment de leur procès ; d’autres n’en bénéficient pas du tout. Dans les affaires civiles et pénales, les accusés indigents ont droit à une assistance judiciaire gratuite, mais très peu connaissent la marche à suivre – le Bureau national de l’assistance judiciaire ne reçoit que quelques centaines de demandes par an. Par conséquent, une bonne partie de la lourde charge consistant à donner des conseils juridiques aux accusés et à leur fournir une représentation incombe aux organisations non gouvernementales (ONG), notamment aux cliniques juridiques prises en charge par les bailleurs de fonds internationaux.

Pendant son second mandat, le Président Ouattara devrait accorder la priorité à l’instauration d’une justice qui respecte et protège les droits, notamment en lui accordant des ressources suffisantes. Le Président Ouattara ayant promis de réviser la constitution ivoirienne, le gouvernement devrait profiter du processus de réforme constitutionnelle pour promouvoir l’indépendance du CSM et protéger les juges de toute immixtion du pouvoir exécutif. En outre, le gouvernement devrait de toute urgence revoir le Plan d’action de la politique sectorielle de la justice, une feuille de route adoptée par le Conseil des ministres en juin 2013, afin d’élaborer un plan révisé pour la période 2016-2020, comprenant notamment de nouvelles dates butoirs pour la réalisation des principales réformes qui n’ont pas encore été mises en œuvre.

Réforme du secteur de la sécurité

La réforme du secteur de la sécurité était une priorité du premier mandat du Président Ouattara, et le comportement des forces de sécurité, y compris des militaires, s’est amélioré depuis la crise postélectorale de 2010-2011. Le gouvernement a par ailleurs fait des progrès pour ce qui est de transférer des forces armées aux policiers et aux gendarmes les responsabilités en matière d’application des lois, même si les policiers et les gendarmes manquent souvent d’équipement et de formation pour protéger les citoyens de la criminalité.

Cependant, malgré les progrès réalisés, la persistance des exactions perpétrées par les forces de sécurité et l’absence d’obligation de rendre compte de ces actes sont restées problématiques pendant le premier mandat du Président Ouattara. En 2012, les arrestations massives, les mises en détention illégales et les actes de torture commis par l’armée suite aux attaques d’installations militaires par des sympathisants de Gbagbo ont mis en évidence les défis que Ouattara devait relever pour améliorer le bilan des forces de sécurité en matière de respect des droits humains.

Bien que, depuis, le comportement de l’armée se soit amélioré, on note qu’en 2014 des militaires ont réagi à des attaques visant des postes militaires en plaçant les suspects dans des centres de détention non autorisés et en torturant nombre d’entre eux. De nombreuses sources ont également fait part de leurs préoccupations quant aux détentions illégales appliquées par la Direction de la surveillance du territoire (DST), service de renseignements national axé sur les questions sécuritaires qui dépend du ministère de l’Intérieur. À l’approche de l’élection présidentielle de 2015, la DST a détenu plusieurs militants de l’opposition dans des lieux non autorisés, sans leur fournir d’assistance judiciaire.

En outre, bien que globalement le comportement des forces de sécurité se soit amélioré, des militaires, des policiers et des gendarmes continuent d’extorquer de l’argent aux résidents de Côte d’Ivoire à des barrages routiers illégaux, notamment en zone rurale. Plusieurs commandants de l’armée ivoirienne s’enrichissent grâce à des actes d’extorsion et de contrebande et en imposant des taxes parallèles sur l’exportation des ressources naturelles, à l’instar du réseau militaro-économique mis en place par les rebelles des Forces Nouvelles lorsque ceux-ci contrôlaient le nord de la Côte d’Ivoire.

Le fait que ces commandants n’aient fait l’objet ni d’enquêtes ni de poursuites judiciaires révèle l’impunité généralisée dont bénéficient les forces de sécurité. Même lorsque les militaires commettent des crimes graves en dehors de l’exercice de leurs fonctions, tels que des violences sexuelles, ils sont rarement poursuivis devant les tribunaux civils. Le système de justice militaire, dont dépendent actuellement les policiers, les gendarmes et les militaires, dispose de ressources insuffisantes, la Côte d’Ivoire ne comptant qu’un seul tribunal militaire, et il a besoin d’être complètement réformé pour renforcer son indépendance et limiter ses compétences aux infractions militaires commises par le personnel militaire.

Lors de son second mandat, le Président Ouattara devrait achever les réformes du secteur de la sécurité nécessaires pour professionnaliser les forces armées et empêcher de futures exactions, notamment en promulguant une nouvelle loi sur l’organisation de la défense nationale et des forces armées et en créant un système de justice militaire plus efficace et respectueux des droits humains. Par ailleurs, le rôle des anciens commandants des Forces Nouvelles dans des exactions répétées souligne combien il est important d’exiger d’eux qu’ils rendent des comptes pour les atteintes aux droits humains qu’ils ont commises pendant la crise postélectorale de 2010-2011.

Recherche de la vérité et réparations

Au lendemain de la crise postélectorale de 2010-2011, la Côte d’Ivoire a instauré une Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR) pour promouvoir la réconciliation, faire la lumière sur les atteintes aux droits humains qui avaient été commises et émettre des recommandations pour empêcher de futures exactions et accorder des réparations aux victimes.

La CDVR, dont le mandat a pris fin en septembre 2014, a recueilli les témoignages de plus de 72 000 Ivoiriens, dont plus de 28 000 femmes. En décembre 2014, le président de la Commission, l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny, a présenté le rapport final de la CDVR au Président Ouattara.

Le rapport de la CDVR n’a cependant jamais été rendu public, et la présidence n’a jamais donné de raison pour ce retard. La seule mesure concrète qu’ait prise le Président Ouattara après avoir reçu le rapport de la CDVR a été de s’engager à mettre à disposition des victimes 10 milliards de FCFA (environ 16,2 millions de US$) au titre de leur indemnisation, démarche importante mais qui ne saurait remplacer une discussion plus poussée sur les recommandations du rapport.

En mars 2015, le gouvernement a créé un organe chargé de succéder à la CDVR, à savoir la Commission nationale pour la réconciliation et l’indemnisation des victimes des crises survenues en Côte d’Ivoire (CONARIV), qui est chargée de superviser un programme de réparation pour les victimes d’exactions commises entre 1990 à 2012. Une autre agence gouvernementale, le Programme national de cohésion sociale (PNCS), doit mettre en application ce programme de réparation.

La CONARIV s’attelle actuellement à compiler une liste initiale de victimes, à déterminer quelles personnes pourront prétendre à percevoir des réparations et ce qu’elles recevront. Une première série d’indemnisations, qui a démarré en août 2015 alors que la CONARIV n’avait même pas finalisé les directives à observer pour procéder aux réparations, a suscité des attentes parmi les victimes quant à la date à laquelle elles recevraient cette indemnisation et à la somme qui leur reviendrait. Cette première série d’indemnisation coûtera à l’État 6-8 milliards de FCFA (10-13 millions de US$), sur les 10 milliards de FCFA que Ouattara avait annoncé mettre à disposition initialement, d’où des inquiétudes quant à la capacité du gouvernement à répondre aux attentes des victimes.

Pour ouvrir un dialogue propice à des mesures complémentaires de réconciliation nationale et empêcher de futures exactions, le Président Ouattara devrait publier le rapport de la CDVR, et l’Assemblée nationale devrait en débattre dans le cadre d’un comité spécial et d’une séance plénière. Le gouvernement devrait aussi publier une réponse officielle au rapport de la CDVR, y compris des détails sur les recommandations qu’il avalise et sur la manière dont il compte les mettre en œuvre.

Pour gérer les attentes des victimes en matière de réparations, la CONARIV et le PNCS devraient accélérer les consultations sur une loi régissant qui peut prétendre à des réparations et sous quelle forme, ainsi que l’adoption de cette loi. La CONARIV devrait également développer ses initiatives de sensibilisation et de communication auprès des associations de victimes.

Résolution du problème de la dépossession de terres dans l’ouest du pays

De profondes tensions intercommunales liées au phénomène de la dépossession des terres sont l’une des raisons pour lesquelles l’ouest de la Côte d’Ivoire a été le théâtre de nombre des pires atrocités commises dans le pays.

La crise de 2010-2011 a déclenché une nouvelle vague de dépossession, lorsque les propriétaires fonciers issus de groupes ethniques pro-Gbagbo, qui avaient fui de peur que l’avancée des forces pro-Ouattara n’entraîne des actes de représailles, sont rentrés chez eux et ont constaté que leurs terres avaient été vendues ou étaient occupées de manière illégale.

Bien que la prévalence des conflits fonciers dans l’ouest de la Côte d’Ivoire se soit désormais affaiblie, la dépossession de terres reste un facteur clé des tensions intercommunales et de la violence locale entre groupes ethniques de l’ouest, immigrants de pays voisins et communautés originaires d’autres régions de la Côte d’Ivoire.

La politique foncière gouvernementale menée pendant le premier mandat du Président Ouattara s’est concentrée sur la mise en œuvre d’une loi de 1998 relative au domaine foncier rural, dont l’objectif était d’apporter une sécurité supplémentaire aux propriétaires fonciers en convertissant leurs revendications coutumières en certificats fonciers puis en titres légaux. Cependant, au 31 mai 2015, seuls 978 certificats fonciers avaient été délivrés à l’échelle du pays, et des chefs communautaires ont expliqué à Human Rights Watch que le processus d’obtention était trop onéreux et trop compliqué, les certificats étant donc inaccessibles aux Ivoiriens ordinaires. Le gouvernement a également peu avancé dans ses travaux de démarcation des villages pour empêcher les ventes frauduleuses qui tirent parti de l’incertitude des délimitations entre villages.

À l’heure actuelle, c’est en grande partie aux chefs de villages et aux agents de l’administration locale, qui ont joué un rôle clé dans la médiation des dossiers de dépossession associés à la crise postélectorale de 2010-2011, qu’il appartient de résoudre les litiges fonciers.

Cependant, les règlements conclus devant les autorités coutumières sont de plus en plus difficiles à faire appliquer, ils sont souvent défavorables aux femmes et, dans de nombreux cas, ils permettent à ceux qui occupent les terres de manière illégitime d’y rester. Les personnes impliquées dans des ventes illégales ou frauduleuses sont rarement poursuivies en justice.

Alors que le Président Ouattara entame son second mandat, la politique foncière de son gouvernement est confrontée à deux défis connexes : le manque de mise en œuvre de la loi de 1998 et le recours systématique aux mécanismes coutumiers pour résoudre les litiges ; et la reconnaissance que les autorités coutumières sont susceptibles d’avoir de plus en plus de mal à trouver des solutions durables et respectueuses des droits humains pour résoudre les litiges fonciers.

En juillet 2015, le gouvernement ivoirien a diffusé la version préliminaire d’une déclaration de politique foncière visant à faciliter la mise en œuvre de la loi de 1998 en simplifiant les démarches nécessaires à l’obtention d’un certificat foncier et en réduisant le coût. Le gouvernement a déclaré que les ONG ivoiriennes et les représentants de communautés locales auraient la possibilité de commenter cette version préliminaire au printemps 2016, et il devrait veiller à ce que les hommes et les femmes de tous les groupes politiques et ethniques puissent pleinement participer au processus de consultation.

L’un des aspects clés de ces consultations consiste pour le gouvernement à trouver un moyen de résoudre équitablement et rapidement les litiges fonciers survenant lors de la mise en œuvre de la loi de 1998. À cette fin, il pourra s’agir de modifier ou de mieux soutenir les comités villageois et sous-préfectoraux de gestion foncière actuellement chargés de résoudre les litiges survenus pendant le processus de certification des terres, ou bien d’instaurer un nouveau mécanisme. Le gouvernement devrait également s’assurer que toute personne dont les droits de propriété ont été bafoués par la décision d’une autorité coutumière ou du gouvernement local, y compris les comités villageois et sous-préfectoraux de gestion foncière instaurés pour soutenir l’application de la loi de 1998, puisse faire appel devant les tribunaux.

Le second mandat du Président Ouattara

Bien que le second mandat du Président Ouattara vienne juste de commencer, de nombreux Ivoiriens réfléchissent déjà à l’élection présidentielle de 2020 et craignent que la lutte politique pour sa succession n’entraîne de nouveau des violences et une instabilité. L’histoire de la Côte d’Ivoire a montré que ses politiciens sont souvent prêts à exploiter les tensions ethniques, la faiblesse des institutions judiciaires et l’indiscipline des forces de sécurité pour tenter d’obtenir le pouvoir.

Il est impératif que le Président Ouattara tire parti de son second mandat pour conjuguer croissance économique et mesures propices à la protection et à la réalisation des droits économiques et sociaux des citoyens avec un engagement égal à lutter contre l’impunité, à renforcer l’État de droit, à achever les réformes du secteur de la sécurité et à résoudre les conflits fonciers à la base de nombreuses tensions interethniques. Faute de quoi l’incertitude politique susceptible d’être engendrée par le départ du Président Ouattara menacera de nouveau les progrès accomplis dans les domaines de l’État de droit et de la sécurité et sur lesquels s’est appuyée la reprise économique de la Côte d’Ivoire.

Recommandations

Au Président Ouattara et au gouvernement ivoirien

Pour lutter contre l’impunité relative aux violations commises par le passé

  • Soutenir les efforts déployés par la magistrature ivoirienne afin de poursuivre en justice, dans le respect des normes internationales relatives à un procès équitable, tous les responsables de meurtres, de viols et d’autres atteintes graves aux droits humains, y compris ceux qui ont été commis pendant la crise postélectorale de 2010-2011, quels que soient la position, le grade ou l’affiliation politique de leurs auteurs.
  • S’assurer que les juges d’instruction et les autres membres du personnel judiciaire chargés d’enquêter et de se prononcer sur les atteintes aux droits humains commises pendant la crise postélectorale de 2010-2011 se voient doter de ressources, d’une protection et d’un soutien adéquats par le ministère de la Justice.
  • Coopérer dans le cadre des enquêtes et des affaires de la CPI en Côte d’Ivoire, conformément aux obligations qui incombent au gouvernement au titre du Statut de Rome, y compris par le transfert de Simone Gbagbo à la CPI.

Pour renforcer le pouvoir judiciaire et améliorer les conditions pénitentiaires

  • Revoir le Plan d’action de la politique sectorielle de la justice en vue de créer un plan révisé pour la période 2016-2020 comprenant de nouvelles dates butoirs pour la réalisation des principales réformes qui n’ont pas encore été mises en œuvre. Accorder la priorité aux mesures destinées à améliorer l’indépendance et l’impartialité du pouvoir judiciaire et à lutter contre la corruption.
  • Dans le cadre du processus de réforme constitutionnelle, supprimer le rôle du Président ivoirien à la tête du CSM et instaurer un processus de nomination des membres du CSM indépendant de toute influence de l’exécutif.
  • Finaliser et soumettre devant l’Assemblée nationale les codes et lois essentiels à la réforme de l’État de droit qui ont été élaborés pendant le premier mandat du Président Ouattara, y compris le code de procédure pénale et les lois relatives au statut de la magistrature, le système pénitentiaire et l’assistance judiciaire.
  • Donner à l’Inspection générale des services judiciaires et pénitentiaires le pouvoir de référer les magistrats soupçonnés de corruption directement au CSM et à la Commission de discipline du Parquet, sans avoir besoin de la permission du ministre de la Justice. Rendre publics les rapports de l’Inspection générale et toute sanction disciplinaire ou pénale imposée à des juges ou à des procureurs.
  • Prendre des mesures concrètes pour résoudre le problème des nombreuses mises en détention préventive, y compris en dotant la justice des ressources nécessaires pour que des audiences de la cour d’assises se tiennent au moins tous les trois mois.
  • Veiller à ce que toutes les personnes accusées dans des affaires pénales aient accès à une assistance judiciaire adéquate, quels que soient leurs moyens.
  • Finaliser et adopter un Plan d’amélioration des conditions pénitentiaires pour résoudre les questions que sont la nourriture, les installations sanitaires, les soins médicaux des prisonniers et leur accès à des opportunités éducatives, et veiller à la mise à disposition de ressources suffisantes pour l’application de ce plan.

Pour lutter contre l’indiscipline et l’impunité parmi les forces de sécurité

  • Introduire une politique de tolérance zéro en cas de comportement criminel et d’atteintes aux droits humains de la part de l’armée, de la police et de la gendarmerie.
  • Enquêter sur et poursuivre en justice, dans le respect des normes internationales, les membres des forces de sécurité contre lesquels il existe des preuves de responsabilité pénale à l’égard d’exactions.
  • Accroître les ressources de l’Unité de lutte contre le racket pour lui permettre d’opérer à l’échelle nationale, et la charger d’enquêter en priorité sur les commandants impliqués dans des actes d’extorsion et de racket ou qui les facilitent.
  • Soutenir le tribunal militaire et le doter de ressources suffisantes pour pouvoir fonctionner correctement en tant qu’institution, et limiter ses compétences au jugement du personnel militaire impliqué dans des infractions militaires. Veiller à ce que les officiers de justice, y compris les procureurs et les avocats de la défense, soient entièrement indépendants de la hiérarchie militaire et de toute ingérence gouvernementale.
  • Conclure la démarche qui permettra à la police et à la gendarmerie de redevenir l’autorité principale en matière de sécurité intérieure, y compris en apportant à ces forces une formation et un soutien matériel suffisants pour qu’elles puissent assumer les fonctions de sécurité de manière efficace.
  • Cesser immédiatement de détenir et d’interroger des civils dans des camps militaires ou dans d’autres lieux de détention non autorisés.
  • S’assurer que tout civil arrêté soit rapidement conduit à un poste de police ou de gendarmerie et que, conformément aux droits ivoirien et international, toute personne arrêtée comparaisse devant un juge dans un délai de 48 heures afin que soient examinées la légalité de sa détention et les accusations portées contre elle.

Pour respecter le droit des victimes à la vérité et à réparation

  • Publier le rapport final et les recommandations de la CDVR et encourager l’Assemblée nationale à en débattre.
  • Veiller à ce que les conclusions du rapport de la CDVR soient accessibles aux Ivoiriens, notamment en diffusant une synthèse du rapport.
  • Rédiger et publier un livre blanc pour apporter une réponse officielle au rapport de la CDVR, en y incluant des détails sur les recommandations que le gouvernement avalise et la manière dont il compte les mettre en œuvre.
  • Accélérer les consultations sur l’avant-projet de loi – et son adoption – définissant qui peut prétendre à des réparations et sous quelle forme. Demander aux responsables de la CONARIV et du PNCS de négocier les termes de référence régissant leurs relations, le Président Ouattara devant intervenir en personne pour régler par la médiation les points de désaccord.
  • En partenariat avec les associations de victimes, aider la CONARIV et le PNCS à mener de plus nombreuses campagnes auprès des victimes d’atteintes aux droits humains afin de les renseigner sur le processus de réparation, y compris en dehors d’Abidjan.

Pour résoudre le problème de la dépossession de terres dans l’ouest de la Côte d’Ivoire

  • S’assurer que les hommes et les femmes de tous les groupes politiques et ethniques puissent pleinement participer aux consultations sur la version préliminaire de la déclaration de politique foncière gouvernementale.
  • Dans le cadre des consultations sur la déclaration de politique foncière, rechercher un moyen de résoudre équitablement et rapidement les litiges fonciers liés à la mise en œuvre de la loi de 1998 relative au domaine foncier rural. Il pourra s’agir de modifier ou de mieux soutenir les comités villageois et sous-préfectoraux de gestion foncière instaurés pour soutenir l’application de la loi de 1998, ou encore de créer un nouveau mécanisme.
  • Conformément à la constitution ivoirienne et au droit international des droits de l’homme, veiller à ce que les femmes ne fassent l’objet d’aucune discrimination, dans la loi ou en pratique, quant à leur capacité à formaliser leurs droits de propriété en vertu de la loi de 1998 relative au domaine foncier rural.
  • Charger les sous-préfets, la police, la police judiciaire et les procureurs de collaborer aux enquêtes sur les ventes frauduleuses de terres et à la poursuite en justice des responsables de ces ventes. Les peines devraient au moins veiller à ce que le vendeur de mauvaise foi ne dégage aucun profit de son acte frauduleux.
  • Veiller à ce que toute personne dont les droits de propriété ont été bafoués par la décision d’une autorité coutumière ou du gouvernement local, y compris les comités villageois et sous-préfectoraux de gestion foncière instaurés pour soutenir l’application de la loi de 1998, puisse faire appel de cette décision devant les tribunaux.
  • Accélérer les travaux de démarcation des villages. Accorder la priorité aux zones où les conflits fonciers et intercommunaux sont étroitement liés, notamment dans l’ouest de la Côte d’Ivoire.

À l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire

  • Adopter les codes et lois essentiels à la réforme de l’État de droit, y compris le code de procédure pénale et les lois relatives au statut de la magistrature, le système pénitentiaire et l’assistance judiciaire.
  • Instaurer un comité multipartite, conformément aux règlements intérieurs de l’Assemblée nationale, chargé d’examiner le rapport de la CDVR. Demander à ce comité de rendre compte de cet examen devant l’ensemble des membres de l’Assemblée nationale et de prévoir le temps nécessaire pour débattre du rapport de la CDVR en séances plénières.
  • Consacrer une audience publique aux activités de la DST dans le but d’émettre des recommandations pour améliorer son bilan en matière de respect des droits humains.
  • Ratifier le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et le mettre en œuvre en instaurant un organe national indépendant chargé d’inspecter régulièrement et à l’improviste tous les lieux de détention.

À la France, à l’Union européenne, aux États-Unis, aux institutions financières internationales et aux autres partenaires internationaux

  • Dans le cadre de leur dialogue politique avec les autorités ivoiriennes, continuer d’accorder la priorité à la lutte contre l’impunité à l’égard des atteintes aux droits humains commises par le passé, en renforçant l’importance de la coopération avec la CPI ainsi qu’un soutien gouvernemental cohérent à l’égard d’une justice nationale indépendante et impartiale.
  • Appuyer la formation et l’assistance technique destinées au personnel de la CSEI.
  • Observer et s’exprimer publiquement de manière plus régulière sur les atteintes commises par les forces de sécurité, y compris les mises en détention dans des lieux non autorisés et sans surveillance judiciaire.
  • Appuyer la formulation par le gouvernement d’une version révisée du Plan d’action de la politique sectorielle de la justice pour la période 2016-2020, et promouvoir l’inclusion de réformes pour améliorer l’indépendance et l’impartialité de la justice et lutter contre la corruption. Envisager de ne s’engager à octroyer des fonds pour améliorer l’infrastructure, à l’exception de la remise en état des prisons, qu’à condition que des progrès aient été réalisés dans ces domaines.
  • Continuer d’apporter une assistance financière et technique au processus gouvernemental de réforme du secteur de la sécurité, et y inclure un soutien à l’égard de la réforme du système de justice militaire.
  • Fournir une assistance financière et technique à la CONARIV et au PNCS en matière de conception et de mise en œuvre de programmes de réparation, y compris de meilleures mesures de sensibilisation des victimes.
  • Appuyer les consultations sur la version préliminaire de la déclaration de politique foncière du gouvernement ivoirien et veiller à ce que les hommes et les femmes de tous les groupes politiques et ethniques puissent pleinement participer au processus de consultation. Continuer d’appuyer les travaux de démarcation des villages.

À l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI)

  • Poursuivre les travaux de diplomatie privés et publics pour exhorter le gouvernement à continuer d’appuyer une justice équitable et impartiale à l’égard des atteintes aux droits humains commises par le passé.
  • Observer et s’exprimer publiquement de manière plus régulière sur les atteintes commises par les forces de sécurité, y compris les mises en détention dans des lieux non autorisés et sans surveillance judiciaire.
  • Continuer d’apporter une assistance financière et technique au processus gouvernemental de réforme du secteur de la sécurité, et y inclure un soutien à l’égard de la réforme du système de justice militaire.
  • Fournir une assistance financière et technique à la CONARIV et au PNCS en matière de conception et de mise en œuvre de programmes de réparation, y compris de meilleures mesures de sensibilisation des victimes.
  • Étant donné le prochain retrait de l’ONUCI, demander le soutien du gouvernement ivoirien, ainsi que des bailleurs de fonds internationaux, à l’égard du maintien d’un bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) en Côte d’Ivoire.

Au l’expert indépendant des Nations Unies sur le renforcement des capacités et de la coopération technique en matière de droits de l’homme en Côte d’Ivoire

  • Surveiller de près et dénoncer fermement les atteintes aux droits humains et, dans les prochains rapports et travaux de recherche, consacrer des chapitres aux exactions commises par les militaires en réaction aux menaces à la sécurité de l’État, aux mises en détention illégales et aux mauvais traitements des détenus perpétrés par la DST, et à l’ingérence de l’exécutif dans le judiciaire.

Au Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale

  • Poursuivre les enquêtes sur toutes les parties à la crise postélectorale de 2010-2011.
  • Renforcer les relations de travail avec les juges et les procureurs ivoiriens, notamment au sein de la CSEI, afin de faciliter le partage d’informations sur les enquêtes et d’identifier des opportunités de formation du personnel de la CSEI.

Méthodologie

Ce rapport, qui s’appuie principalement sur des informations recueillies lors de trois missions de recherche menées en Côte d’Ivoire par Human Rights Watch entre octobre 2014 et août 2015, évalue les progrès que le gouvernement a réalisés par rapport aux problèmes hérités du passé violent du pays, et interroge les Ivoiriens sur leurs principales priorités en matière de droits humains pour les cinq prochaines années.

Human Rights Watch s’est rendue dans des villes du nord (Bouaké et alentours) et de l’ouest de la Côte d’Ivoire (Bloléquin, Duékoué, Daloa et Guiglo), ainsi que dans des villages voisins. Cette recherche a été complétée par des entretiens menés à Abidjan lors de chaque mission et de nombreuses conversations téléphoniques d’octobre 2014 à novembre 2015. En tout, Human Rights Watch a interrogé plus de 200 personnes pour les besoins du présent rapport. La majorité des entretiens ont été conduits individuellement, bien que certains aient été organisés en groupe lorsque les participants préféraient être interrogés collectivement et lorsque les individus ainsi interrogés ne s’exposaient à aucun risque manifeste de représailles de la part de quelque partie que ce soit. Human Rights Watch n’a proposé aucune mesure d’incitation aux personnes interrogées pour recueillir leur témoignage.

Lors de ses déplacements en dehors d’Abidjan, Human Rights Watch a interrogé des chefs coutumiers et traditionnels issus de différents groupes ethniques et d’immigrants ; des militaires, des policiers et des gendarmes ; des agents du gouvernement local ; des groupes locaux de la société civile ; des travailleurs humanitaires ; et des négociants, des propriétaires d’autobus, des chauffeurs et des passagers, entre autres.

À Abidjan, Human Rights Watch a mené des entretiens avec des agents du gouvernement ivoirien à la Présidence, à la Primature, au ministère de la Justice, au ministère de l’Intérieur et au ministère de l’Agriculture ; des procureurs, des magistrats et des juristes ivoiriens ; des hauts dirigeants militaires et des forces de l’ordre. Human Rights Watch a aussi interrogé des représentants de groupes de victimes, d’organisations internationales et nationales de la société civile et d’organisations humanitaires ; des diplomates ; des fonctionnaires des Nations Unies, d’institutions financières internationales et de la Cour pénale internationale ; et des journalistes.

Nombre des individus interrogés ont tenu à parler ouvertement mais en conservant l’anonymat vu les questions sensibles abordées. De nombreux agents internationaux et ivoiriens craignaient que le fait d’être identifiés dans ce rapport ne les expose à des sanctions de la part de leurs supérieurs. Nous avons par conséquent donné une description générique des personnes interrogées dans tout le rapport pour respecter la confidentialité de ces sources.

I. Impunité relative aux violations commises par le passé

La justice rétablit l’équilibre. Ils étaient deux à se battre, ce n’était pas qu’une seule partie. Le fait d’avoir gagné donne-t-il le droit de tuer des gens ? Comment peut-il y avoir une réconciliation si la justice n’est pas impartiale ? Une justice comme celle-ci ne peut conduire à la paix.
– Un militant de la société civile ivoirienne[1]

Le démantèlement de l’architecture d’impunité à la base de la violence qui a marqué l’histoire récente de la Côte d’Ivoire doit faire partie des premières priorités du second mandat du Président Ouattara.

Pendant la décennie de conflit et d’instabilité qui s’est soldée par la crise postélectorale de 2010-2011, les Ivoiriens ont fait l’objet de crimes d’une brutalité épouvantable. Des manifestants ont été fusillés, des villageois ont été extirpés de leur domicile et exécutés de sang-froid, des détenus ont été violemment torturés, des hommes ont été brûlés vifs devant leur famille et des fillettes ont été victimes de viols collectifs.[2]

Et pourtant, la grande majorité des commandants et des chefs impliqués dans ces exactions – de part et d’autre du clivage militaro-politique – n’ont pas véritablement été tenus responsables de ces exactions.

Des victimes de tous bords ont exprimé leur frustration face à l’absence d’obligation de rendre compte de ces actes. Une sympathisante de Ouattara qui vit à Abobo, victime de violence sexuelle pendant la crise postélectorale, a déclaré à Human Rights Watch : « Les responsables des exactions doivent être punis. Nous avons trop souffert. »[3] Un civil de Yopougon qui a voté pour Gbagbo en 2010 a affirmé : « Nous parlons de justice, mais où est-elle, la justice ? »[4]

Cette photo datant du dimanche 16 janvier 2011 montre des clichés éparpillés sur une table du bureau du maire dans le quartier d’Abobo, à Abidjan : ils représentent des personnes qui auraient été mutilées et tuées du fait de leur soutien présumé à Alassane Ouattara pendant la crise postélectorale de 2010-2011. © 2011 Rebecca Blackwell/AP Photo

Les sympathisants de l’opposition se demandent si les tribunaux ivoiriens reconnaîtront un jour la responsabilité des haut placés parmi les forces pro-Ouattara pour les exactions qu’ils ont commises pendant la crise postélectorale de 2010-2011, l’un de ces sympathisants ayant commenté : « C’est le parti qui gagne qui écrit son histoire. »[5] Plusieurs sympathisants de l’opposition ont expliqué à Human Rights Watch que l’absence de justice impartiale était l’une des principales raisons pour lesquelles ils restaient hostiles à l’égard du gouvernement du Président Ouattara, l’un d’eux précisant : « Si la réconciliation n’a pas abouti, c’est à cause du manque de justice. »[6]

Le droit international des droits de l’homme exige des États qu’ils mènent des enquêtes efficaces, rapides, approfondies et impartiales sur les atteintes aux droits humains et, le cas échéant, qu’ils prennent des mesures à l’encontre des personnes présumées responsables.[7] Le droit pénal international exige quant à lui que la plupart des crimes les plus graves, y compris les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les actes de torture, fassent l’objet d’enquêtes pénales et de poursuites en justice.[8] Plusieurs victimes ont déclaré à Human Rights Watch qu’il était important de chercher à établir les responsabilités de toutes les parties afin d’éviter de nouvelles exactions et de promouvoir la réconciliation, l’une d’elles ayant précisé : « Nous devons résoudre cette question de justice impartiale pour qu’une crise postélectorale ne se reproduise pas. »[9]

Une histoire marquée par l’impunité

Le 24 décembre 1999, des militaires mécontents de leur modeste solde ont pris le pouvoir au Président ivoirien de l’époque, Henri Konan Bédié, et demandé au général Robert Gueï, chef de l’État-major du Président, de prendre la tête du gouvernement. Bien que le gouvernement de Gueï ait organisé une élection présidentielle en 2000, un amendement constitutionnel controversé a empêché Ouattara de contester l’élection.[10] Quelques mois plus tard, après une présidentielle remportée en octobre par Laurent Gbabo et des élections législatives organisées en décembre, des affrontements meurtriers entre forces de sécurité, sympathisants de Gbagbo et partisans de Ouattara ont fait plus de 200 morts et des centaines de blessés.[11]

En septembre 2002, une tentative de coup d’état lancée par des groupes rebelles contre le gouvernement de Gbagbo a déclenché un conflit armé lors duquel les rebelles des Forces Nouvelles[12] et les forces pro-Gbagbo ont commis de graves atteintes aux droits humains, y compris des exécutions sommaires, des attaques indiscriminées de civils, des violences sexuelles et des actes de torture.

Aucun des auteurs des atteintes aux droits humains commises pendant les violences électorales de 2000 ou le conflit armé de 2002-2003 n’a été condamné pour les crimes qu’on lui imputait.[13] L’ONU n’a jamais rendu public le rapport de sa commission d’enquête sur les crimes graves commis pendant la guerre civile de 2002-2003, dont l’annexe confidentielle, d’après certaines informations, mettait en évidence 95 individus jugés les plus responsables et méritant de faire l’objet d’une enquête pénale.[14]

Nombre de ceux qui ont échappé aux poursuites en justice pour exactions ont joué un rôle de premier plan dans la crise postélectorale de 2010-2011, lorsque le refus de Gbagbo de reconnaître Ouattara vainqueur de l’élection de 2010 a déclenché une vague de violences et la reprise du conflit armé, durant lequel au moins 3 000 civils ont été tués et plus de 150 femmes violées.

Les voies vers la justice

La Côte d’Ivoire illustre bien les possibilités qu’offre une coopération étroite entre organes de justice nationaux et internationaux pour lutter contre l’impunité des auteurs d’atteintes aux droits humains, les instances judiciaires de la Cour pénale internationale (CPI) opérant parallèlement aux affaires devant les tribunaux ivoiriens.

Au niveau national, les violations graves des droits humains commises pendant la crise postélectorale de 2010-2011 relèvent de la compétence de la cour d’assises un tribunal spécial ayant compétence sur les infractions graves. Début 2015, la cour d’assises a jugé l’ancienne Première dame Simone Gbagbo, ainsi que plus de 75 accusés, pour crimes contre l’État commis pendant la crise postélectorale.[15] Simone Gbagbo a été reconnue coupable et condamnée à vingt ans de prison. Cependant, le procès n’a pas porté sur les graves atteintes aux droits humains que Simone Gbagbo aurait commises pendant la crise, et il a été critiqué par des groupes ivoiriens et internationaux de défense des droits humains qui estiment que les condamnations ont été prononcées « sur la base d’éléments peu convaincants ».[16]

Les enquêtes nationales sur les crimes commis pendant la crise postélectorale sont menées par la Cellule spéciale d’enquête (maintenant renommée la Cellule spéciale d’enquête et d’instruction, CSEI), une unité composée de juges d’instruction et de procureurs et créée en juin 2011. Au premier semestre 2015, la CSEI a inculpé plus de 20 auteurs de crimes – dont des commandants haut gradés des deux parties au conflit – pour leur rôle dans des atteintes aux droits humains commises pendant la crise postélectorale.[17] Cependant, au moment de la rédaction des présentes, les tribunaux civils n’avaient encore prononcé aucun jugement ou condamnation contre ceux qui avaient commis des atteintes aux droits humains pendant la crise.

Le système de justice militaire ivoirien, en proie à de nombreuses difficultés, a jugé un petit nombre d’officiers et de militaires pro-Gbagbo impliqués dans le meurtre de civils pendant la crise, mais il a été critiqué par des groupes internationaux et locaux de défense des droits humains pour le manque de rigueur avec lequel il poursuit ces affaires.[18] En mars 2015, n’ayant pas pu fournir de preuves suffisantes contre les accusés, les procureurs militaires ont été contraints d’abandonner les poursuites judiciaires engagées contre deux commandants pro-Gbagbo pour des bombardements aveugles de quartiers résidentiels à Abobo qui avaient fait plus de 20 morts en mars 2011.[19] Les tribunaux militaires ne devraient en aucun cas avoir compétence sur les graves atteintes aux droits humains commises par les militaires à l’encontre de civils.[20]

Au niveau international, la CPI a ouvert en octobre 2011 une enquête sur les crimes commis pendant la crise postélectorale de 2010-2011. La CPI a pour l’instant porté des affaires contre trois individus : Laurent Gbagbo, son épouse Simone Gbagbo et Charles Blé Goudé, ancien ministre de la Jeunesse et proche allié de Gbagbo, qui pendant longtemps a été à la tête d’un groupe de milice violent pro-Gbagbo. Le procès de Laurent Gbagbo et de Blé Goudé devrait s’ouvrir à la CPI en janvier 2016, alors que le Bureau du Procureur de la CPI n’a pas encore procédé à des inculpations visant les auteurs de crimes commis pendant la crise postélectorale par des partisans de Ouattara. Simone Gbagbo se trouve toujours en Côte d’Ivoire, et le gouvernement a refusé de la transférer à la CPI.

Progrès au niveau des tribunaux nationaux

Le Président Ouattara a promis à maintes reprises que tous les responsables d’atrocités commises pendant la crise postélectorale de 2010-2011 seraient poursuivis devant les tribunaux nationaux, quels que soient leur affiliation politique et leur grade.[21] Il a également déclaré que tous les procès futurs liés à la crise postélectorale se tiendraient dans des tribunaux nationaux et qu’il ne transférerait plus aucun suspect à la CPI.[22]

Les inculpations portées en 2015 par la CSEI contre les auteurs de crimes de haut niveau commis par les deux camps lors de la crise postélectorale représentent un progrès significatif pour les poursuites au niveau national.[23] L’Expert indépendant des Nations Unies, ainsi que Human Rights Watch et d’autres organisations internationales et nationales de défense des droits humains, ont publiquement reconnu que les progrès réalisés dans les enquêtes de la CSEI constituaient un pas important vers une justice impartiale.[24]

Cependant, depuis sa création en juin 2011, la CSEI a bénéficié d’un soutien financier et politique irrégulier de la part du gouvernement ivoirien, d’où une pénurie de personnel et des ressources financières inadéquates.[25] Fin 2013, la survie même de la CSEI était incertaine, un porte-parole du gouvernement ivoirien ayant déclaré sa fermeture imminente.[26] Ce n’est que fin 2014, suite aux fortes pressions exercées par des groupes nationaux et internationaux de défense des droits humains et des diplomates, que le gouvernement a apporté l’appui financier et matériel dont la CSEI avait besoin pour mener des enquêtes efficaces – facteur clé pour permettre aux futures enquêtes d’avancer.[27] Malgré cela, à la mi-2015, selon des informations fiables, la CSEI faisait l’objet des pressions de l’exécutif, celui-ci souhaitant qu’elle termine prématurément ses enquêtes sur les atteintes aux droits humains.[28]

En outre, certains des commandants inculpés par la CSEI conservent des postes clés au sein de la hiérarchie militaire ivoirienne, notamment Chérif Ousmane, commandant à la Garde républicaine, et Losseni Fofana, commandant de l’armée ivoirienne dans l’ouest du pays.[29] Plusieurs observateurs internationaux se sont dits sceptiques quant à l’idée que le Président Ouattara finisse par être favorable à l’engagement de poursuites visant les auteurs d’exactions qu’auraient commises pendant la crise postélectorale de 2010-2011 des personnalités de premier plan de son camp.

Soutien à l’égard de la Cellule spéciale d’enquête et d’instruction

Il est essentiel que la CSEI continue de se voir octroyer les ressources nécessaires à la conclusion de ses enquêtes.[30] Pour permettre la continuité de celles-ci, il est particulièrement important de maintenir le niveau des effectifs et de s’assurer que les juges d’instruction et les procureurs actuellement membres de la CSEI restent en place.[31] Le personnel de la CSEI, ainsi que les juges de la cour d’assises qui, à terme, entendront les affaires relatives aux atteintes aux droits humains, bénéficieraient également d’une assistance technique supplémentaire pour savoir comment juger des crimes complexes impliquant de multiples accusés dans le domaine des droits humains.[32]

La lenteur des instructions nationales souligne combien il importe que la CPI poursuive rapidement son enquête sur les forces pro-Ouattara. Plusieurs des personnes interrogées ont suggéré que le gouvernement aurait en partie renforcé son soutien à la CSEI pour montrer que les tribunaux ivoiriens sont disposés à et capables de poursuivre les auteurs de crimes parmi les partisans de Ouattara (et ainsi échapper à la compétence de la CPI).[33] L’enquête de la CPI reste un moyen de pression crucial pour inciter le gouvernement ivoirien à appuyer les efforts de poursuite en justice des auteurs d’exactions des deux parties à la crise postélectorale de 2010-2011.

De nombreux diplomates internationaux craignent que le Président Ouattara finisse par gracier des individus haut placés jugés responsables de crimes pendant la crise postélectorale, les grâces accordées aux commandants pro-Ouattara donnant lieu en contrepartie à un geste similaire à l’égard de certains alliés de premier plan de Gbagbo.[34] Le Président Ouattara a lui-même déclaré en octobre 2015 : « Ce que nous voulons, c’est que la justice fasse son travail. Et une fois que cela sera fait, nos lois permettent d’envisager des amnisties, des grâces. »[35]

À noter toutefois que gracier des auteurs d’exactions haut placés, qu’ils soient issus de l’une ou l’autre des parties à la crise postélectorale de 2010-2011, reviendrait à un déni de justice pour les victimes, qui attendent depuis près de cinq ans que les responsables rendent compte de leurs actes. Drissa Soumahoro, président d’une coalition de groupes de victimes, a expliqué à Human Rights Watch que si Ouattara accordait des grâces, « Cela reviendrait à dire qu’il se moque complètement des victimes. Les responsables doivent subir les conséquences de leurs actes, et les victimes ont besoin que justice soit faite ».[36]

Des groupes de victimes ont également déclaré que même s’il était souhaitable que les auteurs d’exactions leur demandent pardon dans le cadre du processus ivoirien de réconciliation, elles désiraient tout autant que les auteurs d’atteintes aux droits humains haut placés soient poursuivis en justice et, s’ils sont reconnus coupables, punis. « Le pardon ne veut pas dire qu’il ne doit pas y avoir de justice », a déclaré Soumahoro à Human Rights Watch. « Nous avons besoin de justice – d’une justice impartiale – pour que ces crimes ne se reproduisent pas. »[37] Des militants de la société civile ont déclaré qu’accorder le pardon aux auteurs d’exactions haut placés perpétuerait le cycle d’impunité qui a alimenté les précédents conflits en Côte d’Ivoire, et serait « un encouragement à la récidive par les bourreaux et à la vengeance par les victimes. »[38]

Tout récemment, à savoir en octobre 2015, le Président Ouattara affirmait : « La réconciliation ne veut pas dire pas de justice. »[39] Il devrait déclarer publiquement et sans équivoque qu’il n’accordera sa grâce à aucune personne reconnue coupable de crimes graves contre les droits humains. Le Procureur de la CPI est susceptible de considérer que de telles grâces prouvent que la Côte d’Ivoire ne veut et ne peut pas poursuivre en justice au niveau national les crimes constituant des atteintes aux droits humains.[40]

Rôle de la Cour pénale internationale

L’une des principales raisons pour lesquelles la CPI n’a toujours pas engagé de poursuites contre les auteurs d’exactions qui étaient proches du Président Ouattara pendant la crise postélectorale de 2010-2011 est que le procureur de la CPI avait initialement décidé d’enquêter d’abord sur l’ancien Président Gbagbo et ses alliés avant de s’intéresser aux forces pro-Ouattara,[41] décision prise dans la lignée d’une politique d’enquêtes « successives » menées par le Bureau du Procureur au tout début de l’existence de la Cour.[42]

Des membres du personnel de la CPI ont également affirmé à Human Rights Watch que des restrictions budgétaires dues au fait que la CPI entend des dossiers dans d’autres pays avaient affecté sa capacité à enquêter sur les forces pro-Ouattara.[43]

De nombreux militants de la société civile ivoirienne ont dit à Human Rights Watch que l’orientation unilatérale des dossiers de la CPI avait nui à la perception de sa légitimité.[44] Un défenseur ivoirien des droits humains a ainsi déclaré : « La CPI n’œuvre pas de façon à prendre en compte toutes les victimes… Les victimes qui appartiennent à l’autre partie [à savoir les victimes d’abus perpétrés par des forces pro-Ouattara] ne croient pas en la CPI. C’est triste à dire car généralement une victime ne prend pas parti. »[45]

Les enquêtes de la CPI ont par ailleurs une portée géographique limitée. Laurent et Simone Gbagbo et Blé Goudé ne sont inculpés que dans le cadre de quatre ou cinq incidents, qui se sont tous déroulés à Abidjan.[46] Par conséquent, à ce jour, les dossiers traités par la CPI ne concernent aucune des atrocités commises dans l’ouest de la Côte d’Ivoire.[47] Plusieurs chefs communautaires de l’ouest du pays se sont plaints à Human Rights Watch de cette contrainte géographique : « Depuis 2002, nous avons vraiment souffert, et pourtant toutes les exactions ont bénéficié d’une impunité totale… Les gens ne savent pas vraiment ce qui s’est passé au cœur du pays. »[48]

Les travaux de la CPI en Côte d’Ivoire ont été rendus d’autant plus complexes par les déclarations publiques du Président Ouattara en avril 2015 selon lesquelles il ne transférerait plus aucun suspect à la CPI.[49] Le gouvernement a lancé une procédure d’appel concernant la recevabilité de l’affaire Simone Gbagbo devant la CPI (faisant valoir qu’elle pouvait être jugée par des tribunaux ivoiriens), appel qui a été rejeté en mai 2015 ; malgré cela, le gouvernement a refusé de transférer Gbagbo devant la CPI. [50]

Au second semestre 2015, le Bureau du Procureur de la CPI a intensifié ses enquêtes consacrées aux forces pro-Ouattara. Un haut fonctionnaire ivoirien a ainsi déclaré à Human Rights Watch que la position du gouvernement sur de futurs transferts ne l’empêcherait pas de coopérer avec les enquêteurs de la CPI qui examinent les violations commises par les forces pro-Ouattara,[51] même si un diplomate a précisé qu’il était « trop tôt » pour connaître l’ampleur de la coopération du gouvernement.[52]

II. Instauration d’un système judiciaire qui respecte et protège les droits humains

On doit décider quelle justice on veut pour ce pays. Les réformes qui ont déjà été mises en œuvre sont bienvenues, mais notre pays, avec tous ses moyens, peut largement mieux faire pour faciliter l’accès à une justice de qualité. Une réforme de la justice ne peut se faire en cinq ans, elle nécessite une vision à plus long terme pour permettre une transformation profonde.
— Manlan Ehounou Laurent, magistrat ivoirien et président de Transparency Justice[53]

Lorsque le Président Ouattara a pris ses fonctions en 2011, son gouvernement a hérité d’un système judiciaire ravagé par le conflit et des années d’abandon. Depuis, il a commencé à remettre l’infrastructure en état et a réussi à redéployer le personnel judiciaire dans des régions du nord du pays qui, avant la crise postélectorale de 2010-2011, échappaient au contrôle du gouvernement.

Cependant, de nombreux Ivoiriens estiment qu’ils ne peuvent toujours pas compter sur la justice pour respecter leurs droits et leur apporter une solution efficace lorsque ces droits sont bafoués. D’après un sondage réalisé à Abidjan en décembre 2013, 64 % des personnes interrogées avaient « peu voire pas du tout confiance en la justice ».[54] Le représentant d’un bailleur de fonds international qui a fortement investi dans le secteur de la justice a ainsi déclaré à Human Rights Watch : « Les gens ne voient les tribunaux que comme un endroit où l’on va quand on a quelque chose à se reprocher, et non pour y trouver des solutions à ses problèmes. »[55] Un juriste ivoirien d’une clinique juridique dans le nord-est du pays a expliqué : « La population ne fait pas vraiment confiance au secteur de la justice ; elle pense qu’il ne se passera rien et que les dossiers resteront sur les bureaux sans que personne n’y touche. »[56]

De la nécessité de reconstruire

La décennie de conflit et d’instabilité intermittents qui a suivi le coup d’état de 1999 a gravement nui aux efforts destinés à améliorer l’accès à la justice, et un bailleur de fonds international qualifiant les années 2000 de « décennie perdue » pour la réforme du secteur de la justice.[57] À partir de 2002, de nombreux tribunaux ont cessé de fonctionner dans les zones du nord et de l’ouest du pays contrôlées par les Forces Nouvelles. Du fait de l’instabilité politique et du sous-investissement, les tribunaux des zones contrôlées par le gouvernement se sont retrouvés débordés, dépassés et inefficaces.[58] Le système judiciaire a par ailleurs été affaibli pendant la crise postélectorale de 2010-2011, lorsque 17 des 37 tribunaux du pays et 22 de ses 33 prisons ont été détériorés.[59]

Au début de son premier mandat, le Président Ouattara a déclaré aux magistrats qu’il fallait « faire renaître la confiance perdue » dans la justice.[60] En juin 2013, le gouvernement, suite à une proposition du ministère de la Justice, a adopté un Plan d’action de la politique sectorielle de la justice, qui présentait les réformes envisagées pour soutenir la reprise du système judiciaire à court terme et résoudre les problèmes plus anciens, notamment améliorer l’indépendance du pouvoir judiciaire et l’accès à la justice.[61] À l’issue de ce plan, de nombreux tribunaux et centres de détention ont été modernisés.[62] Le personnel judiciaire a été redéployé et les tribunaux ont rouvert dans tout le pays.[63] L’amélioration de la formation judiciaire a également fait l’objet d’une attention considérable.[64]

Une grande partie du Plan d’action n’a toutefois pas encore été mis en œuvre. Des juristes et des magistrats ivoiriens, ainsi que des bailleurs de fonds internationaux, ont déclaré à Human Rights Watch qu’en n’exécutant pas certaines des réformes prévues, telles que celles portant sur le cadre législatif pour renforcer l’indépendance de la justice, le gouvernement faisait preuve d’un manque de volonté politique, tandis que d’autres réformes étaient entravées par l’insuffisance des moyens budgétaires dont disposent les tribunaux et les instances judiciaires.[65]

Alors que le gouvernement du Président Ouattara entame son second mandat, plusieurs domaines prioritaires – examinés plus en détail ci-après – méritent que l’on s’y attelle de toute urgence pour permettre au système judiciaire de protéger les droits des Ivoiriens de manière adéquate. Parmi les priorités figurent notamment le manque d’indépendance de la justice, la corruption, les détentions préventives d’une durée excessive, les mauvaises conditions pénitentiaires et le manque d’accès à une représentation judiciaire.

Le Président Ouattara ayant promis de réviser la constitution ivoirienne vers le début de son second mandat, le gouvernement devrait s’appuyer sur le processus de réforme constitutionnelle pour promouvoir l’indépendance du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et protéger les juges de toute ingérence de l’exécutif.

Par ailleurs, le gouvernement devrait de toute urgence passer en revue le Plan d’action de la politique sectorielle de la justice afin d’en élaborer une version révisée pour la période 2016-2020, comprenant notamment de nouvelles dates butoirs pour la réalisation des principales réformes qui n’ont pas encore été mises en œuvre.

La révision du Plan d’action devrait également inclure un calendrier d’adoption des codes et lois élaborés pendant le premier mandat du Président Ouattara mais qui n’ont pas encore été finalisés et adoptés et sont essentiels pour une réforme de l’État de droit.[66] Il s’agit là notamment du code de procédure pénale et des lois régissant le statut de la magistrature, le système pénitentiaire et l’assistance judiciaire.

Lors de ses travaux sur la révision du plan, le ministère de la Justice devrait identifier le coût raisonnable des réformes et programmes prévus, et plaider en faveur d’une hausse des investissements dans le secteur judiciaire afin d’appuyer les principales réformes. En novembre 2011, le Président Ouattara a déclaré : « Des moyens financiers sont donc indispensables à la Justice pour bien fonctionner », ajoutant qu’il ferait passer le budget du ministère de la Justice à 3 % du budget de l’État.[67] Cependant, en 2014, le budget de ce ministère se montait à 90,6 millions d’euros (96,4 millions de US$), soit seulement 1,4 % du budget global de l’État ivoirien.[68]

Les bailleurs de fonds internationaux, dont la France, les États-Unis et l’Union européenne (UE), devraient faire davantage pression sur le gouvernement ivoirien pour qu’il progresse dans certains domaines, comme l’amélioration de l’indépendance de la justice, où il ne manifeste peut-être pas une volonté politique suffisante à l’égard de la mise en œuvre de réformes.[69] Par exemple, le gouvernement français, qui réfléchit actuellement aux modalités d’un investissement de 8 millions d’euros (8,5 millions de US$) supplémentaires dans le secteur de la justice, devrait inclure dans sa programmation un soutien à l’égard d’une réforme des dispositions constitutionnelles et des lois régissant le CSM et le statut de la magistrature.[70]

Manque d’indépendance de la justice

L’ingérence politique dans le processus décisionnel judiciaire ivoirien est un problème qui était déjà présent avant l’entrée en fonction du gouvernement Ouattara. Selon des agents du gouvernement ivoirien, l’annulation par le Conseil constitutionnel des résultats de l’élection présidentielle de 2010 annoncés par la Commission électorale reflètent le manque d’indépendance perçu de la justice sous l’ère Gbagbo.[71]

De nombreux interlocuteurs, dont des groupes de la société civile ivoirienne et des diplomates, se sont dits préoccupés par ce qui, pour eux, constituait une continuation de l’ingérence de l’exécutif dans l’indépendance de la justice lors du premier mandat de Ouattara.[72] Selon un défenseur ivoirien des droits humains, l’indépendance de la justice est légèrement plus forte que du temps où Gbagbo était président, lorsque le contrôle du judiciaire par l’exécutif était tel qu’il s’agissait « vraiment d’une justice aux ordres ».[73] Ce même interlocuteur a toutefois signalé qu’il « reste des problèmes structurels qui empêchent les juges d’avoir le courage d’agir de manière indépendante ».

Peu après son arrivée au pouvoir, le Président Ouattara a déclaré qu’il avait pour ambition d’instaurer une justice « indépendante et impartiale ».[74] La promotion d’une justice indépendante et impartiale est un fondement essentiel tant du Plan d’action de la politique sectorielle de la justice[75] que de la Stratégie de sécurité nationale de la Côte d’Ivoire.[76] Cependant, le gouvernement n’a pas mis en œuvre deux réformes mises en évidence dans le Plan d’action qui protégeraient la justice de l’ingérence de l’exécutif.

Premièrement, le gouvernement n’a pas finalisé d’avant-projet de loi pour renforcer l’indépendance du CSM, l’organe chargé de nommer les magistrats et d’assurer leur discipline.[77] En vertu de la Constitution, le Président ivoirien est le responsable du CSM, ce qui revient à donner à l’exécutif un rôle clé dans le fonctionnement de cette institution. En 2012, le ministère de la Justice a préparé une loi qui aurait permis d’accroître l’indépendance du CSM, sans nécessiter d’amendement constitutionnel, en demandant au Président de suivre les conseils du CSM pour sélectionner les juges.[78]

De même, le ministère de la Justice n’a pas finalisé d’avant-projet de loi pour modifier les législations régissant le statut de la magistrature, législations qui, tel qu’elles sont appliquées à l’heure actuelle, permettent à l’exécutif de choisir le tribunal auquel un juge est affecté.[79] Un expert du secteur de la justice a ainsi déclaré à Human Rights Watch qu’aujourd’hui, les juges redoutent d’être « envoyés à Odienné », une ville particulièrement isolée, s’ils prennent une décision de justice qui déplaît à l’exécutif.[80]

Manlan Ehounou Laurent, président de Transparency Justice, un groupe de magistrats et de juristes ivoiriens dont l’objectif est d’améliorer l’accès à une justice de qualité, a indiqué à Human Rights Watch que le fait que le gouvernement n’ait pas adopté de loi sur le CSM et le statut de la magistrature avait eu un impact négatif sur l’indépendance de la justice. Il a déclaré : « Le contrôle que l’exécutif continue à exercer sur la nomination des magistrats a des conséquences importantes pour l’impartialité des juges. Si je suis nommé grâce à quelqu’un, évidemment, j’aurai du mal à lui refuser ce qu’il me demandera. »[81]

Un diplomate a déclaré à Human Rights Watch que l’absence de progrès de la part du gouvernement sur des lois sur le CSM et le statut de la magistrature était « une décision politique » qui reflétait « l’absence de désir de changer le niveau de contrôle qu’exerce actuellement l’exécutif sur les juges ».[82]

Les normes internationales exigent des juges qu’ils puissent régler les affaires dont ils sont saisis sans être l’objet d’influences, de menaces ou d’interventions indues, directes ou indirectes, de la part de qui que ce soit ou pour quelque raison que ce soit.[83] La démarche utilisée pour nommer des juges devrait préserver l’indépendance et l’impartialité de la justice.[84]

Avant l’élection présidentielle d’octobre de 2015, le Président Ouattara a déclaré que, s’il était élu, son gouvernement proposerait des amendements à la constitution ivoirienne.[85] Son gouvernement devrait profiter du processus de réforme constitutionnelle pour supprimer le rôle du Président à la tête du CSM et instaurer un processus de nomination des membres du CSM qui soit indépendant de toute influence de l’exécutif. Le gouvernement devrait également réviser les lois relatives au statut de la magistrature pour que ce soit le CSM, et non pas l’exécutif, qui choisisse les tribunaux auxquels les juges sont affectés.

Corruption

Des juristes, des juges et des organisations de défense des droits humains de Côte d’Ivoire, ainsi que des experts juridiques internationaux, ont déclaré que la corruption restait un problème significatif au sein du secteur de la justice, avec un impact direct sur la protection des droits.[86] Le juge Manlan, responsable de Transparency Justice, a déclaré à Human Rights Watch : « La corruption est une partie de la société ivoirienne, et donc les problèmes qui se retrouvent au sein de l’administration publique ivoirienne, y compris la corruption, se trouvent au sein du secteur de la justice. Mais la présence de corruption est plus grave pour le secteur de la justice, car nous sommes supposés être l’équilibre de la société, et donc si on est corrompu, la société est déséquilibrée. »[87]

Les personnes interrogées ont expliqué que, dans les affaires pénales, la corruption alimentait l’impunité en permettant aux individus d’échapper à des poursuites.[88] Un juriste ivoirien a également déclaré à Human Rights Watch qu’en Côte d’Ivoire, la décision de laisser un accusé en détention préventive dépendait souvent de ses moyens financiers. « Ce sont les vrais criminels que l’on laisse sortir, tandis que les plus pauvres restent en détention, » a-t-il commenté. « Si l’on veut ne pas être mis en détention préventive ou en sortir, il suffit de payer le procureur ou le juge d’instruction, et on sort. »[89]

En novembre 2011, le Président Ouattara a déclaré que la corruption au sein du secteur de la justice devrait « être abolie » et que les juges corrompus seraient démis de leurs fonctions.[90] Le gouvernement et les bailleurs de fonds internationaux ont renforcé l’Inspection générale des services judiciaires et pénitentiaires, mandatée par le gouvernement avec la surveillance du système judiciaire. L’Inspection générale, après de nombreuses années d’inactivité, effectue désormais les inspections des tribunaux et des prisons d’Abidjan et de l’intérieur du pays.[91] En 2012, le gouvernement a par ailleurs adopté des règles qui permettent à l’Inspection générale d’ouvrir ses propres enquêtes sur un tribunal ou un agent particulier, sans que le ministère de la Justice lui en ait donné l’ordre.[92]

Les rapports compilés par l’Inspection générale sont ensuite soumis au ministre de la Justice qui, s’il existe des preuves d’actes répréhensibles commis par un juge ou un procureur, est censé référer l’affaire en vue d’une procédure disciplinaire devant le CSM (pour les juges) ou la Commission de discipline du Parquet (pour les procureurs).[93] Des juristes ivoiriens ont toutefois dit à Human Rights Watch qu’ils n’avaient pas connaissance de juges qui auraient été disciplinés ou poursuivis pour corruption depuis 2012, lorsque les nouvelles règles permettant à l’Inspection générale d’ouvrir des enquêtes ont été adoptées.[94]

Des experts juridiques ivoiriens et internationaux ont déclaré à Human Rights Watch qu’étant donné que c’est le ministre de la Justice qui réfère les actes répréhensibles identifiés par l’Inspection générale en vue d’une procédure disciplinaire, l’exécutif pourrait bloquer les dossiers disciplinaires qui visent des juges et des procureurs.[95]

Qui plus est, puisque ni les rapports de l’Inspection générale, ni le résultat des procédures disciplinaires visant des juges ou des procureurs ne sont rendus publics, les députés et les organisations de la société civile ont énormément de mal à savoir dans quelle mesure la corruption est signalée et sanctionnée.[96]

À l’approche de l’élection présidentielle de 2015, le Président Ouattara a de nouveau reconnu le problème de la corruption au sein du secteur de la justice, promettant qu’il allait « s’attaquer à ceux-là ».[97] Il a ainsi déclaré que les juges corrompus seraient démis de leurs fonctions, et qu’il proposerait une législation pour rendre publiques les sanctions disciplinaires qui leur seraient imposées.[98] Il s’agirait là d’une étape positive, même si au moins un magistrat ivoirien a déclaré qu’il était important que les juges accusés d’actes répréhensibles puissent bénéficier d’une assistance judiciaire appropriée, et qu’ils soient présumés innocents jusqu’à la fin des procédures disciplinaires.[99]

Le nouveau gouvernement du Président Ouattara devrait donner à l’Inspection générale le pouvoir de référer les magistrats soupçonnés d’actes répréhensibles directement au CSM et à la Commission de discipline du Parquet, sans l’autorisation du ministre de la Justice. Le gouvernement devrait également adopter un décret exigeant de l’Inspection générale qu’elle diffuse les versions publiques de ses rapports d’inspection, en faisant apparaître le nom des individus soupçonnés d’actes répréhensibles, jusqu’à la fin des procédures disciplinaires. Un effort de communication auprès du public est également nécessaire pour lui faire savoir qu’il peut déposer des plaintes relatives à des pratiques corrompues directement auprès de l’Inspection générale.

Détentions préventives prolongées et excessives

Les tribunaux ivoiriens continuent de recourir de manière excessive à la détention préventive, qui concerne environ 40 % des personnes incarcérées dans les prisons ivoiriennes.[100] Le jugement des affaires qui impliquent des crimes graves prenant du temps, de nombreux détenus passent plusieurs années en détention préventive avant d’être jugés ou libérés.[101] La détention préventive excessive et de longue durée était également un problème grave sous la présidence de Gbagbo,[102] mais le gouvernement du Président Ouattara a pour l’instant pris trop peu de mesures pour le résoudre. Elle devrait être l’une des priorités de son second mandat.

La prévalence de la détention préventive et la lenteur à laquelle les affaires sont réglées aggravent la surpopulation dans les prisons ivoiriennes.[103] Avant la crise postélectorale de 2010-2011, la Côte d’Ivoire comptait 12 000 prisonniers, alors que le système pénitentiaire national a été prévu pour 5 000.[104] Bien qu’un très grand nombre de prisonniers se soient échappés pendant la crise, la population carcérale varie désormais entre 8 000 et 12 000 détenus ; en juin 2015, la Côte d’Ivoire comptait 9 500 prisonniers.[105] Les prisonniers sont répartis de manière inégale à travers les 34 prisons du pays, près de la moitié d’entre elles étant surpeuplées.[106]

En vertu du droit ivoirien, la décision d’imposer une détention préventive est prise par le juge chargé d’enquêter sur le crime présumé, autrement dit le juge d’instruction. Bien que la loi stipule que la détention préventive ne doit être qu’une mesure exceptionnelle, elle ne donne aucune directive sur les critères que les juges devraient appliquer pour déterminer s’il convient de placer une personne en détention, et elle n’exige pas des juges qu’ils motivent leur décision.[107]

Par conséquent, les juges décident trop souvent d’imposer une détention préventive sans qu’il n’existe de raison impérieuse de le faire. Comme l’explique Yacouba Doumbia, président du Mouvement ivoirien des droits de l’homme : « Puisqu’on n’a pas de directives sur la manière dont le juge d’instruction décide ou non d’imposer une détention préventive, la détention préventive devient la norme et non pas l’exception comme le prévoit le code de procédure pénale. »[108] Le droit international des droits de l’homme indique clairement que la détention préventive doit être l’exception et non la règle.[109]

En juillet 2013, le ministère de la Justice, conformément au Plan d’action de la politique sectorielle de la justice, a instauré un comité d’experts chargé de réformer les codes juridiques du pays.[110] Le sous-comité qui examine le code de procédure pénale en 2015 a rédigé des dispositions qui préciseraient les raisons pour lesquelles un juge peut imposer une détention préventive et exigeraient des juges qu’ils motivent leur décision. La version révisée du code permettrait également aux juges d’imposer des conditions aux prévenus libérés avant leur jugement, par exemple en les obligeant à se présenter régulièrement à un poste de police.[111] Le ministère de la Justice devrait accélérer l’examen et l’adoption des modifications que le comité propose d’apporter au code de procédure pénale.

Pour résoudre le problème de lenteur de la justice qui contribue à l’imposition de mises en détention préventive de longue durée, le ministère de la Justice, avec le soutien de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), a élaboré et piloté un système amélioré de gestion des dossiers afin d’aider les tribunaux à suivre la progression des affaires pénales.[112] Cependant, les efforts destinés à accélérer le traitement des affaires sont souvent mis à mal par le fait que les individus accusés d’un crime, tel qu’un meurtre ou un viol, doivent obligatoirement être jugés devant la cour d’assises, qui se compose de trois juges et d’un jury de six personnes et se réunit de manière extraordinaire.[113] En vertu du droit ivoirien, les sessions de la cour d’assises doivent être tenues tous les trois mois.[114] Cependant, malgré le retard dont souffre le traitement des dossiers, les défis logistiques et financiers associés à la tenue d’une session en cour d’assises font qu’elle se réunit de manière très irrégulière – en 2014, c’était la première fois qu’une session de la cour d’assises ivoirienne avait lieu depuis dix ans.[115]

Le droit international des droits de l’homme exige que toute personne arrêtée ou détenue du chef d’une infraction pénale puisse prétendre à être jugée dans un délai raisonnable ou à être libérée.[116] L’une des solutions qui permettrait de réduire les retards des jugements dans le cadre d’affaires pénales consisterait à créer une chambre pénale permanente au sein des trois cours d’appel ivoiriennes, modification qui n’a pas encore été intégrée dans la réforme en cours du code de procédure pénale.[117] Le code de procédure pénale pourrait également fixer les délais dans lesquels les tribunaux doivent entendre les affaires pénales ; ainsi, un accusé en détention préventive devrait être libéré et percevoir une indemnisation si ce délai est dépassé.[118]

Conditions pénitentiaires

D’après des ONG ivoiriennes et des experts internationaux qui travaillent sur la réforme du système pénitentiaire en Côte d’Ivoire, les détenus manquent dans de nombreux cas d’une nourriture, d’installations sanitaires et d’un accès aux soins de santé suffisants.[119] Certaines prisons, comme la prison civile de Bouaké, ne séparent pas les détenus adultes des détenus mineurs.[120] Il convient de saluer la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP) du ministère de la Justice, qui a reconnu les problèmes du système pénitentiaire et élaboré en 2015 un projet de Plan d’amélioration des conditions de détention pour venir à bout du problème de surpopulation carcérale, améliorer l’hygiène, les soins de santé et la nutrition, et accroître l’accès aux services juridiques et sociaux. La DAP a également déclaré qu’elle organiserait régulièrement des ateliers avec les organisations de la société civile pour débattre de l’avancement du plan.[121] La mise en œuvre de celui-ci nécessitera toutefois une hausse considérable du budget affecté au système pénitentiaire ivoirien, ce qui, d’après de nombreux experts du secteur de la justice, sera difficile à réaliser vu le budget dont dispose actuellement le ministère de la Justice.[122]

Le ministère de la Justice est également en train de rédiger une nouvelle loi sur le système pénitentiaire ainsi que des décrets stipulant la façon dont cette loi doit être mise en œuvre. Avant de finaliser cette loi et ces décrets, le ministère de la Justice devrait envisager des initiatives innovantes – notamment en imposant des mises en liberté surveillée au lieu d’incarcérations – ce qui réduirait la surpopulation carcérale.[123]

Manque d’accès à une assistance judiciaire

Le manque d’assistance judiciaire pour les accusés en matière pénale est un facteur majeur contribuant à l’imposition de mises en détention préventive excessives et de longue durée ; il nuit également à l’équité de leur futur procès.[124]

En vertu du droit ivoirien, les accusés ont uniquement accès à une assistance judiciaire obligatoire pour des affaires déférées à la cour d’assises, qui traite des dossiers pénaux les plus graves.[125] Dans le cas d’accusés indigents, la cour d’assises est tenue de nommer un avocat, auquel l’État verse des honoraires fixes.[126] Les personnes accusées de délits qui ne relèvent pas des compétences de la cour d’assises ne sont représentées que si elles ont les moyens de payer un avocat, ce qui n’est pas le cas de nombre d’inculpés.[127] La Côte d’Ivoire compte environ 500 avocats actifs, qui sont pratiquement tous basés à Abidjan, et les personnes de l’intérieur du pays en particulier ont du mal à se faire représenter.[128]

Le fait que les indigents accusés de crimes devant la cour d’assises ne bénéficient souvent de l’assistance d’un avocat qu’au moment de leur procès affecte sérieusement l’équité de la procédure. Plusieurs décisions clés relatives au dossier – par exemple, quels témoins le juge d’instruction doit interroger – sont prises pendant l’instruction, a expliqué un avocat ivoirien à Human Rights Watch, précisant qu’« il ne sert à rien d’avoir un avocat pour un procès aux Assises mais pas pendant l’instruction ».[129] Le droit international des droits de l’homme exige que les accusés reçoivent l’assistance d’un avocat dès leur arrestation.[130]

Les accusés indigents qui souhaitent être représentés par un avocat pendant l’instruction, ou qui ne sont inculpés que pour des délits ou contraventions, peuvent soit recourir au système ivoirien d’assistance judiciaire, qui est censé aider les parties indigentes dans toutes les affaires civiles et pénales mais qui souffre de certaines failles, soit se tourner vers les organisations non gouvernementales (ONG).[131] Cependant, un juriste ivoirien et un expert juridique international ont expliqué qu’en Côte d’Ivoire, très peu d’accusés savent qu’il leur est possible d’obtenir une assistance judiciaire ou connaissent la démarche ; le Bureau national d’assistance judiciaire, qui est le bureau du ministère de la Justice à Abidjan chargé de se prononcer sur ces demandes, n’en reçoit que quelques centaines par an.[132]

En l’absence d’une assistance judiciaire adéquate prise en charge par l’État, une bonne partie de la lourde charge consistant à fournir des conseils juridiques aux accusés incombe aux ONG. Pendant le premier mandat du Président Ouattara, l’UE et les Nations Unies ont appuyé l’ouverture de six cliniques juridiques à l’intérieur du pays par l’Association des femmes juristes de Côte d’Ivoire (AFJ-CI).[133] Aimée Zebeyoux, présidente de l’AFJ-CDI, a expliqué à Human Rights Watch : « Les cliniques ont été conçues pour rendre la justice plus accessible. Nous essayons de rassurer les accusés qui ont peur de se rapprocher du système judiciaire sans notre aide. »[134]

Bien que plusieurs répondants aient déclaré que les cliniques juridiques gérées par les ONG fournissaient des services essentiels, la responsabilité de la fourniture d’une assistance judiciaire aux Ivoiriens indigents, notamment dans les affaires pénales, incombe au gouvernement ivoirien.[135] Début 2014, l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI), l’UE et un programme financé par USAID ont conjointement élaboré et proposé une nouvelle loi sur l’assistance judiciaire gouvernementale dans le but de rendre cette assistance plus accessible grâce à des bureaux d’assistance judiciaire d’État instaurés au sein des tribunaux de première instance et des sections détachées.[136] Le ministère de la Justice n’a toutefois pas fini d’examiner cette loi.[137] À ce jour, il s’est montré peu disposé à engager ses propres fonds pour prendre en charge l’assistance judiciaire.

III. Réforme du secteur de la sécurité

Pendant dix ans, il n’y avait pas de police, pas de gouvernement, pas de justice… Personne ne s’occupait des droits humains. Nous essayons maintenant de rétablir l’État de droit.
– Un commissaire de police, dans le nord de la Côte d’Ivoire[138]

Plusieurs interlocuteurs ont affirmé à Human Rights Watch que le comportement des forces de sécurité, y compris des militaires, s’était amélioré depuis la crise postélectorale de 2010-2011. Un haut responsable de l’ONUCI a ainsi déclaré que l’armée ivoirienne se comportait « moins comme des brutes envers la population qu’avant ».[139] Le gouvernement a également fait des progrès en transférant des forces armées à la police et à la gendarmerie certaines responsabilités en matière d’application de la loi, même si la police et la gendarmerie ne sont souvent pas assez équipées et formées pour pouvoir protéger les citoyens de la criminalité.

Malgré les progrès réalisés, les atteintes aux droits humains perpétrées par les forces de sécurité, y compris des arrestations et des mises en détention arbitraires et, dans certains cas, des actes de torture, se sont poursuivies pendant le premier mandat du Président Ouattara.[140] Le racket et l’extorsion, principalement à des barrages routiers illégaux, restent fréquents au sein des différents corps des forces de sécurité, y compris la police et la gendarmerie.

Des agents de l’ONUCI, des officiers de police ivoiriens et des militants de la société civile ont affirmé à Human Rights Watch que les membres des forces de sécurité étaient très rarement poursuivis en justice ou sanctionnés en cas d’atteintes aux droits humains, que ce soit par le biais des tribunaux civils ou du système de justice militaire.[141] Lorsqu’un soldat est poursuivi devant un tribunal civil, « trop souvent, parce que c’est un militaire, l’affaire ne va nulle part », a déclaré un juriste ivoirien.[142] Le système ivoirien de justice militaire est doté de ressources très insuffisantes et a de toute urgence besoin d’être réformé pour devenir plus indépendant de l’exécutif.

Un passé marqué par les exactions

En entamant son premier mandat, le Président Ouattara est devenu commandant en chef des forces de sécurité qui sont marquées par de nombreuses divisions et dont les atteintes aux droits humains sont connues de longue date. L’armée ivoirienne, qui porte le nom de Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), était un regroupement des anciens rebelles des Forces Nouvelles et des membres des forces de sécurité de l’ère Gbagbo.[143] Les dirigeants des FRCI issus des Forces Nouvelles considéraient que la police, qui dépendait du ministère de l’Intérieur, et la gendarmerie, qui relevait du ministère de la Défense, étaient étroitement liées à l’ancien régime Gbagbo.[144]

Toutes ces forces ont été impliquées dans de graves crimes contre les droits humains pendant la décennie d’instabilité qui a conduit à la crise postélectorale de 2010-2011. Les forces de sécurité de Gbagbo ont commis des exactions généralisées après l’élection présidentielle de 2000, au cours du conflit de 2002-2003 et pendant la violence postélectorale.[145]

Les rebelles des Forces Nouvelles ont été impliqués dans des exécutions sommaires, des violences sexuelles généralisées et des actes de torture pendant le conflit de 2002-2003 et, des années plus tard, ils ont massacré des centaines de personnes alors qu’ils déferlaient sur le sud du pays pour prendre le contrôle d’Abidjan pendant la crise postélectorale de 2010-2011.[146] Par ailleurs, les rebelles avaient longtemps tiré des bénéfices énormes d’un système de taxation parallèle ciblant les entreprises et les barrages routiers lorsqu’ils contrôlaient le nord du pays.

Quelques progrès

D’après des agents de l’ONUCI, la réforme du secteur de la sécurité était une priorité clé du premier mandat de Ouattara.[147] En septembre 2012, la Côte d’Ivoire a adopté une Stratégie nationale pour une réforme du secteur de la sécurité, qui présente 108 réformes conçues pour transformer les forces de sécurité en leur permettant d’exécuter leur mission « dans un cadre respectant les normes démocratiques et les principes de bonne gouvernance ».[148]

Des experts de la réforme du secteur de la sécurité, des agents de l’ONUCI et des diplomates ont souligné que plusieurs développements révélaient des progrès, en termes de professionnalisation des forces de sécurité, de contrôle civil de celles-ci et de lutte contre l’indiscipline et les exactions dont elles ont fait preuve pendant des années.

Premièrement, le gouvernement a fait des progrès en transférant des FRCI à la police et à la gendarmerie la responsabilité du maintien de l’ordre public. Après la crise postélectorale de 2010-2011, les FRCI – soutenus par des « volontaires » armés fidèles aux FRCI – se sont mis à assumer de nombreuses fonctions qui, pendant l’ère Gbagbo, incombaient à la police et à la gendarmerie. Le gouvernement est par la suite parvenu à déployer des policiers et des gendarmes dans tout le pays, même si les FRCI continuent d’assumer certaines tâches liées à l’application de la loi dans des régions posant des risques sécuritaires particuliers.[149] Selon un agent de l’ONUCI, le mode de sécurisation de l’élection présidentielle d’octobre 2015 qu’a employée le gouvernement, à savoir en chargeant 4 000 FRCI de soutenir 11 500 gendarmes et 11 500 policiers, révèle combien le rôle des FRCI reste nécessaire pour assurer la sécurité dans les régions sensibles.[150]

Des soldats ivoiriens défilant lors d’une parade militaire à Abidjan le 7 août 2015, en commémoration du Jour de l’Indépendance du pays.  © 2015 Luc Gnago/Reuters

Deuxièmement, une initiative des FRCI visant à réduire la violence basée sur le genre a été évoquée pour démontrer les efforts déployés par les hautes instances de l’armée afin d’améliorer la discipline.[151] En juillet 2014, les FRCI ont instauré un comité d’experts nationaux sur les violences sexuelles liées au conflit, qui a ensuite développé un plan d’action pour permettre aux FRCI de venir à bout du problème de violence sexuelle.[152] Depuis, plus de 900 membres des FRCI et plus de 300 policiers et gendarmes ont reçu une formation pour lutter contre la violence basée sur le genre,[153] même si un agent de l’ONUCI a déclaré que le comité pourrait en faire davantage pour remplir son mandat.[154] Des agents de l’ONUCI ont également signalé qu’un nouveau mécanisme de signalement constituait un développement positif ; il s’agit là pour l’ONUCI et les FRCI de collaborer afin d’identifier les atteintes aux droits humains commises par les militaires et d’effectuer un suivi des mesures appliquées pour enquêter sur les responsables et les sanctionner.[155]

En outre, des diplomates ont salué l’adoption en mars 2015 d’une loi sur l’organisation de la défense nationale et des forces armées, même si cette loi n’a pas encore été promulguée.[156] Cette loi a pour objectif de mieux professionnaliser les FRCI en définissant des critères clairs relatifs aux promotions, aux avantages sociaux et aux départs en retraite. Elle pourrait également contribuer à clarifier le rôle des FRCI en matière de sécurité interne, car elle stipule les conditions selon lesquelles une intervention militaire de maintien de l’ordre sera permise.[157]

Arrestations et mises en détention arbitraires

Les exactions les plus graves perpétrées lors du premier mandat du Président Ouattara se sont produites lorsque des militaires ont réagi à des incursions transfrontalières et d’autres attaques visant des entités de l’État. En 2012, une série d’attaques de villages et d’installations militaires lancées depuis la Côte d’Ivoire ainsi que depuis le Liberia et le Ghana voisins probablement planifiées et exécutées par des militants et des partisans de l’ancien Président Laurent Gbagbo a entraîné de graves atteintes aux droits humains de la part des militaires ivoiriens, y compris des arrestations arbitraires et des mises en détention illégales de personnes perçues comme étant des sympathisants de Gbagbo, des actes de cruauté et des traitements inhumains et, dans certains cas, des actes de torture.[158]

Un haut fonctionnaire de l’ONUCI a déclaré à Human Rights Watch que le comportement des FRCI s’était amélioré depuis les attaques de 2012. Cependant, dernièrement, en 2014, les militaires ont de nouveau placé illégalement des personnes en détention et, parfois, commis des actes de torture en réponse aux attaques d’installations militaires.

En février 2014, suite à l’arrestation de 32 personnes pour des attaques ciblant des positions des FRCI près de la frontière libérienne, attaques au cours desquelles quatre soldats avaient trouvé la mort, l’ONUCI a découvert que des militaires des FRCI détenaient des suspects dans des centres de détention non autorisés et torturaient de nombreux détenus.[159] La Division des droits de l’homme de l’ONUCI a constaté qu’au moins 15 de ces détenus étaient gravement blessés.[160] En septembre 2014, suite à l’attaque du camp militaire d’Akouédo à Abidjan, lors de laquelle quatre soldats ont trouvé la mort, quatre des 15 hommes arrêtés ont été placés en détention dans un centre non autorisé pendant plus d’un mois à Abidjan.[161] Au moins un de ces détenus a déclaré à l’ONUCI avoir été torturé.[162] Bien que la constitution ivoirienne stipule que la torture est interdite et punie par la loi, le code pénal ivoirien ne contient aucune disposition qui définisse et criminalise la torture de manière explicite.[163]

De nombreuses sources ont également fait part à Human Rights Watch de leurs préoccupations quant à des détentions exécutées par la Direction de la surveillance du territoire (DST) – service de renseignements national axé sur les questions sécuritaires qui dépend du ministère de l’Intérieur – dans des lieux non autorisés et qui n’ont pas fait l’objet d’un contrôle juridictionnel.[164]

À l’approche de l’élection présidentielle de 2015, la DST a soumis à la détention au secret au moins trois membres de l’opposition arrêtés pour avoir participé à l’organisation de manifestations interdites, sans possibilité de bénéficier des services d’un avocat.[165] Au moins deux des détenus ont fini par être jugés pour trouble à l’ordre public sans que leurs avocats soient informés de la date de leur procès, auquel les deux hommes n’ont donc pas été représentés.[166] Un expert juridique international a déclaré à Human Rights Watch que l’autorité dont dispose la DST en matière de détention d’individus découle d’une ancienne loi qui a été abrogée.[167]

Des infractions économiques persistantes

Bien que, globalement, le comportement des forces de sécurité se soit amélioré, des militaires, des policiers et des gendarmes continuent d’extorquer de l’argent aux résidents de Côte d’Ivoire à des barrages routiers illégaux, entravant la liberté de circulation des Ivoiriens et saisissant leurs biens de manière arbitraire. En juillet 2015, un rapport de Human Rights Watch a révélé que, si le phénomène d’extorsion aux barrages routiers a diminué à Abidjan ainsi que sur les principaux axes routiers empruntés par les hommes d’affaires et les investisseurs étrangers, il reste omniprésent sur les voies secondaires des zones rurales, notamment dans le nord et l’ouest du pays.[168]

Les travaux d’une unité anti-racket spécialisée mise en place en 2011 pour lutter contre les exactions et le racket et composée de policiers, de gendarmes et de militaires ont pâti d’un soutien financier irrégulier de la part du gouvernement ivoirien, problème que Human Rights Watch a signalé pour la première fois en juillet 2013.[169] Au moment de la rédaction des présentes, l’Unité de lutte contre le racket n’avait toujours pas reçu son budget opérationnel pour 2015, et alors qu’elle avait pour la première fois déployé des agents dans trois villes en dehors d’Abidjan fin 2014, ses activités ont de nouveau dû se limiter à Abidjan.[170]

Des analystes de la sécurité et des diplomates se sont dits préoccupés par les infractions économiques commises par plusieurs commandants des FRCI, qui continuent de se livrer aux mêmes actes d’extorsion et de racket que ceux qu’ils pratiquaient à l’époque où ils jouaient un rôle de premier plan au sein des Forces Nouvelles.[171] C’est d’une part grâce à l’argent que ces commandants dégagent et, d’autre part, grâce au fait qu’ils sont disposés à autoriser leurs subalternes à profiter de l’extorsion aux barrages, que les combattants leur restent fidèles et qu’ils peuvent résister aux mesures déployées par le gouvernement pour qu’ils rendent compte de leurs exactions.[172]

Le Groupe d’experts de l’ONU a plus particulièrement identifié deux commandants connus pour leur rôle dans des infractions économiques – Losseni Fofana (dit « Loss »), commandant des FRCI pour l’ouest de la Côte d’Ivoire, et Issiaka Ouattara (dit « Wattao »), lieutenant-colonel des FRCI, qui était responsable du centre-ouest du pays pour les Forces Nouvelles.[173]

Loss, qui dégageait des profits d’activités illicites dont la culture illégale de cacao dans le parc national du Mont Péko,[174] est l’un des commandants inculpés par la CSEI pour atteintes aux droits humains commis pendant la crise postélectorale.[175] Le Groupe d’experts de l’ONU a largement rendu compte du rôle de Wattao dans l’exploitation illégale de mines de diamants et d’or et la contrebande de ces deux minerais dans le centre-ouest du pays.[176]

Les intérêts financiers, politiques et militaires de plusieurs commandants des FRCI anciennement membres des Forces Nouvelles ont encore été renforcés par le pouvoir qu’ils ont exercé sur certains aspects du processus ivoirien de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR). Bien que la plupart des anciens combattants qui participaient au processus de DDR aient reçu une formation professionnelle et une aide financière, plusieurs milliers d’entre eux ont obtenu des emplois publics convoités, notamment en tant que gardiens de prison, douaniers ou employés du service des forêts.[177] La liste des anciens combattants choisis pour ces rôles a été largement contrôlée par d’anciens commandants des Forces Nouvelles désormais membres des FRCI.[178]

Par exemple, un agent de l’ONUCI a déclaré à Human Rights Watch que sur les 2 000 personnes recrutées pour l’agence douanière, environ 60 % ne figuraient pas sur la liste des anciens combattants détenue par l’autorité gouvernementale en charge du processus de DDR.[179] Concernant les 40 % restants, l’agent a expliqué : « Le commandant ex-FN qui citait le nom d’un individu certifiait essentiellement que cette personne était effectivement un ancien combattant, et ni l’ONUCI ni la Commission nationale DDR ne pouvaient pas faire grand-chose pour contester cela. »[180] Des pratiques similaires ont permis aux commandants de contrôler qui obtenait un emploi dans les prisons et aux services des forêts, créant ainsi de futures opportunités d’extorsion et de racket, élargissant leur base de pouvoir et rendant d’autant plus difficiles les efforts déployés pour qu’ils rendent compte de leurs exactions passées.[181]

Des capacités insuffisantes pour répondre à la criminalité

Bien que les violences à connotation politique soient désormais relativement rares en Côte d’Ivoire, les crimes violents, tels que le banditisme sur les routes, continuent de poser un problème considérable qui affecte la vie et les moyens de subsistance de nombreux Ivoiriens. Si la criminalité a baissé à Abidjan, le banditisme reste fréquent sur les routes de l’ouest et, surtout, du nord du pays.[182]

Plusieurs victimes de criminalité et membres de la société civile ont déclaré que les forces de sécurité ne parviennent souvent pas à protéger les résidents de la criminalité et mènent trop rarement des enquêtes une fois l’événement survenu.[183] Human Rights Watch et d’autres organisations ont rendu compte de dizaines d’incidents de banditisme dans le nord et l’ouest du pays, dont très peu ont fait l’objet d’une enquête adéquate.

Une victime d’un vol à main armée près de Bouaké, qui s’est précipitée vers un barrage routier afin d’obtenir de l’aide pour un ami blessé par balles, a déclaré à Human Rights Watch : « Il y avait environ 10 gendarmes, dont deux avec des Kalachnikov. Ils m’ont dit « Il n’y a pas de véhicule disponible pour les poursuivre. » Donc ils sont restés au point de contrôle. Un gendarme était choqué et en colère de ne pas pouvoir réagir... Je n’ai vu aucun véhicule. Il y avait des militaires sur place, mais aucun d’eux n’est venu apporter de l’aide. » Son ami a succombé à ses blessures.

Les gendarmes et les policiers manquent souvent d’équipement et, dans une certaine mesure, de capacités opérationnelles pour travailler efficacement, ce qui explique en partie pourquoi les FRCI restent présentes dans les zones d’insécurité.[184] Un agent du gouvernement local à Bouaké a expliqué à Human Rights Watch : « Les policiers et les gendarmes n’ont pas assez d’équipement pour faire face aux bandits. Les FRCI ont les armes, et c’est pour cela qu’on les met ensemble dans les patrouilles. »[185] Un officier des FRCI à Duékoué a qualifié les militaires déployés dans la zone de « branche armée de la gendarmerie », et commenté : « À Daloa, où le risque est moindre, on ne voit pas de soldats dans la rue. »[186]

Pour mieux protéger les civils de la criminalité et veiller à redonner aux policiers et aux gendarmes leurs fonctions d’application de la loi, le gouvernement ivoirien devrait s’assurer que ces forces reçoivent la formation, le soutien et les ressources nécessaires pour remplir leur mandat.[187]

Impunité au sein des forces de sécurité

Depuis plus de 15 ans, à quelques exceptions près, les crimes allégués commis par des membres des forces de sécurité, allant de crimes de guerre à des actes d’extorsion aux barrages routiers, n’ont fait l’objet d’aucune enquête et leurs auteurs n’ont pas été punis. Un agent de l’ONUCI a déclaré à Human Rights Watch : « Quand les FRCI commettent des crimes, ils continuent d’agir dans l’impunité. Il faut en faire bien plus pour traduire ces gens en justice. »[188]

Un juriste ivoirien a déclaré que même lorsque des soldats commettent des crimes graves en dehors de l’exercice de leurs fonctions, tels que des violences sexuelles, ils ne sont que rarement poursuivis devant les tribunaux civils. « Des militaires sont souvent impliqués dans des viols, mais les familles concernées ont trop peur de les dénoncer », a-t-il dit. « L’année dernière, il y a eu beaucoup de ces cas, mais comme il s’agissait de militaires, cela n’est pas allé plus loin. »[189] Un agent international a affirmé que si au moins deux soldats des FRCI accusés d’attaques sexuelles dans la région où il travaille avaient été reconnus coupables depuis 2014, les juges civils et la police étaient souvent intimidés par les FRCI et réticents à l’idée d’enquêter sur les soldats et de les poursuivre en justice.[190]

Des agents de l’ONUCI ont également signalé qu’il était impératif de réformer en profondeur le système de justice militaire, dont relèvent l’armée, la police et la gendarmerie.[191] Plus particulièrement, ils ont noté qu’il fallait se pencher sur le manque d’indépendance des tribunaux par rapport aux ministères de l’Intérieur et de la Défense, qui doivent donner leur autorisation avant que des poursuites ou un procès ne puissent commencer.[192] En outre, les compétences des tribunaux militaires sont actuellement trop larges.[193] En vertu des Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, la compétence des tribunaux militaires devrait se limiter au personnel militaire et à des questions de nature purement militaire et ne pas s’étendre à la police.[194] Le système de justice militaire dispose par ailleurs de ressources très insuffisantes, le pays ne comptant qu’un seul tribunal militaire, à Abidjan.[195]

Cependant, outre la nécessité de réformer les tribunaux militaires, reste encore à savoir si le gouvernement du Président Ouattara a la volonté politique requise pour mettre en cause les commandants des FRCI qui auraient été impliqués dans nombre des exactions les plus graves perpétrées par les forces de sécurité, des crimes commis par les forces pro-Ouattara pendant la crise postélectorale de 2010-2011 jusqu’aux infractions économiques actuelles. De nombreux diplomates ont affirmé à Human Rights Watch qu’au lendemain de la crise postélectorale, le Président Ouattara ne pouvait et ne voulait pas remettre en question l’autorité des anciens commandants de la Forces Nouvelles sans déstabiliser la sécurité du pays.[196] Cependant, cinq années après la crise, le gouvernement n’a toujours pas enquêté et engagé de poursuites à l’égard de la multitude d’exactions permanentes qu’ils auraient commises, ce qui non seulement a permis à plusieurs de ces commandants eux de maintenir et d’élargir leur pouvoir, mais a aussi nui à l’engagement souvent réitéré de Ouattara concernant l’élimination de la culture d’impunité en Côte d’Ivoire.[197]

IV. Recherche de la vérité et réparations

Si l’on veut consolider cette paix qui nous appartient, la vérité, la justice et les réparations sont essentielles.
– Drissa Soumahoro, président de la Confédération des organisations des victimes de la crise ivoirienne (COVICI)[198]

En juillet 2011, au lendemain de la crise postélectorale, la Côte d’Ivoire a instauré une Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR) avec pour mission « d’œuvrer à la réconciliation et au renforcement de la cohésion sociale entre toutes les communautés vivant en Côte d’Ivoire » en recherchant « la vérité sur les violations des droits humains qui y ont été commises ».[199] Dirigée par Charles Konan Banny, ancien Premier ministre et politicien de longue date, la CDVR a été composée de 10 commissaires représentant les différentes circonscriptions ivoiriennes ainsi que la diaspora.[200]

La création de la CDVR a été une démarche importante, qui a permis d’établir un dialogue et d’émettre des recommandations pour empêcher la perpétration de nouvelles atteintes aux droits humains. En donnant aux victimes la possibilité de raconter leur histoire, la Commission a aussi été propice à une guérison. Un Ivoirien qui habitait à Yopougon pendant la crise postélectorale de 2010-2011 a déclaré à Human Rights Watch : « Quand on nous écoute, ça fait du bien. Nous devons enfoncer les portes qui nous séparent. » [201] Un autre Ivoirien a précisé : « Quand on vous écoute, ça calme un peu la douleur. »[202] La CDVR a également été chargée d’émettre des recommandations sur l’octroi de réparations aux victimes.[203]

Forte d’une équipe de près de 350 enquêteurs, la CDVR a recueilli les témoignages de plus de 72 000 Ivoiriens, dont plus de 28 000 femmes.[204] Son rapport final, que Banny a présenté au Président Ouattara le 15 décembre 2014,[205] comprend une analyse des atteintes aux droits humains commises en Côte d’Ivoire de 1990 à 2012, ainsi que des recommandations pour lutter contre les causes sous-jacentes de la décennie de violence politique ivoirienne, indemniser les victimes et encourager une réconciliation nationale.[206]

En septembre 2015, un mois avant l’élection présidentielle d’octobre, un homme ivoirien originaire d’un village proche de Gagnoa touche une photo de sa mère, tuée pendant les violences postélectorales de 2010-2011.  © 2015 Issouf Sanogo/Getty Images

Le rapport de la CDVR n’a cependant jamais été rendu public, et la présidence n’a jamais donné de raison pour ce retard. La seule mesure concrète qu’ait prise le Président Ouattara après avoir reçu le rapport de la CDVR a été de s’engager à mettre à disposition des victimes 10 milliards de FCFA (environ 16,2 millions de US$) au titre d’indemnisation.[207]

En mars 2015, le gouvernement ivoirien a créé une Commission nationale pour la réconciliation et l’indemnisation des victimes des crises survenues en Côte d’Ivoire (CONARIV) qui succède à la CDVR et est chargée de superviser un programme de réparations.[208] Une autre agence gouvernementale, le Programme national de cohésion sociale (PNCS), a pour mission la mise en œuvre du programme de réparations.[209]

Le fait d’être exclusivement concentrée sur l’indemnisation des victimes, en excluant toute discussion utile sur les conclusions du rapport de la CDVR, nuit non seulement au mandat de celle-ci, ainsi qu’aux ressources qui lui ont été dédiées, mais aussi à l’objectif plus général consistant à examiner et résoudre les causes profondes de la violence politique qui a frappé la Côte d’Ivoire par le passé.

Le bilan décevant de la CDVR

Des victimes ont déclaré à Human Rights Watch être déçues de ce que la CDVR avait accompli. Le responsable d’une association de victimes pro-Ouattara a ainsi commenté : « Si vous parlez à des victimes de notre bord, elles vous diront que la CDVR a échoué – elle n’a pas eu d’impact concret sur le terrain, que ce soit en termes de réconciliation, de vérité ou de réparations. »[210] Un partisan de Gbagbo a affirmé à Human Rights Watch : « La CDVR a échoué lamentablement – elle n’a produit aucun résultat. »[211]

Lorsque Banny a été nommé à la tête de la CDVR, des diplomates étrangers et des membres de la société civile ivoirienne ont déclaré qu’il y avait eu peu de consultation concernant la création de la CDVR et la personne qui devrait la diriger.[212] Un universitaire ivoirien a déclaré à Human Rights Watch que la nomination d’un homme politique à la présidence de la CDVR avait affecté la perception de l’institution aux yeux des victimes[213] : « Tout le monde soupçonnait Banny de se servir de la CDVR comme d’un instrument politique, et donc cela a vraiment affecté la légitimité de l’institution. »[214] Le responsable d’un groupe des victimes pro-Ouattara a commenté : « Nous n’avons guère eu confiance en lui. Ce n’est pas parce qu’on a été Premier ministre que l’on peut parvenir à la réconciliation. »[215]

En plus de recueillir les déclarations privées des victimes, la CDVR a organisé des audiences publiques lors desquelles les victimes ont confronté les auteurs des crimes les concernant, et ce, devant les commissaires de la CDVR. Ces événements avaient pour objectif de permettre aux victimes d’« évacuer leurs angoisses et leurs frustrations » et d’encourager une réconciliation plus générale.[216] Du 8 au 30 septembre 2014, les audiences publiques de la CDVR ont porté sur 81 « cas emblématiques » couvrant les atteintes aux droits humains commises entre 1999 et 2012.[217]

La CDVR envisageait de diffuser des extraits de ces audiences publiques dans les médias ivoiriens, notamment à la télévision.[218] Cependant, il s’avère que la Radiodiffusion-télévision ivoirienne, l’agence de télévision d’État, n’a diffusé aucune des audiences.[219] Le fait que ces extraits n’aient pas été télévisés a accentué la nature déjà secrète des audiences publiques, qui avaient lieu dans un endroit inaccessible et dans une salle ne comptant que 70 places, ce qui est bien inférieur au nombre de victimes qui aurait éventuellement souhaité y assister.[220]

Le Conseil de sécurité de l’ONU a déclaré qu’il « engage » le gouvernement ivoirien à publier le rapport de la CDVR.[221] Un agent de l’ONUCI a précisé que la publication du rapport créerait des possibilités de dialogue au sein de la Côte d’Ivoire susceptibles d’encourager une réconciliation nationale et d’empêcher de futures exactions.[222] La décision de ne pas publier le rapport a conduit certains Ivoiriens à présumer que le gouvernement supprimait les informations défavorables au régime de Ouattara. Un dirigeant de l’opposition dans l’ouest de la Côte d’Ivoire a déclaré à Human Rights Watch : « Le rapport n’a pas été publié – vous croyez vraiment que cela signifie qu’il est favorable au régime au pouvoir ? »[223]

Human Rights Watch soutient la publication du rapport et recommande au gouvernement et à l’Assemblée nationale de réagir à son contenu et ses recommandations. Une audience et un débat sur le rapport devant l’Assemblée nationale donneraient aux partis politiques et aux autres personnes appelées à témoigner la possibilité de discuter des recommandations du rapport, y compris, surtout, de celles qui concernent la justice, l’impunité et les causes profondes de la violence passée.

La promesse de réparations

En plus de mener des enquêtes et de poursuivre en justice les responsables d’atteintes aux droits humains, il incombe aux États, en vertu du droit international des droits de l’homme, d’offrir des recours aux victimes, y compris une réparation adéquate, effective et rapide du préjudice subi.[224] Le Président Ouattara a déclaré qu’offrir des recours aux victimes était « une exigence morale à laquelle la Nation ne saurait se soustraire ».[225]

Près de cinq ans après la crise postélectorale de 2010-2011, plusieurs victimes ont indiqué à Human Rights Watch qu’elles étaient frustrées de n’avoir encore reçu aucune assistance financière ou en nature. Une victime, qui vivait dans le quartier abidjanais d’Abobo pendant la violence postélectorale, a commenté : « Après la crise, personne ne prend soin des victimes. Nos vies sont très difficiles. Nos maisons ont été pillées, et nous manquons même de nourriture et de soins médicaux de qualité. Nous entendons dire que notre argent va arriver, mais pour l’instant, nous ne voyons rien venir. »[226]

Plusieurs femmes victimes de violences sexuelles pendant la crise postélectorale ont déclaré à Human Rights Watch ne pas avoir reçu la moindre assistance médicale pour traiter les blessures qu’elles ont subies du fait des exactions. Une femme prise pour cible par des partisans de Gbagbo parce qu’elle était organisatrice du parti politique du Président Ouattara, le Rassemblement des Républicains (RDR), pendant l’élection de 2010 a affirmé : « On nous a dit qu’on s’occuperait de nous, mais pour l’instant, il n’y a rien. Je veux que quelqu’un me vienne à l’aide. Je veux que l’on s’occupe de nous. »[227]

La CONARIV compile actuellement une première liste des victimes qui pourraient prétendre à des réparations en s’appuyant sur son propre processus de recensement et sur les dossiers fournis par la CDVR, les associations de victimes, des groupes de défense des droits humains, des agences gouvernementales, dont le PNCS, et des organisations internationales.[228] Une fois agrégées, les listes que la CONARIV a dressées ou qui lui ont été fournies comptent près de 200 000 victimes potentielles, même si des doublons sont probables entre les différentes listes.[229] La CONARIV est également en train d’élaborer un avant-projet de loi précisant qui pourra prétendre à des réparations et sous quelle forme.[230]

Tandis que la CONARIV finalise un cadre de réparations, la présidence a demandé au PNCS en juillet 2015 de verser une première série d’indemnisations, y compris une somme forfaitaire et une assistance médicale, à 4 500 victimes identifiées par le rapport de la Commission nationale d’enquête (CNE) ivoirienne.[231] Le 4 août 2015, le Président Ouattara a présidé une cérémonie officielle pour marquer la première série de paiements et d’assistance médicale aux victimes.[232]

Le professeur Mariatou Koné, directrice générale du PNCS, a déclaré à Human Rights Watch que la première série de réparations avait pour but de montrer aux victimes que le gouvernement compte sérieusement les aider, et que cette démarche en avait encouragé d’autres personnes à se faire enregistrer auprès de la CONARIV. Elle a affirmé que « pour les victimes, le doute commençait à s’installer quant à la mise en œuvre effective de cette opération » et que la cérémonie du 4 août 2015 avait été « un pas important » qui avait entraîné « un engouement noté chez d’autres victimes à se faire enregistrer auprès de la CONARIV ».[233] Des experts internationaux sur les questions de réparations et au moins un groupe de victimes ont déclaré que la décision de commencer le processus de réparations était également un geste politique de la part du Président Ouattara à l’approche de l’élection présidentielle de 2015.[234]

Cette première série de réparations a suscité des attentes accrues parmi les victimes quant à la date à laquelle elles recevraient une indemnisation et à la somme qui leur reviendrait. Le responsable d’un groupe de victimes bien connu a ainsi déclaré à Human Rights Watch que des victimes l’avaient appelé « de partout » une fois qu’elles avaient entendu parler des paiements, et qu’il leur avait dit : « On va s’occuper de vous, chaque victime qui a perdu quelque chose obtiendra réparation. »[235]

En octroyant une somme forfaitaire aux victimes, le gouvernement a également établi un point de référence que les réparations futures devront égaler.[236] Étant donné que la première série de réparations coûtera entre 6 et 8 milliards de FCFA (10-13 millions de US$),[237] il semble probable que la totalité du programme de réparations coûtera beaucoup plus que les 10 milliards de FCFA (16,2 millions de US$) que le Président Ouattara avait prévu de mettre initialement à disposition.

Des groupes de victimes ont déclaré à Human Rights Watch que la CONARIV, et le gouvernement ivoirien d’une manière générale, devraient faire preuve d’une plus grande transparence dans leurs relations avec les victimes.[238] Des experts internationaux des questions relatives aux réparations à accorder aux victimes ont ainsi affirmé que dans la quasi-totalité des cas, ce type de programmes ne remplissait pas les attentes des victimes et que les gouvernements devaient donc activement expliquer qui recevra quoi et pourquoi.[239] La CONARIV devrait organiser des réunions mensuelles avec les groupes de victimes, aussi bien à Abidjan que dans les principaux chefs-lieux de régions, afin de mieux faire connaître ses activités et de discuter de la manière dont les groupes de victimes peuvent participer aux travaux de la CONARIV et les appuyer.

Des agents de l’ONUCI et des experts internationaux des questions relatives aux réparations des victimes ont également affirmé à Human Rights Watch que le gouvernement devrait étendre son programme de réparations à des mesures autres que financières, qui bénéficieraient à une plus large catégorie de victimes, notamment des excuses publiques, des monuments commémoratifs et des projets de développement communautaire.[240] Des agents de la CONARIV et le professeur Koné, directrice générale du PNCS, ont fait savoir que le gouvernement envisageait d’inclure une gamme plus large de mesures de réparation dans l’avant-projet de loi sur l’identification des victimes et réparations.[241]

Pour clarifier ses intentions en matière de réparations, le gouvernement ivoirien devrait accélérer les consultations sur l’avant-projet de loi définissant qui peut prétendre à des réparations et sous quelle forme. Pour faciliter la rédaction de la loi, et vu les différends permanents entre la CONARIV et le PNCS concernant leurs rôles respectifs dans le processus de réparation, le Président Ouattara devrait ordonner aux responsables des deux institutions de négocier et de lui présenter les termes de référence régissant leurs relations, et il devrait intervenir en personne pour régler par la médiation les points de désaccord.

Les bailleurs de fonds internationaux devraient appuyer le processus de réparation en continuant de fournir une assistance technique à la CONARIV et au PNCS et en augmentant les fonds destinés aux groupes de victimes afin que l’information sur le processus puisse leur être expliquée.[242]

V. Dépossession de terres dans l’ouest de la Côte d’Ivoire

Personne ne peut se satisfaire de la situation actuelle, ni les propriétaires coutumiers, ni les occupants des parcelles de terres en milieu rural. Il nous faut donc une autre approche. Celle-ci devrait prendre en compte les intérêts de toutes les parties en présence.
– Théodore Dagrou, magistrat à la Cour suprême et expert foncier[243]

Depuis de nombreuses années, de profondes tensions intercommunales liées au phénomène de la dépossession de terres entraînent périodiquement des épisodes de violence sanglante dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, et elles ont été l’un des principaux facteurs de nombre des pires exactions commises pendant la crise postélectorale de 2010-2011.

Les mouvements de population et les déplacements provoqués par la crise postélectorale de 2010-2011 ont déclenché une nouvelle vague de dépossession de terres. Bien que, depuis, de nombreux dossiers aient été résolus, des chefs communautaires ont affirmé à Human Rights Watch que les litiges fonciers restaient une cause majeure des tensions intercommunales et de la violence au niveau local, l’un d’entre eux déclarant : « Notre plus gros problème, c’est cette question foncière. C’est le foncier qui est à l’origine des conflits dans cette région. »[244]

Pendant le premier mandat du Président Ouattara, la politique foncière gouvernementale était axée sur la mise en œuvre de la loi de 1998 relative au domaine foncier rural, dont l’objectif était de fournir aux propriétaires fonciers une sécurité accrue en exigeant qu’ils convertissent leurs revendications coutumières en certificats fonciers puis en titres légaux. La procédure d’obtention d’un certificat foncier est cependant trop complexe et trop coûteuse, et très peu de propriétaires ont essayé de la suivre.

La lourde charge consistant à résoudre les litiges fonciers incombe actuellement aux autorités coutumières et aux agents du gouvernement local, lesquels ont joué un rôle clé dans la médiation des dossiers de dépossession liés à la crise postélectorale. Des représentants de communautés locales ont cependant déclaré à Human Rights Watch que les règlements obtenus devant les autorités coutumières sont de plus en plus difficiles à faire appliquer, qu’ils sont souvent défavorables aux femmes et, dans de nombreux cas, qu’ils permettent à ceux qui occupent les terres de manière illégitime d’y rester, et ainsi d’enfreindre les droits à la propriété des titulaires légaux du bien. Les individus impliqués dans des ventes illégales ou frauduleuses sont rarement poursuivis en justice.

Le droit international exige de la Côte d’Ivoire qu’elle garantisse le droit à la propriété.[245] Il prévoit également que chaque affaire impliquant les « droits et obligations » d’une personne soit entendue équitablement, ce qui devrait inclure les affaires relatives aux droits fonciers.[246] S’il est possible d’utiliser des mécanismes traditionnels prévus par la loi pour résoudre ce type de litiges, ces mécanismes doivent être « compétents, indépendants et impartiaux » – y compris en donnant aux femmes le droit à un traitement équitable.[247]

Alors que le Président Ouattara entame son second mandat, la politique foncière de son gouvernement est confrontée à deux défis connexes : premièrement, le manque de mise en œuvre de la loi de 1998 relative au domaine foncier rural et le recours systématique aux mécanismes coutumiers pour résoudre les litiges ; et deuxièmement, la reconnaissance que les autorités coutumières sont susceptibles d’avoir de plus en plus de mal à trouver des solutions durables et respectueuses des droits humains pour résoudre les litiges fonciers.

Le problème persistant de la dépossession de terres

Dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, le foncier, la politique et la violence sont étroitement liés depuis au moins deux décennies. Avec la récession économique des années 1980 et 1990 et la raréfaction des terres productives, les politiciens ivoiriens se sont mis à exploiter les tensions apparues entre groupes ethniques natifs de l’ouest du pays – les autochtones – et les populations venues de pays voisins – les allogènes – et d’autres régions de la Côte d’Ivoire – les allochtones – pour travailler dans les plantations de cacao et de café de la région.[248] Lorsque des conflits armés ont éclaté en 2002-2003 puis de nouveau en 2010-2011, de profondes tensions intercommunautaires liées au phénomène de dépossession de terres ont été l’une des raisons pour lesquelles l’ouest de la Côte d’Ivoire a été le théâtre de nombre des atrocités les plus graves.[249]

Les mouvements de population provoqués par la crise postélectorale de 2010-2011 ont ouvert la voie à une nouvelle vague de dépossession. Alors que les forces pro-Ouattara avançaient sur Abidjan, des membres du groupe ethnique Guéré originaires en grande partie de la région ont fui massivement par crainte de représailles, pour bon nombre d’entre eux vers le Liberia.[250] À leur retour, des centaines de propriétaires fonciers Guérés se sont rendus compte que quelqu’un occupait leurs terres, qu’ils n’avaient pourtant jamais vendues ni cédées.

Bien que de nombreux Guérés aient présumé que des non-autochtones – des immigrants ouest-africains et des Ivoiriens issus de groupes ethniques originaires d’autres régions ivoiriennes – avaient saisi leurs terres illégalement, un rapport de Human Rights Watch d’octobre 2013 a révélé que, dans la majorité des cas, les actes de dépossession étaient le résultat de ventes illégales effectuées par d’autres Guérés, même si certains acheteurs non autochtones savaient qu’ils n’achetaient pas les terres à leur propriétaire légitime.[251]

Les ventes et l’occupation illégales de terres restent une cause majeure des incidents de dépossession en 2015. Un chef communautaire burkinabé d’un village situé près de Bloléquin a expliqué à Human Rights Watch : « Nous voyons encore beaucoup de cas où un Guéré vend un terrain qui ne lui appartient pas entièrement, puis son frère arrive qui dit à l’agriculteur : ‘Cette terre ne vous appartient pas.’ Il faut aussi dire que, de notre côté, il y a des gens qui se mettent tout simplement à cultiver un champ sans se soucier de savoir à qui il appartient. »[252] Un chef communautaire Guéré a commenté : « Nos jeunes vendent les terres qui appartiennent aux anciens, lesquels ne peuvent pas se rendre dans les champs pour vérifier leurs propriétés, et ils le font sans demander au chef de village d’autoriser la vente. […] On est en train de vendre la forêt de nos anciens. »[253]

Les ventes et l’occupation illégales de terres sont contraires aux droits à la propriété des véritables propriétaires.[254] La vente ou la saisie illégale de terres a des conséquences graves sur les moyens de subsistance des populations ; le fait que le gouvernement ivoirien ne veille pas à une restitution rapide de leurs terres constitue une atteinte potentielle aux droits à une nourriture et à des moyens de subsistance suffisants.[255]

Difficultés de mise en œuvre de la loi de 1998

La politique foncière gouvernementale menée pendant le premier mandat du Président Ouattara s’est concentrée sur la mise en œuvre de la loi de 1998 relative au domaine foncier rural, qui accordait dix ans aux propriétaires coutumiers pour convertir leurs droits coutumiers en un certificat foncier puis enregistrer leur titre de propriété au cadastre.[256] D’après le gouvernement, la conversion des revendications coutumières en certificats fonciers et en titres légaux permettra de savoir avec une plus grande certitude qui est le propriétaire légitime d’une terre et ainsi de réduire la prévalence de la dépossession de terres et des litiges fonciers.[257]

En août 2013, l’Assemblée nationale a adopté des réformes modestes de la loi de 1998 ainsi que de la loi sur la nationalité, qui accordait aux propriétaires terriens dix années supplémentaires pour convertir leurs droits coutumiers en titres légaux, illustrant le fait que très peu de propriétaires avaient enregistré leurs terres depuis l’adoption de la loi de 1998. Ces réformes ont également permis aux résidents nés à l’étranger et à leurs descendants, sous réserve de certains critères, d’accéder à la citoyenneté ivoirienne, condition préalable essentielle pour pouvoir enregistrer des terres.[258]

Cependant, des chefs communautaires dans l’ouest de la Côte d’Ivoire ont déclaré à Human Rights Watch que depuis 2013, très peu de propriétaires terriens étaient passés par la loi de 1998 pour obtenir des certificats fonciers. Le chef d’un village situé près de Bloléquin, dont l’opinion a également été exprimée par plusieurs chefs de villages, a ainsi expliqué à Human Rights Watch : « Personne ne l’a encore fait au village. C’est trop compliqué, trop cher. Quelques personnes ont entamé la démarche, mais personne n’est allé jusqu’au bout. »[259]

Le processus d’obtention d’un certificat foncier et d’un titre légal n’est pas accessible aux Ivoiriens ordinaires.[260] Le processus d’obtention d’un certificat foncier est composé de 19 étapes, prend entre 6 et 18 mois et coûte en moyenne 764 500 FCFA (environ 1 240 US$).[261] Le formulaire à remplir pour démarrer la procédure ne peut être obtenu qu’auprès du bureau du ministère de l’Agriculture à Abidjan.[262]

En outre, le gouvernement n’a pas pris de mesures suffisantes pour appuyer les comités villageois qui jouent un rôle clé dans le processus de certification foncière. Des décrets postérieurs à la loi de 1998 relative au domaine foncier rural instaurent des comités au niveau des villages (Comités villageois de gestion foncière rurale, CVGFR) et au niveau des sous-préfectures (Comités de gestion foncière rurale, CGFR), dont le rôle consiste à valider les revendications foncières du propriétaire et, si un litige foncier survient au cours de processus de certification, à tenter de le résoudre.[263] Cependant, une fois mis en place, les comités villageois ne bénéficient pas d’une formation ou de ressources suffisantes. Une étude réalisée en 2014 à la demande du ministère de l’Agriculture a révélé que seuls 153 des 550 comités examinés étaient encore actifs.[264]

La réticence des Ivoiriens de l’Ouest à demander des certificats fonciers se retrouve dans toute la Côte d’Ivoire. Au 31 mai 2015, seuls 978 certificats fonciers avaient été délivrés à l’échelle nationale (dont seulement 119 à des femmes),[265] sachant qu’environ 500 000 certificats sont nécessaires pour couvrir toute la Côte d’Ivoire.[266] Constant Delbé Zirignon, directeur du Foncier rural au ministère de l’Agriculture, a reconnu qu’il y avait encore « un long chemin à parcourir » avant que la loi de 1998 ne soit mise en œuvre, notant toutefois des progrès depuis novembre 2013, lorsque à peine un peu plus de 300 certificats avaient été délivrés.[267]

Le gouvernement a en outre peu progressé dans ses travaux de démarcation des villages destinés à empêcher les ventes frauduleuses qui tirent parti de l’incertitude des délimitations entre villages. Au 31 mai 2015, le gouvernement avait démarqué 177 des 8 571 villages que compte la Côte d’Ivoire.[268] La pénurie de géomètres, dont l’organe professionnel, l’Ordre des géomètres-experts de Côte d’Ivoire (OGE-CI), a le monopole des études géométriques de démarcation des villages et de délimitation des propriétés individuelles, reste un obstacle à l’exercice de démarcation.[269]

Rôle des chefs de villages et des agents du gouvernement local

En l’absence d’un système efficace d’enregistrement des terres, la lourde charge consistant à résoudre les litiges relatifs à la dépossession des terres coutumières incombe aux autorités coutumières et aux agents de l’administration locale.

La plupart des affaires présumées de dépossession de terres sont d’abord soumises au chef de village, qui tient à la fois le rôle de chef coutumier (généralement issu de la communauté autochtone) et d’autorité administrative reconnue en vertu du droit ivoirien.[270]  Pour rendre leur décision sur les conflits fonciers, les chefs de villages œuvrent en consultation avec les notables et le chef de terre du village – un notable qui possède souvent un savoir encyclopédique sur ce qui touche aux parcelles familiales. Des chefs communautaires aussi bien autochtones que non autochtones ont déclaré à Human Rights Watch que les chefs de villages avaient joué un rôle essentiel dans la résolution de litiges relatifs à des incidents de dépossession associés à la crise postélectorale de 2010-2011.[271] Un chef de village de l’ouest du pays a ainsi affirmé qu’en 2012, on lui soumettait six litiges fonciers par jour, alors qu’il intervient désormais trois à quatre fois par semaine.[272]

Des chefs traditionnels ivoiriens participent à un atelier le 22 mai 2014 à Bangolo, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, pour discuter du rôle des chefs traditionnels et de communautés dans le dialogue intercommunautaire et dans la gestion des terres.  © 2014 Issouf Sanogo/Getty Images

Les conflits fonciers insolubles au niveau du village sont généralement soumis à la sous-préfecture, l’autorité administrative relevant du ministère de l’Intérieur qui supervise les chefs d’un certain nombre de villages et préside également les comités fonciers sous-préfectoraux chargés de contribuer à la mise en œuvre de la loi de 1998.[273] Un spécialiste ivoirien des questions foncières qui travaille pour une organisation humanitaire internationale a salué le rôle des sous-préfets dans la médiation des affaires de dépossession de terres liées à la crise postélectorale de 2010-2011.[274] Il a ainsi déclaré qu’il y avait eu une « véritable amélioration » dans la manière dont les sous-préfets assurent la médiation des dossiers de dépossession et que, les chefs de villages étant en mesure de résoudre un plus grand nombre de conflits fonciers, la charge de travail des sous-préfets avait diminué, ce qui leur permettait de consacrer plus de temps à chaque dossier.[275]

Aucune conséquence en cas de transactions illégales

Plusieurs chefs communautaires autochtones et non autochtones se sont cependant déclarés frustrés par les techniques de médiation des chefs coutumiers. Un chef burkinabé d’un village situé près de Bloléquin a ainsi déploré le fait que la médiation ne permettait pas d’établir clairement à qui appartient un terrain : « Nous demandons au chef de village de décider à qui appartient la terre, mais il ne le fait pas. Il se contente de dire : ‘Débrouillez-vous entre vous’, au lieu de dire ‘Ceci est à vous, et cela est à vous’. »[276] Il a également dit que certains chefs de villages acceptaient des pots-de-vin pour influencer leurs décisions.

Un chef communautaire Guéré de Duékoué s’est plaint du fait que les chefs de villages essayant de parvenir un compromis pour que chaque partie dégage un avantage de la décision, le résultat de la médiation permet souvent aux personnes qui occupent la terre de manière illégitime d’y rester, le véritable propriétaire se sentant contraint d’accepter la solution préconisée par le chef.[277] Il a ainsi déclaré : « Je ne suis pas content de la manière dont ces dossiers sont résolus, car les autorités accordent beaucoup trop d’importance à la personne qui exploite la terre. Nos parents trouvent leur terre occupée, et ils ont alors du mal à avoir un quelconque recours. C’est perdu d’avance. »[278]

Un sous-préfet a expliqué à Human Rights Watch que toute personne mécontente du résultat de la médiation menée par les autorités coutumières ou les agents locaux pouvait toujours porter l’affaire devant la justice, qui n’est pas liée par la décision du chef de village ou du sous-préfet.[279] Cependant, des chefs communautaires ont déclaré que la procédure judiciaire était trop longue et trop chère, et que, par conséquent, les gens ne recouraient généralement pas aux tribunaux.[280] En outre, le manque d’accès à des conseils et à une représentation juridiques empêche les Ivoiriens de porter ces affaires devant les tribunaux. Le système judiciaire a du mal à faire appliquer les décisions quand les deux parties n’en acceptent pas l’issue.[281]

Des représentants de communautés locales ont aussi déclaré à Human Rights Watch que les personnes impliquées dans des ventes foncières illégales étaient très peu nombreuses à faire l’objet d’enquêtes et de poursuites judiciaires, un facteur clé qui contribue à la perpétuation des exactions.[282] Un chef de village a ainsi affirmé que, bien que la gendarmerie arrête certaines personnes pour ventes illégales de terres, elles étaient généralement libérées au bout de deux ou trois jours : « Un accord est normalement trouvé avec la famille impliquée. Ici, il n’y a pas de cas qui soient renvoyés devant la justice. »[283] Un autre chef de village a déclaré : « La personne qui a illégalement vendu la terre devrait être poursuivie en justice. Il n’y pas de sanctions contre l’acheteur ou le vendeur. Si l’administration ne punit pas les ventes illégales, que peut faire le village ? »[284]

Absence de pouvoirs d’application de la loi

Des représentants de communautés locales ont également expliqué que les autorités coutumières avaient de plus en plus de mal à s’assurer que les vendeurs ou occupants illégaux se présentent aux audiences ou acceptent l’issue de la médiation. Un chef de village a ainsi déclaré à Human Rights Watch : « Autrefois, les nouveaux arrivants venaient me voir, le chef du village, quand ils venaient chercher des parcelles de terrain dans le village, mais maintenant, il y en a beaucoup qui ne le font même pas. Ils ne respectent pas mon autorité. »[285] Un spécialiste ivoirien des questions foncières et au moins un chef de village ont également indiqué qu’il était de plus en plus fréquent que les jeunes Guérés remettent en cause le mode de gestion de la terre de leurs aînés et la manière dont le chef de village résout les conflits.[286]

Théodore Dagrou, magistrat à la Cour suprême et expert des questions foncières, a expliqué à Human Rights Watch que les déplacements de population dus à la crise postélectorale et l’arrivée constante de migrants dans la région nuisaient à l’autorité des chefs coutumiers.[287] « Le système foncier coutumier repose, par définition, sur la coutume qui fonde les traditions locales. Aussi, la gestion apaisée des terres rurales dépend-elle d’une connaissance de l’histoire de chaque localité », a-t-il déclaré, avant d’ajouter : « Avec les déplacements des populations du fait de la crise et l’arrivée massive de nouvelles personnes, qui ne maîtrisent pas toujours cette donne ou qui, volontairement, pour certaines raisons, entendent s’en passer, la gestion du foncier n’est devenue que plus problématique. » [288]

Des experts ivoiriens et internationaux du foncier ont également souligné les facteurs démographiques qui affectent « l’équilibre du pouvoir » dans les villages de l’ouest de la Côte d’Ivoire,[289] et qui font qu’il est de plus en plus difficile d’obliger les vendeurs ou les occupants illégaux issus de groupes d’immigrants à assister aux audiences ou à respecter les conclusions de la médiation.[290] Plusieurs chefs Guérés ont parlé à Human Rights Watch des changements démographiques qu’ont connus leurs villages pendant les différentes crises. Le chef d’un village situé près de Bloléquin a déclaré : « En 2011, le village comptait 6 000 habitants, avec très peu de Burkinabé. Maintenant, nous sommes 7 000 ou 8 000, dont seulement 3 000 Guérés. »[291]

Exclusion des femmes

Des experts internationaux du foncier se sont dits préoccupés par le fait que les règlements conclus devant les autorités coutumières sont souvent défavorables aux femmes, qui rencontrent des obstacles particuliers pour obtenir un accès à la terre.[292] Bien que des groupes humanitaires et de la société civile aient essayé de convaincre les chefs de villages d’inclure les femmes dans le processus de résolution des litiges, un spécialiste du foncier qui travaille avec une organisation humanitaire dans l’ouest du pays a reconnu que dans la majorité des villages, le chef de village et les notables chargés de la résolution des conflits fonciers étaient tous des hommes.[293]

Les obstacles que rencontrent les femmes dans le cadre de la participation à la résolution des litiges fonciers au niveau du village sont illustrés par leur manque de représentation au sein des comités fonciers instaurés pour appuyer la mise en œuvre de la loi de 1998. Sur les 116 comités villageois de gestion foncière actifs examinés dans le cadre d’une étude du ministère de l’Agriculture en 2014, presque 40 % ne comptaient aucune femme parmi leurs membres et 55 % en comptaient moins de deux sur une moyenne de 13 membres.[294] La grande majorité des comités villageois de gestion foncière examinés par l’étude aussi ne comptaient pas ou qu’une petite minorité de membres immigrants.[295]

L’une des principales conclusions d’un rapport réalisé par Human Rights Watch en 2013 sur le problème de la dépossession de terres dans l’ouest de la Côte d’Ivoire est que les comités villageois parviennent plus facilement à résoudre les litiges fonciers lorsqu’ils se composent des femmes, des représentants des communautés immigrantes, et d’Ivoiriens originaires d’autres régions.[296]

Redoubler d’efforts pour faire appliquer la loi de 1998

Alors que le Président Ouattara entame son second mandat, son gouvernement devrait trouver le moyen d’assurer une résolution équitable et rapide des litiges fonciers.

Bien que certains experts internationaux réclament une réforme complète de la loi de 1998, le gouvernement a pour l’instant fait savoir qu’il resterait concentré sur sa mise en œuvre.[297] En juillet 2015, le gouvernement a diffusé la version préliminaire d’une déclaration de politique foncière visant à simplifier les démarches nécessaires à l’obtention d’un certificat foncier et à en réduire le coût.[298] Un spécialiste du foncier travaillant pour un bailleur de fonds international qui a soutenu la mise en œuvre de la loi de 1998 a fait valoir que le processus de certification devrait être gratuit pour les Ivoiriens les plus pauvres.[299]

Si le gouvernement décide de poursuivre la mise en œuvre de la loi de 1998, il devra être conscient du fait que le processus de certification risque de mettre en évidence voire de provoquer des litiges fonciers qui, en vertu du système coutumier, n’étaient que latents et n’avaient pas véritablement éclaté.[300] En effet, selon ce système, plusieurs parties ont souvent des intérêts différents (et dans de nombreux cas contradictoires) à l’égard d’une seule parcelle de terrain.[301] Par exemple, il existe de nombreux cas où l’occupant de la terre cohabite avec le propriétaire qui l’y a installé, les deux individus croyant en être le propriétaire légitime et en dégageant des bénéfices.[302]

Si les litiges qui éclatent lors du processus de certification ne sont pas résolus rapidement, la mise en œuvre de la loi de 1998 risque de provoquer de nouveaux cas de dépossession affectant des propriétaires légitimes, enfreignant ainsi leur droit à la propriété. Un chef communautaire de Duékoué a ainsi affirmé à Human Rights Watch que par le passé, quand le gouvernement demandait aux gens d’obtenir des certificats fonciers, « cela créait beaucoup de problèmes. Le nombre de conflits fonciers a augmenté, car très souvent, la nature de la relation entre le propriétaire et le locataire est mal définie ».[303] Un expert international du foncier a expliqué à Human Rights Watch qu’il pensait que certains agriculteurs ivoiriens n’avaient pas demandé de certificat foncier de peur que cette démarche ne perturbe le mode d’occupation relativement paisible dont ils jouissaient en vertu du système coutumier.[304]

Un agent du gouvernement a déclaré à Human Rights Watch qu’au printemps 2016, les ONG ivoiriennes et les chefs communautaires auraient la possibilité d’émettre des commentaires sur la version préliminaire de la déclaration de politique foncière.[305] Le gouvernement devrait veiller à ce que les hommes et les femmes de tous les groupes politiques et ethniques puissent pleinement participer au processus de consultation.

L’un des aspects clés des consultations est que le gouvernement devrait s’interroger sur la manière d’assurer une résolution équitable et rapide des litiges fonciers survenant lors du processus de certification. Il pourra s’agir de modifier ou de mieux soutenir les comités villageois et sous-préfectoraux de gestion foncière mis en place pour soutenir l’application de la loi de 1998, ou encore d’instaurer un nouveau mécanisme. Il est essentiel que, dans un premier temps, les femmes, les communautés d’immigrants ainsi que les allochtones soient mieux représentés au sein des comités afin de participer à la résolution des litiges fonciers sur un pied d’égalité. Cependant, cela risque de ne pas être suffisant pour les mettre à l’abri d’une discrimination.

Le gouvernement devrait également envisager d’instaurer un mécanisme de surveillance indépendant chargé d’observer le fonctionnement des comités villageois et sous-préfectoraux de gestion foncière. Les membres de comités responsables d’actes discriminatoires ou qui enfreignent la loi devraient faire l’objet de mesures disciplinaires, notamment leur exclusion du comité.

 Le gouvernement devrait aussi veiller à ce que toute personne dont les droits de propriété ont été bafoués par la décision d’une autorité coutumière ou du gouvernement local, y compris les comités villageois et sous-préfectoraux de gestion foncière instaurés pour soutenir l’application de la loi de 1998, puisse faire appel de cette décision devant les tribunaux.

Remerciements

Ce rapport a été préparé et rédigé par Jim Wormington, chercheur pour la division Afrique de Human Rights Watch ; des travaux de recherche supplémentaires ont été réalisés par Felicity Thompson, chercheuse de la division Afrique.

Le rapport a été révisé par Corinne Dufka, directrice associée et chercheuse en chef de la division Afrique de l’Ouest. Clive Baldwin, conseiller juridique senior, et Babatunde Olugboji, directeur adjoint des programmes, en ont respectivement révisé les aspects juridiques et programmatiques. Param-Preet Singh, juriste senior auprès de la division Justice internationale, en a assuré une révision supplémentaire. Lauren Seibert, membre de l’équipe Afrique de l’Ouest ; Grace Choi, directrice des publications ; Kathy Mills, spécialiste des publications ; et Fitzroy Hepkins, responsable administratif, ont apporté leur aide à sa production. La traduction en français a été réalisée par Catherine Dauvergne-Newman, et révisée par Jim Wormington et Peter Huvos, responsable du site web en français de Human Rights Watch.

Human Rights Watch tient à remercier toutes les personnes qui ont accepté d’être interrogées pour les besoins de ce rapport, et qui l’ont rendu possible en exprimant leurs opinions avec une grande générosité. Human Rights Watch est également extrêmement reconnaissante au Regroupement des acteurs ivoiriens des droits humains (RAIDH) de bien avoir voulu collaborer à ces travaux de recherche.

[1] Entretien de Human Rights Watch avec un militant ivoirien de la société civile, Yopougon, Abidjan, 4 août 2015.

[2] Human Rights Watch, « "Ils les ont tués comme si de rien n’était" : Le besoin de justice pour les crimes post-électoraux en Côte d’Ivoire », 5 octobre 2011, https://www.hrw.org/fr/report/2011/10/05/ils-les-ont-tues-comme-si-de-rien-netait/le-besoin-de-justice-pour-les-crimes-post ; Human Rights Watch, « Parce qu’ils ont les fusils… il ne me reste rien » : Le prix de l’impunité persistante en Côte d’Ivoire, vol. 18, n° 4(A), mai 2006, https://www.hrw.org/fr/report/2006/05/25/parce-quils-ont-les-fusils-il-ne-me-reste-rien/le-prix-de-limpunite-persistante-en ; Human Rights Watch, « Un pays au bord du gouffre : La précarité des droits humains et de la protection civile en Côte d’Ivoire, vol. 17, no. 6(A), 3 mai 2005, https://www.hrw.org/fr/report/2005/05/03/un-pays-au-bord-du-gouffre/la-precarite-des-droits-humains-et-de-la-protection ; Human Rights Watch, Prise entre deux guerres : Violence contre les civils dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire, vol. 15, no. 14(A), août 2003 ; Human Rights Watch, Le Nouveau Racisme : La manipulation politique de l'ethnicité en Côte d’Ivoire, vol. 13, no. 6(A), 28 août 2001, https://www.hrw.org/fr/report/2001/08/28/le-nouveau-racisme/la-manipulation-politique-de-lethnicite-en-cote-divoire.

[3] Entretien mené par Human Rights Watch, Abobo, Abidjan, 1er août 2015.

[4] Entretien mené par Human Rights Watch, Yopougon, Abidjan, 4 août 2015.

[5] Entretien mené par Human Rights Watch, Yopougon, Abidjan, 4 août 2015.

[6] Entretien de Human Rights Watch avec un chef de village et des anciens, Guiglo, 24 mai 2015 ; entretiens avec des sympathisants de l’opposition, Yopougon, Abidjan, 4 août 2015.

[7] Principes fondamentaux et directives de l’ONU concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire (ci-après, « Principes fondamentaux de l’ONU concernant le droit à réparation des victimes »), adoptés le 16 décembre 2005, Doc. ONU A/RES/60/147, http://www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/RemedyAndReparation.aspx (consulté le 11 novembre 2015), par. 3(b).

[8] Statut de Rome de la Cour pénale internationale (« Statut de Rome »), Doc. ONU A/CONF.183/9, 17 juillet 1998, entré en vigueur le 1er juillet 2002 ; et Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (« Convention contre la torture »), adoptée le 10 décembre 1984, Rés. AG 39/46, annexe, 39 U.N. GAOR Supp. (No. 51) à 197, Doc ONU A/39/51 (1984), entrée en vigueur le 26 juin 1987.

[9] Entretien mené par Human Rights Watch, Yopougon, Abidjan, 4 août 2015.

[10] La Constitution amendée dispose : « Le candidat à la présidence doit … être d’origine ivoirienne, né de père et de mère eux-mêmes ivoiriens d’origine. Il ne doit jamais avoir renoncé à sa nationalité ivoirienne ou s’être prévalu d’une autre nationalité ». Constitution de la Côte d’Ivoire, « Chapitre III : Le Président de la République et le Gouvernement », 23 juillet 2000, http://democratie.francophonie.org/IMG/pdf/Cote_d_Ivoire.pdf (consulté le 11 novembre 2015), art. 35. Pour de plus amples renseignements sur la manière dont Gueï a manipulé le processus de référendum, voir International Crisis Group, « Côte d’Ivoire : ‘La guerre n’est pas encore finie’ », n° 72, 28 novembre 2003, http://www.crisisgroup.org/en/regions/africa/west-africa/cote-divoire/072-cote-divoire-the-war-is-not-yet-over.aspx (consulté le 11 novembre 2015), p. 7.

[11] Human Rights Watch, Le Nouveau Racisme, p. 1.

[12] Les Forces Nouvelles, qui ont combattu du côté de Ouattara pendant la crise postélectorale de 2010-2011 et ont joué un rôle capital en l’aidant à prendre le pouvoir, étaient composées de trois groupes rebelles qui avaient lancé une rébellion contre le gouvernement du Président Laurent Gbagbo en septembre 2002. Cette rébellion était motivée par le désir de mettre un terme à l’exclusion et à la discrimination politiques dont pâtissaient les Ivoiriens du Nord, et de chasser Gbagbo du pouvoir, dont ils estimaient que la présidence était illégitime en raison d’anomalies électorales. Human Rights Watch, Prise entre deux guerres ; Human Rights Watch, « Parce qu’ils ont les fusils… il ne me reste rien ». Pour une discussion sur les politiques discriminatoires de l’ère Gbagbo à l’égard des Ivoiriens du Nord et des immigrants, voir International Crisis Group, « Côte d’Ivoire : La guerre n’est pas encore finie », n° 72, 28 novembre 2003, http://www.crisisgroup.org/en/regions/africa/west-africa/cote-divoire/072-cote-divoire-the-war-is-not-yet-over.aspx (consulté le 10 novembre 2015), pp. 7-8.

[13] Human Rights Watch, « Ils les ont tués comme si de rien n’était », p. 16-25.

[14] Idem, p. 128.

[15] « Ivory Coast's former first lady Simone Gbagbo jailed », BBC News, 10 mars 2015, http://www.bbc.com/news/world-africa-31809073 (consulté le 4 septembre 2015).

[16] « Côte d’Ivoire : Inquiétudes après un procès insatisfaisant », communiqué de presse de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), 12 mars 2015, https://www.fidh.org/fr/regions/afrique/cote-d-ivoire/cote-d-ivoire-inquietudes-apres-un-proces-insatisfaisant (consulté le 4 septembre 2015).

[17] « Côte d’Ivoire : deux anciens chefs rebelles pro-Ouattara inculpés », Le Monde, 8 juillet 2015, http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/07/08/cote-d-ivoire-deux-anciens-chefs-rebelles-pro-ouattara-inculpes_4675895_3212.html (consulté le 11 novembre 2015).

[18] Entretien de Human Rights Watch avec un groupe international de défense des droits humains, Abidjan, 29 mai 2015.

[19] « Crise postélectorale ivoirienne : 2 militaires du camp Gbagbo acquittés », 17 mars 2015, Radio France Internationale (RFI), http://www.rfi.fr/afrique/20150317-crise-postelectorale-ivoirienne-deux-militaires-acquittes-bombardements-abobo/ (consulté le 11 novembre 2015). Le procureur militaire en chef, le commissaire Ange Kessy, fait appel devant la cour de cassation du fait que le tribunal militaire n’a pas accordé suffisamment de temps pour présenter des témoins. Entretien de Human Rights Watch avec le commissaire Ange Kessy, Abidjan, 29 mai 2015.

[20] Assemblée générale de l’ONU, rapport de la Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats, Gabriela Knaul, A/68/285, 7 août 2013, par. 63-71.

[21] Voir discours télévisé, « Message à la nation de SEM. Alassane Ouattara Président de la république Mercredi 31 décembre 2014 », Président Alassane Ouattara, 31 décembre 2014, diffusé par Abidjan.net, http://news.abidjan.net/h/519533.html (consulté le 11 novembre 2015) ; voir discours télévisé, « San Pedro : le Président Ouattara fait le bilan de sa visite d’Etat dans les régions du Bas Sassandra et du Gbôklè », Président Alassane Ouattara, San Pedro, 8 mars 2015, diffusé par la radio Abidjan.net, http://news.abidjan.net/v/23467.html (consulté le 11 novembre 2015) ; voir également les remarques de Ouattara lors d’un déplacement à Odienné, selon lesquelles « tous les responsables des crimes » de la crise postélectorale « seront jugés » et qu’il n’y aurait « pas d’impunité » en Côte d’Ivoire, dans l’article « Côte d’Ivoire : Ouattara souhaite une campagne présidentielle apaisée », Abidjan.net, 25 mai 2015, http://news.abidjan.net/h/552520.html (consulté le 5 novembre 2015). Voir aussi les remarques du Président Ouattara du 27 juin 2015 telles que rapportées dans le Nouveau Réveil (PDF dans les archives de Human Rights Watch).

[22] « Côte d’Ivoire : personne ne sera plus transféré à la CPI, selon Ouattara », Jeune Afrique, 13 avril 2015, http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAWEB20150413112851/laurent-gbagbo-alassane-ouattara-crise-post-lectorale-justice-ivoiriennec-te-d-ivoire-personne-ne-sera-plus-transf-r-la-cpi-selon-ouattara.html (consulté le 4 septembre 2015) ; « Côte d’Ivoire : Ouattara refuse tout nouveau transfert devant la CPI », RFI, 14 avril 2015, http://www.rfi.fr/afrique/20150413-cote-ivoire-alassane-ouattara-cpi-justice-internationale-crise-post-electorale/ (consulté le 4 septembre 2015).

[23] « Côte d’Ivoire : deux anciens chefs rebelles pro-Ouattara inculpés », Le Monde ; voir également « Côte d’Ivoire : inculpations tous azimuts dans l’armée », Jeune Afrique, 6 juillet 2015, http://www.jeuneafrique.com/mag/241746/societe/cote-divoire-inculpations-tous-azimuts-dans-larmee (consulté le 11 novembre 2015).

[24] « Côte d’Ivoire : L’Expert de l’ONU exhorte le gouvernement à assurer l’exercice des libertés publiques pour garantir des élections apaisées », communiqué de presse du HCDH, 29 mai 2015, http://www.ohchr.org/FR/NewsEvents/Pages/Display News.aspx?NewsID=16024&LangID=F (consulté le 11 novembre 2015) ; « Côte d’Ivoire : deux anciens ‘com-zone’ inculpés par la justice », RFI, 8 juillet 2015, http://www.rfi.fr/afrique/20150708-cote-ivoire-inculpations-anciens-chefs-rebelles (consulté le 11 novembre 2015) ; « Côte d’Ivoire : Ne clôturez pas les enquêtes : Il faut soutenir la justice pour les abus graves commis après les élections », communiqué de Human Rights Watch, 26 juin 2015, https://www.hrw.org/fr/news/2015/06/26/cote-divoire-ne-cloturez-pas-les-enquetes.

[25] Human Rights Watch, Transformer les discours en réalité : L’heure de réclamer des comptes pour les crimes internationaux graves perpétrés en Côte d’Ivoire, avril 2013, https://www.hrw.org/fr/report/2013/04/03/transformer-les-discours-en-realite/lheure-de-reclamer-des-comptes-pour-les-crimes ; FIDH, « Côte d’Ivoire : choisir entre la justice et l’impunité », https://www.fidh.org/IMG/pdf/co_te_d_ivoire_652f_web.pdf, p. 9.

[26] Idem, p. 9.

[27] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique ivoirien, Abidjan, 28 mai 2015 ; entretien avec un groupe international de défense des droits humains, 29 mai 2015.

[28] « Côte d’Ivoire : Ne clôturez pas les enquêtes : Il faut soutenir la justice pour les abus graves commis après les élections », communiqué de presse de Human Rights Watch, 26 juin 2015, https://www.hrw.org/fr/news/2015/06/26/cote-divoire-ne-cloturez-pas-les-enquetes.

[29] « Côte d’Ivoire : deux anciens ‘com-zone’ inculpés par la justice », RFI.

[30] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique ivoirien, Abidjan, 28 mai 2015 ; entretien avec un groupe international de défense des droits humains, Abidjan, 29 mai 2015.

[31] Entretien de Human Rights Watch avec un groupe international de défense des droits humains, Abidjan, 29 juillet 2015.

[32] Entretien de Human Rights Watch avec un groupe international de défense des droits humains, Abidjan, 29 mai 2015

[33] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 26 mai 2015 ; entretien avec un diplomate, Abidjan, 27 mai 2015 ; entretien avec un militant de la société civile, Abidjan, 29 mai 2015.

[34] Blaise Akame, « Ivory Coast: eventual Présidential pardon for the pro-Gbagbo », Africa Top Success, 13 janvier 2015, http://www.africatopsuccess.com/en/2015/01/13/ivory-coast-eventual-Présidential-pardon-for-the-pro-gbagbo/ (consulté le 11 novembre 2015) ; « Crise postélectorale : le président conditionne la grâce au pardon », RFI, 14 avril 2015, http://www.rfi.fr/afrique/20150414-crise-postelectorale-cote-ivoire-président-ouattara-conditionne-grace-pardon/ (consulté le 11 novembre 2015) ; et « Côte d’Ivoire : pas de nouveau transfèrement à la CPI (Ouattara) », Abidjan.net, 13 avril 2015, http://news.abidjan.net/h/548916.html (consulté le 11 novembre 2015).

[35] Cyril Bensimon, « Côte d’Ivoire : le président Ouattara promet une nouvelle Constitution s’il est réélu », Le Monde, 23 octobre 2015, http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/10/23/cote-d-ivoire-le-Président-ouattara-promet-une-nouvelle-constitution-s-il-est-reelu_4795712_3212.html#xtor=AL-32280270 (consulté le 11 novembre 2015). Si le Code pénal ivoirien (art. 140-142) exclut la possibilité d’amnistie pour les actes de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, il n’interdit pas la grâce. Le droit du Président à faire grâce est prévu dans la Constitution de la Côte d’Ivoire (art. 49) et le code pénal (art. 134).

[36] Entretien de Human Rights Watch avec Drissa Soumahoro, président de la Confédération des organisations des victimes de la crise ivoirienne (COVICI), Abidjan, 10 octobre 2015.

[37] Entretien de Human Rights Watch avec Drissa Soumahoro, président de la Confédération des organisations des victimes de la crise ivoirienne (COVICI), Abidjan, 10 octobre 2015.

[38] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec le responsable d’une organisation de la société civile, Abidjan, 15 octobre 2015.

[39] « Côte d'Ivoire : interview exclusive du président Alassane Ouattara », TV5MONDE, 28 octobre 2015, http://information.tv5monde.com/afrique/cote-d-ivoire-interview-exclusive-d-alassane-ouattara-63229 (consulté le 13 novembre 2015).

[40] Par le passé, le Bureau du Procureur a fait savoir sans équivoque qu’« une peine manifestement sans commune mesure avec la gravité des crimes et la forme de participation des accusés entacherait l’authenticité de la procédure nationale, même si celle-ci semblait jusqu’alors avoir été véritablement menée à bien ». Cour pénale internationale (CPI), « Rapport sur les activités menées en 2014 par le Bureau du Procureur en matière d’examen préliminaire », 2 décembre 2014, https://www.icc-cpi.int/iccdocs/otp/FRA-2014-Report-PE-Activities.pdf (consulté le 5 novembre 2015), par. 114.

[41] Human Rights Watch, Pour que la justice compte : Enseignements tirés du travail de la CPI en Côte d’Ivoire, 4 août 2015, https://www.hrw.org/fr/report/2015/08/04/pour-que-la-justice-compte/enseignements-tires-du-travail-de-la-cpi-en-cote, p. 44.

[42] Human Rights Watch, Pour que la justice compte, p. 44.

[43] Entretien de groupe de Human Rights Watch avec des membres du personnel de la CPI, La Haye, 10 juin 2015, et correspondance électronique, 17-24 juin 2015 ; entretien de groupe avec des membres du personnel de la CPI, La Haye, septembre 2015. Human Rights Watch, Pour que la justice compte, p. 45.

[44] D’après une enquête réalisée en décembre 2013 auprès de 1 000 résidents d’Abidjan, sur les 94 % de répondants qui avaient entendu parler de la CPI, 47 % en avaient une impression positive, tandis que 46 % en avaient une impression négative. Ceux d’entre eux qui en avaient une impression négative ont dans la plupart des cas fait valoir des perceptions de partialité. Plus spécifiquement, « Les répondants ont dans la plupart des cas évoqué une perception selon laquelle la Cour (1) ne poursuit qu’un seul groupe (24 %) ou (2) fait preuve de partialité en faveur du gouvernement (9 %), des militaires (1 %) ou affiche des parti pris indéfinis (6 %) ». Voir Phuong N. Pham et Patrick Vinck, Harvard Humanitarian Initiative, Harvard School of Public Health, « Fragile Peace, Elusive Justice: Population-Based Survey on Perceptions and Attitudes about Security and Justice in Abidjan », Series on Peace, Justice and Reconstruction, juillet 2014, http://www.peacebuildingdata.org/sites/m/pdf/Abidjan_2014_Fragile_Peace_Elusive_Justice.pdf (consulté le 5 juin 2015), pp. 45-47.

[45] Entretien de Human Rights Watch avec un représentant d’une organisation de la société civile ivoirienne, Abidjan, 25 septembre 2014 ; Human Rights Watch, Pour que la justice compte, p. 46-47.

[46] Human Rights Watch, Pour que la justice compte, p. 35-36 ; p. 41-44.

[47] Idem, p. 6. Voir également : Human Rights Watch, « Ils les ont tués comme si de rien n’était », pp. 5-6, 65-69, 87-105.

[48] Entretien de Human Rights Watch avec un chef de village et des anciens, Guiglo, 24 mai 2015.

[49] « Côte d’Ivoire : personne ne sera plus transféré à la CPI, selon Ouattara », Jeune Afrique, 13 avril 2015, http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAWEB20150413112851/laurent-gbagbo-alassane-ouattara-crise-post-lectorale-justice-ivoiriennec-te-d-ivoire-personne-ne-sera-plus-transf-r-la-cpi-selon-ouattara.html (consulté le 4 septembre 2015) ; « Côte d’Ivoire : Ouattara refuse tout nouveau transfert devant la CPI », RFI, 14 avril 2015, http://www.rfi.fr/afrique/20150413-cote-ivoire-alassane-ouattara-cpi-justice-internationale-crise-post-electorale/ (consulté le 4 septembre 2015).

[50] « La Chambre d’appel confirme la recevabilité de l’affaire Simone Gbagbo devant la CPI », communiqué de presse de la CPI, ICC-CPI-20150527- PR1112, 27 mai 2015, https://www.icccpi.int/FR_Menus/icc/press%20and%20media/ press%20releases/pages/pr-1112.aspx (consulté le 8 septembre 2015).

[51] Entretien mené par Human Rights Watch, Abidjan, 28 mai 2015.

[52] Entretien téléphonique mené par Human Rights Watch, septembre 2015.

[53] Entretien de Human Rights Watch avec Manlan Ehounou Laurent, magistrat ivoirien et président de Transparency Justice, Abidjan, 16 octobre 2015.

[54] Phuong N. Pham et Patrick Vinck, « Fragile Peace, Elusive Justice: Population-Based Survey on Perceptions and Attitudes about Security and Justice in Abidjan », pp. 36-37.

[55] Entretien de Human Rights Watch avec un agent d’une agence de développement international, mars 2015.

[56] Entretien de Human Rights Watch avec un juriste ivoirien, 8 octobre 2015.

[57] Agence française de développement (AFD), « Note de communication publique d’opération : Projet de renforcement du système judiciaire et pénitentiaire et de la protection des droits de l’homme en Côte d’Ivoire », http://www.afd.fr/base-projets/downloadDocument.action;jsessionid=1D1DA8BADCC41E671F82EF5A160D9942?idDocument=1733 (consulté le 11 novembre 2015), p. 2.

[58] Opération de l’ONU en Côte d’Ivoire (ONUCI), « Rapport sur l’état des lieux de la justice en Côte d’Ivoire 2008-2009 », p. 1-2, cité dans AFD, « Note de communication publique d’opération : Projet de renforcement du système judiciaire et pénitentiaire et de la protection des droits de l’homme en Côte d’Ivoire », p. 2.

[59] AFD, « Note de communication publique d’opération : Projet de renforcement du système judiciaire et pénitentiaire et de la protection des droits de l’homme en Côte d’Ivoire », p. 2.

[60] « Yamoussoukro / Alassane Ouattara aux magistrats : ‘La justice ivoirienne n’est ni rassurante, ni sécurisante’ », Abidjan.net, 5 novembre 2011, http://news.abidjan.net/h/415846.html (consulté le 5 novembre 2015).

[61] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 27 mai 2015.

[62] « Table de suivi de l’exécution du plan d’action de la politique sectorielle de la justice », septembre 2015 (dans les archives de Human Rights Watch).

[63] « Table de suivi de l’exécution du plan d’action de la politique sectorielle de la justice », septembre 2015 (dans les archives de Human Rights Watch).

[64] Entretien de Human Rights Watch avec le responsable d’une organisation de développement international active dans le secteur judiciaire, Abidjan, 28 juillet 2015.

[65] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, 29 juillet 2015 ; entretien avec un magistrat ivoirien, octobre 2015 ; entretien avec un responsable de la société civile ivoirienne, 15 octobre 2015.

[66] D’une manière générale, le direction du ministère de la Justice chargé des études, de la législation et de la documentation est responsable de l’élaboration de lois liées au secteur judiciaire. Les propositions de lois sont approuvées par le ministre de la Justice puis transmises au Secrétaire général du gouvernement, avant d’être examinées par le Conseil des ministres (l’équivalent, dans de nombreux pays, d’une réunion du cabinet) puis envoyées à l’Assemblée nationale qui devra l’étudier et éventuellement l’adopter.

[67] « Yamoussoukro / Alassane Ouattara aux magistrats : ‘La justice ivoirienne n’est ni rassurante, ni sécurisante’ », Abidjan.net.

[68] AFD, « Note de communication publique d’opération : Projet de renforcement du système judiciaire et pénitentiaire et de la protection des droits de l’homme en Côte d’Ivoire », p. 4. En outre, le ministère de la Justice ne débourse pas forcément tout cet argent – en 2013, seuls 79% du budget a en fait été dépensé.

[69] Depuis 2011, l’UE a consacré environ 18 millions d’euros (environ 19,3 millions de US$) aux efforts de réforme gouvernementaux du secteur judiciaire. Entretien de Human Rights Watch avec un agent international, 28 mai 2015. Le gouvernement français, qui est en train de finaliser un partenariat avec le ministère de la Justice qui verra 23 millions d’euros (environ 24,3 millions de US$) investis dans le secteur judiciaire sur une période de deux ans, deviendra le principal partenaire technique du ministère ivoirien de la Justice dans ce domaine. Ce programme s’inscrit dans le cadre du Contrat de désendettement et de développement (C2D) du gouvernement français, au titre duquel les remboursements de la dette du gouvernement ivoirien à la France servent à financer des projets de développement en Côte d’Ivoire – dont les gouvernements français et ivoirien décident conjointement. Le gouvernement américain poursuivra également son programme ProJustice de 19 millions de US$ jusqu’en 2018. « USAID Launches ProJustice, a Flagship Project for Côte d’Ivoire », communiqué de presse d’USAID, 19 novembre 2013, https://www.usaid.gov/cote-divoire/press-releases/usaid-launches-projustice-flagship-project-cote-divoire (consulté le 5 novembre 2015).

[70] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un diplomate, 18 juin 2015.

[71] Human Rights Watch, Transformer les discours en réalité : L’heure de réclamer des comptes pour les crimes internationaux graves perpétrés en Côte d’Ivoire, p. 46.

[72] En mars 2015, le Comité des droits de l’homme de l’ONU, dans son rapport final sur la mise en œuvre de l’ICCPR par la Côte d’Ivoire, s’est déclaré préoccupé par l’« absence d’indépendance du pouvoir judiciaire du fait d’immixtions du pouvoir exécutif ». Voir Comité des droits de l’homme, « Pacte international relatif aux droits civils et politiques : Observations finales concernant le rapport initial de la Côte d’Ivoire, 28 avril 2015, CCPR/C/CIV/CO/1, http://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CCPR/C/CIV/CO/1&Lang=En (consulté le 11 novembre 2015), par. 20. La Côte d’Ivoire est devenue membre de l’ICCPR en 1992 ; voir HCDH de l’ONU, « Ratification of 18 International Human Rights Treaties », http://indicators.ohchr.org/ (consulté le 5 novembre 2015).

[73] Entretien de Human Rights Watch avec un responsable de la société civile ivoirienne, 15 octobre 2015.

[74] « Yamoussoukro / Alassane Ouattara aux magistrats : ‘La justice ivoirienne n’est ni rassurante, ni sécurisante’ », Abidjan.net.

[75] Plan d’action de la politique sectorielle de la justice 2013, Axe Stratégique 2 (dans les archives de Human Rights Watch).

[76] Stratégie de sécurité nationale de la Côte d’Ivoire, p. 25 (dans les archives de Human Rights Watch).

[77] À noter qu’en Côte d’Ivoire, comme dans de nombreux systèmes juridiques fondés sur le modèle traditionnel français, le terme « magistrat » désigne à la fois les procureurs, appelés « magistrats du parquet », et les juges qui tranchent sur les dossiers, connus sous le nom de « magistrats de siège ». Les commentaires qui figurent dans cette section portent sur la nomination et la discipline des magistrats de siège.

[78] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, 29 juillet 2015.

[79] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un expert juridique international, 27 septembre 2015. ONUCI, « Étude d’évaluation du système judiciaire ivoirien : L’organisation et le fonctionnement du système judiciaire en Côte d’Ivoire », État de droit, juin 2007, http://www.onuci.org/pdf/rulesrapport6.pdf (consulté le 5 novembre 2015), p. 11.

[80] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un expert international, 27 septembre 2015. Odienné est une ville située au nord-ouest de la Côte d’Ivoire, à environ 700 km d’Abidjan.

[81] Entretien mené par Human Rights Watch, 16 octobre 2015.

[82] Entretien de Human Rights Watch avec un diplomate, 29 juillet 2015.

[83] Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature, adoptés par le septième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants qui s’est tenu à Milan du 26 août au 6 septembre 1985, Doc. ONU A/CONF.121/22/Rev.1 point 59 (1985), art. 2. Voir également Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, DOC/OS(XXX)247, 2003, http://www.achpr.org/fr/instruments/principles-guidelines-right-fair-trial/ (consulté le 13 novembre 2015), Principe A, par. 5 (a).

[84] Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique, Principe A, par. 4(h). Voir également Principes fondamentaux de l’ONU relatifs à l’indépendance de la magistrature, art. 10.

[85] « Côte d'Ivoire : Ouattara espère ‘une nouvelle Constitution’ », RFI, 22 octobre 2015, http://www.rfi.fr/afrique/20151022-cote-ivoire-ouattara-souhaite-une-nouvelle-constitution (consulté le 16 novembre 2015).

[86] À la question de savoir ce qu’il fallait faire pour améliorer le système judiciaire, plus de la moitié des personnes interrogées pour les besoins d’une enquête menée à Abidjan en décembre 2013 ont répondu qu’il fallait « lutter contre la corruption ». Voir Phuong N. Pham et Patrick Vinck, « Fragile Peace, Elusive Justice: Population-Based Survey on Perceptions and Attitudes about Security and Justice in Abidjan », pp. 39.

[87] Entretien mené par Human Rights Watch, Abidjan, 16 octobre 2015.

[88] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Bouaké, 7 octobre 2014 ; correspondance électronique avec un magistrat ivoirien, 22 octobre 2015.

[89] Entretien de Human Rights Watch avec un juriste ivoirien, Abidjan, 30 juillet 2015.

[90] « Yamoussoukro / Alassane Ouattara aux magistrats : ‘La justice ivoirienne n’est ni rassurante, ni sécurisante’ », Abidjan.net.

[91] Entretien de Human Rights Watch avec un diplomate, Abidjan, 28 juillet 2015 ; entretien avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[92] Entretien de Human Rights Watch avec un magistrat ivoirien, Abidjan, 19 octobre 2015 ; correspondance électronique avec un expert juridique international, Abidjan, 5 novembre 2015.

[93] Entretien de Human Rights Watch avec un magistrat ivoirien, Abidjan, 19 octobre 2015.

[94] Entretien de Human Rights Watch avec un juriste ivoirien, Abidjan, 30 juillet 2015 ; entretien avec un magistrat ivoirien, Abidjan, 19 octobre 2015.

[95] Entretien de Human Rights Watch avec un magistrat ivoirien, Abidjan, 16 octobre 2015 ; entretien avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[96] Entretien de Human Rights Watch avec un magistrat ivoirien, Abidjan, 19 octobre 2015 ; entretien avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[97] « Côte d’Ivoire/Corruption : les noms des juges indélicats seront publiés (Ouattara) », Abidjan.net, 16 octobre 2015, http://news.abidjan.net/h/567044.html (consulté le 11 novembre 2015).

[98] « Côte d’Ivoire/Corruption : les noms des juges indélicats seront publiés (Ouattara) », Abidjan.net.

[99] Entretien de Human Rights Watch avec un magistrat ivoirien, Abidjan, 19 octobre 2015.

[100] Entretien de Human Rights Watch avec une ONG ivoirienne active dans le domaine de la réforme du système pénitentiaire, Abidjan, 30 juillet 2015. Correspondance électronique avec un expert juridique international, 16 octobre 2015. En septembre 2014, d’après les chiffres de la Direction de l’Administration pénitentiaire du ministère de la Justice, 4 187 des 10 071 détenus de Côte d’Ivoire (41,57 %) étaient en détention préventive. Plusieurs personnes interrogées ont cité la détention préventive excessive comme constituant un problème majeur de droits humains. Entretien de Human Rights Watch avec Me Aimée Zebeyoux, présidente de l’Association des femmes juristes de Côte d’Ivoire, Abidjan, 3 août 2015 ; entretien avec Yacouba Doumbia, président du Mouvement ivoirien des droits de l’homme, Abidjan, 30 juillet 2015.

[101] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 27 mai 2015. Mouvement ivoirien des droits de l’homme (MIDH), « Évaluation et formation pour l’amélioration des conditions de vie des personnes privées de liberté en Côte d’Ivoire », Rapport d’évaluation, février – janvier 2015, p. 7 (dans les archives de Human Rights Watch).

[102] ONUCI, « Actes de la journée de réflexion sur la détention préventive, dans le cadre du stage de lancement du volet ‘Accès au droit’ du Projet P3-7 de l’ONG Prisonniers Sans Frontières, en collaboration avec le ministère de la Justice et des Droits de l’Homme et la section État de Droit de l’ONUCI », 28 avril 2009, Unity/Peace Hall, Sebroko, http://www.onuci.org/pdf/ACTESDELAJOURNEEDEREFLEXIONSURLADETENTIONPREVENTIVE.pdf.

[103] Conseil des droits de l’homme de l’ONU, « Rapport de l’Expert indépendant sur le renforcement de capacités et la coopération technique avec la Côte d’Ivoire dans le domaine des droits de l’homme, Mohammed Ayat », Doc. ONU A/HRC/29/49, 27 avril 2015, http://ap.ohchr.org/documents/dpage_e.aspx?si=A/HRC/29/49, para. 70 ; MIDH, « Évaluation et formation pour l’amélioration des conditions de vie des personnes privées de liberté en Côte d’Ivoire », p. 14.

[104] AFD, « Note de communication publique d’opération : Projet de renforcement du système judiciaire et pénitentiaire et de la protection des droits de l’homme en Côte d’Ivoire », p. 3.

[105] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un expert juridique international, 31 juillet 2015.

[106] Idem; MIDH, « Évaluation et formation pour l’amélioration des conditions de vie des personnes privées de liberté en Côte d’Ivoire », p. 6. Lorsque le MIDH s’est rendu en avril 2014 à la prison centrale d’Abidjan (Maison d’arrêt et de correction, MACA), il a signalé la présence de plus de 4 900 détenus, dont plus de 2 000 en détention préventive. La MACA n’est censée détenir que 1 500 personnes. Lorsque le groupe y est retourné en janvier 2015, le nombre de détenus était passé à 5 500, même si par la suite environ 1 330 ont été libérés à l’issue de la grâce présidentielle accordée en février 2015.

[107] Code de procédure pénale, N° 60-366 du 14 novembre 1960, Côte d’Ivoire, https://www.unodc.org/res/cld/document/civ/1960/loi-no-60-366-du-14-novembre-1960-portant-code-de-procedure-penale_html/Cote_dIvoire_Loi_No_60-366_du_14_Novembre_1960_portant_code_de_procedure_penale.pdf (consulté le 5 novembre 2015), art. 137-138.

[108] Entretien mené par Human Rights Watch, 30 juillet 2015.

[109] Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ICCPR), article 9(3), adopté le 16 décembre 1966, G.A. Rés. 2200A (XXI), 21 U.N. GAOR Supp. (No. 16) à 52, Doc. ONU A/6316 (1966), 999 U.N.T.S. 171, entré en vigueur le 23 mars 1976, auquel la Côte d’Ivoire a adhéré le 26 mars 1998. De même, les Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique indiquent : « À moins que des éléments de preuve suffisants rendent nécessaire la prise de mesures pour empêcher qu’une personne arrêtée et inculpée pour une infraction pénale ne s’évade, n’influence les témoins ou ne constitue une menace manifeste et grave pour d’autres, les Etats veillent à ce que ladite personne ne soit pas placée en détention préventive. Toutefois, la libération peut être assortie de certaines conditions ou garanties, notamment le paiement d’une caution. » Voir Principe M(1)(e).

[110] « Table de suivi de l’exécution du plan d’action de la politique sectorielle de la justice », mars 2015 (dans les archives de Human Rights Watch). En mars 2015, l’Assemblée nationale a adopté des lois qui modifient le code pénal et le code de procédure pénale ivoirien pour assurer le respect du Statut de Rome de la CPI. Cependant, ces réformes ne portaient pas sur les questions liées à la détention provisoire ou à la cour d’assises. Voir Conseil de sécurité de l’ONU, « Trente-sixième rapport du Secrétaire général sur l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire », Doc. ONU S/2015/320, 7 mai 2015, http://www.un.org/en/ga/search/view_doc.asp?symbol=S/2015/320 (consulté le 5 novembre 2015), par. 19.

[111] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[112] Entretien de Human Rights Watch avec le responsable d’une organisation de développement international active dans le secteur judiciaire, Abidjan, 28 juillet 2015.

[113] Code de procédure pénale, Côte d’Ivoire, art. 240, 243, 288. Voir Human Rights Watch, Transformer les discours en réalité, p. 56 pour obtenir une explication détaillée de la procédure pénale ivoirienne applicable aux crimes graves.

[114] Code de procédure pénale, Côte d’Ivoire, art. 235.

[115] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[116] Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ICCPR), art. 9(3) ; Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique, art. 3(a).

[117] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[118] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 31 juillet 2015.

[119] Entretien de Human Rights Watch avec un représentant d’une ONG ivoirienne active dans le domaine de la réforme du système pénitentiaire, Abidjan, 30 juillet 2015 ; MIDH, « Évaluation et formation pour l’amélioration des conditions de vie des personnes privées de liberté en Côte d’Ivoire », pp. 8-12.

[120] MIDH, « Évaluation et formation pour l’amélioration des conditions de vie des personnes privées de liberté en Côte d’Ivoire », p. 9.

[121] Entretien de Human Rights Watch avec une ONG ivoirienne active dans le domaine de la réforme du système pénitentiaire, Abidjan, 30 juillet 2015 ; entretien avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[122] Entretien de Human Rights Watch avec un diplomate international, Abidjan, 30 juillet 2015 ; entretien avec une ONG ivoirienne active dans le domaine de la réforme du système pénitentiaire, 30 juillet 2015 ; entretien avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[123] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 27 septembre 2015.

[124] Entretien de Human Rights Watch avec un juriste ivoirien, Abidjan, 30 juillet 2015.

[125] Code de procédure pénale, Côte d’Ivoire, art. 274-276.

[126] Ces honoraires portent le nom de « commission d’office ». Cependant, de nombreux avocats refusent de traiter ce type de dossiers car les honoraires sont très modestes et souvent versés longtemps après la clôture du dossier. Entretien de Human Rights Watch avec un expert international du secteur de la justice, 29 juillet 2015.

[127] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, 29 juillet 2015. Voir également ONUCI, « Étude d’évaluation du système judiciaire ivoirien », p. 47.

[128] « Human Rights Committee considers report of Côte d’Ivoire », communiqué de presse du HCDH de l’ONU, 19 mars 2014, http://www.ohchr.org/EN/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=15722&LangID=E (consulté le 5 novembre 2015) ; Ordre des Avocats, « Liste complète des avocats du barreau de Côte d’Ivoire », http://www.ordredesavocats.ci/liste.html (consulté le 5 novembre 2015).

[129] Entretien de Human Rights Watch avec un juriste ivoirien, Abidjan, 30 juillet 2015.

[130] Comité des droits de l’homme des Nations Unies (CDH), « Examen des rapports présentés par les États parties en application de l’article 40 du Pacte [ICCPR] : Observations finales du Comité des droits de l’homme, Slovaquie », Doc. ONU CCPR/C/79/Add. 79, 4 août 1997, disponible à l’adresse : http://www.refworld.org/docid/3ae6b032c.html (consulté le 11 novembre 2015), par. 19. Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique, art. M(2)(f).

[131] Code de procédure civile, n° 72-833 du 21 décembre 1972, Côte d’Ivoire, http://droitivoirien.info/files/2.4.1.-Loi-du-21-decembre-1972_Code-de-procedure-civile,-commerciale-et-admin.pdf (consulté le 5 novembre 2015), art. 27 – 31.

[132] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015 ; entretien avec un juriste ivoirien, Bouaké, 10 août 2014.

[133] Entretien de Human Rights Watch avec Me Aimée Zebeyoux, présidente de l’Association des femmes juristes de Côte d’Ivoire, Abidjan, 3 août 2015. Ces cliniques se trouvent à Man, Guiglo, Bouaké, Korhogo, San Pedro et Bondoukou. Entretien avec un diplomate international, Abidjan, 28 juillet 2015. La majorité des travaux de la clinique sont assurés par des personnes qui ne sont pas des avocats (même si elles sont souvent titulaires d’une licence en droit), qui donnent aux accusés des conseils élémentaires pour les aider à s’y retrouver dans le système judiciaire.

[134] Entretien de Human Rights Watch avec Me Aimée Zebeyoux, Abidjan, 3 août 2015. De nombreux répondants ont déclaré à Human Rights Watch que vu la pénurie d’avocats à l’intérieur du pays, les cliniques juridiques sont un moyen efficace de donner accès à des conseils juridiques élémentaires aux Ivoiriens. Entretien avec Me Yacouba Doumbia, président du Mouvement ivoirien des droits de l’homme, Abidjan, 30 juillet 2015 ; entretien avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015 ; entretien avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 27 juillet 2015 ; entretien avec un diplomate international, Abidjan, 28 mai 2015. Bien que le soutien financier de l’UE envers les cliniques soit terminé, le gouvernement français a convenu de les financer dans le cadre d’un nouveau partenariat avec le ministère de la Justice, et il appuiera l’ouverture de cliniques sur trois autres sites. Entretien avec un diplomate international, 18 juin 2015. L’UNICEF prendra en charge la clinique de San Pedro.

[135] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015 ; entretien avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 27 juillet 2015.

[136] « Projet de Loi relatif à l’assistance juridique et judiciaire », version proposée par les partenaires financiers et techniques au gouvernement ivoirien, janvier 2014 (dans les archives de Human Rights Watch). Les bailleurs de fonds internationaux ont proposé de soutenir des programmes de formation pour aider les magistrats, les avocats et les inculpés à appliquer et comprendre la nouvelle loi dès son adoption. Entretien de Human Rights Watch avec le responsable d’une organisation de développement international active dans le secteur judiciaire, Abidjan, 28 juillet 2015.

[137] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[138] Entretien de Human Rights Watch avec un commandant de la police, nord de la Côte d’Ivoire, 8 octobre 2014.

[139] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 3 août 2015.

[140] L’ONUCI a signalé qu’entre le 1er décembre 2014 et le 1er mai 2015, les FRCI, certains membres de la gendarmerie et de la police et d’autres agents de l’État auraient été impliqués dans un meurtre extrajudiciaire, des cas de torture et de mauvais traitement infligés à 35 personnes et des cas d’arrestation arbitraire et de mise en détention illégale de 46 personnes. Conseil de sécurité de l’ONU, « Trente-sixième rapport du Secrétaire général sur l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire », Doc. ONU S/2015/320, 7 mai 2015, par. 44. http://www.un.org/en/ga/search/view_doc.asp?symbol=S/2015/320&referer=/english/&Lang=F (consulté le 11 novembre 2015).

[141] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 6 octobre 2014 ; entretien avec un fonctionnaire international, 23 octobre 2015 ; entretien avec un fonctionnaire de police, Abidjan, 26 mai 2015.

[142] Entretien de Human Rights Watch avec un juriste ivoirien, Bouaké, 8 octobre 2014.

[143] International Crisis Group, « Une période critique pour stabiliser la Côte d’Ivoire », Rapport Afrique N° 176, 1er août 2011, http://www.crisisgroup.org/fr/regions/afrique/afrique-de-louest/cote-divoire/176-a-critical-period-for-ensuring-stability-in-cote-divoire%20.aspx (consulté le 5 novembre 2015), p. 3.

[144] International Crisis Group, « Faire baisser la pression », Rapport Afrique N° 193, 26 novembre 2012, http://www.crisisgroup.org/fr/regions/afrique/afrique-de-louest/cote-divoire/193-cote-divoire-defusing-tensions.aspx (consulté le 11 novembre 2015), p. 3

[145] Human Rights Watch, Le Nouveau Racisme ; Human Rights Watch, Abus commis par le gouvernement en réponse à la révolte de l’armée, vol. 14, no. 9(A), novembre 2002, https://www.hrw.org/fr/report/2002/11/28/abus-commis-par-le-gouvernement-en-reponse-la-revolte-de-larmee ; Human Rights Watch, Prise entre deux guerres ; « Violations des droits de l’homme à Abidjan au cours d’une manifestation de l’opposition », document d’information de Human Rights Watch, mars 2004, https://www.hrw.org/report/2004/10/14/human-rights-violations-abidjan-during-opposition-demonstration-march-2004 ; Human Rights Watch, « Parce qu’ils ont les fusils… il ne me reste rien. » ; Human Rights Watch, Terrorisés et abandonnés – L’anarchie, le viol et l’impunité dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, octobre 2010, https://www.hrw.org/fr/report/2010/10/22/terrorises-et-abandonnes/lanarchie-le-viol-et-limpunite-dans-louest-de-la-cote.

[146] Human Rights Watch, « Ils les ont tués comme si de rien n’était », p. 87-120; Human Rights Watch, Abus commis par le gouvernement en réponse à la révolte de l’armée ; Human Rights Watch, Prise entre deux guerres ; « Violations des droits de l’homme à Abidjan au cours d’une manifestation de l’opposition », document d’information de Human Rights Watch ; Human Rights Watch, « Parce qu’ils ont les fusils… il ne me reste rien. » ; Human Rights Watch, Terrorisés et abandonnés – L’anarchie, le viol et l’impunité dans l’ouest de la Côte d’Ivoire.

[147] Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire établi en application du paragraphe 27 de la résolution 2153 (2014) du Conseil de sécurité », Comité des sanctions du Conseil de sécurité établi par la résolution 1572, Doc. ONU S/2015/252, 13 avril 2015, http://daccess-ddsny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N15/062/44 /PDF/N1506244.pdf?OpenElement (consulté le 11 novembre 2015), p. 15. Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, 3 août 2015.

[148] Stratégie de sécurité nationale de la Côte d’Ivoire, p. 7 (dans les archives de Human Rights Watch). Voir également : « À la découverte de la Réforme du Secteur de la Sécurité (RSS) », Abidjan.net, 30 avril 2015, http://news.abidjan.net /h/550518.html (consulté le 11 novembre 2015).

[149] Conseil de sécurité de l’ONU, « Trente-sixième rapport du Secrétaire général sur l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire », Doc. ONU S/2015/320, 7 mai 2015, http://www.un.org/en/ga/search/view_doc.asp?symbol=S/2015 /320 (consulté le 11 novembre 2015), p. 8.

[150] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 3 août 2015.

[151] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 3 août 2015 ; entretien avec un haut représentant des FRCI, Abidjan, 31 juillet 2015.

[152] Conseil de sécurité de l’ONU, « Les violences sexuelles liées au conflit : Rapport du Secrétaire général », par. 71.

[153] Idem, par. 71.

[154] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 5 novembre 2015.

[155] Idem. Voir également : ONUCI, « Allocution de la Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU pour la Côte d’Ivoire, Mme Aïchatou Mindaoudou, à la cérémonie de lancement du mécanisme de collaboration entre les Forces Républicaines de Côte d’Ivoire et l’ONUCI dans le domaine des droits de l’homme », Abidjan, 24 août 2015, http://www.onuci.org/spip.php?article12695 (consulté le 13 novembre 2015).

[156] Conseil de sécurité de l’ONU, « Trente-sixième rapport du Secrétaire général sur l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire », p. 8 ; entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 3 août 2015.

[157] Conseil de sécurité de l’ONU, « Trente-sixième rapport du Secrétaire général sur l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire », p. 8.

[158] Human Rights Watch, Bien loin de la réconciliation, novembre 2012, https://www.hrw.org/sites/default/ files/reports/cotedivoire1112webwcover.pdf..

[159] Le 23 février 2014, des individus armés ont attaqué des positions des FRCI à Fêtê et Grabo, près de la frontière libérienne, tuant quatre soldats FRCI et un civil. Conseil de sécurité de l’ONU, « Trente-cinquième rapport du Secrétaire général sur les opérations des Nations Unies en Côte d’Ivoire », Doc. ONU S/2014/892, 12 décembre 2014, http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=S/2014/892 (consulté le 11 novembre 2015), par. 17, 38-39.

[160] Conseil des droits de l’homme de l’ONU, « Rapport de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en Côte d’Ivoire, Doudou Diène », Doc. ONU A/HRC/26/52, 15 mai 2014, http://www.securitycouncilreport.org/atf/cf/%7 B65BFCF9B-6D27-4E9C-8CD3-CF6E4FF96FF9%7D/a_hrc_26_52_.pdf (consulté le 5 novembre 2015), par. 23.

[161] Conseil de sécurité de l’ONU, « Trente-cinquième rapport du Secrétaire général sur les opérations des Nations Unies en Côte d’Ivoire »,,par. 21 ; Conseil des droits de l’homme de l’ONU, « Rapport de l’Expert indépendant sur le renforcement de capacités et la coopération technique avec la Côte d’Ivoire dans le domaine des droits de l’homme, Mohammed Ayat », par. 67.

[162] Conseil des droits de l’homme de l’ONU, « Rapport de l’Expert indépendant sur le renforcement de capacités et la coopération technique avec la Côte d’Ivoire dans le domaine des droits de l’homme, Mohammed Ayat », par. 67.

[163] Constitution de la Côte d’Ivoire, art. 3. « Des ODH demandent la sanction des actes de torture et le rétablissement des victimes dans leurs droits », Abidjan.net, 26 juin 2015, http://news.abidjan.net/h/556199.html (consulté le 13 novembre 2015). Voir également Fédération internationale de l’action des Chrétiens pour l’abolition de la torture (FIACAT) et Action des Chrétiens pour l’abolition de la torture de la Côte d’Ivoire (ACAT CI), « Rapport de la FIACAT et de l’ACAT Côte d’ivoire sur la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques en vue de l’adoption de la liste de questions par le Comité des droits de l’homme des Nations Unies », avril 2014, http://tbinternet.ohchr.org/Treaties/CCPR/Shared% 20Documents/CIV/INT_CCPR_ICO_CIV_17196_F.pdf (consulté le 13 novembre 2015), p. 11.

[164] Conseil des droits de l’homme de l’ONU, « Rapport de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en Côte d’Ivoire, Doudou Diène », par. 26 ; entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 6 octobre 2014 ; entretien avec un juriste ivoirien, Abidjan, 4 août 2015.

[165] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 5 novembre 2015. « Côte d’Ivoire : Respecter les droits humains lors des élections – Un appel de 15 organisations ivoiriennes et internationales », communiqué de presse de Human Rights Watch, 21 octobre 2015, https://www.hrw.org/fr/news/2015/10/21/cote-divoire-respecter-les-droits-humains-lors-des-elections.

[166] Idem.

[167] Entretien de Human Rights Watch avec un expert juridique international, Abidjan, 29 juillet 2015.

[168] « Côte d’Ivoire : Extorsion aux mains des forces de sécurité - Il faut poursuivre les contrevenants et renforcer l'Unité de lutte contre le racket », communiqué de presse de Human Rights Watch, 29 juillet 2015, https://www.hrw.org/fr/news/2015/07/29/cote-divoire-extorsion-aux-mains-des-forces-de-securite.

[169] « Côte d’Ivoire : Extorsion aux mains des forces de sécurité », communiqué de presse de Human Rights Watch, ; « Côte d’Ivoire : Actes d’extorsion commis par les forces de sécurité - De lourdes conséquences sur la santé et les moyens de subsistance dans l’ouest du pays », communiqué de presse de Human Rights Watch, 1er juillet 2013, https://www.hrw.org/fr/news/2013/07/01/cote-divoire-actes-dextorsion-commis-par-les-forces-de-securite.

[170] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un fonctionnaire ivoirien, Abidjan, 3 novembre 2015.

[171] De nombreux commandants rebelles des Forces Nouvelles ont dégagé des bénéfices considérables d’un système de taxation parallèle ciblant les entreprises et les barrages routiers lorsqu’ils contrôlaient le nord de la Côte d’Ivoire. Ces commandants, qui ont désormais été intégrés dans les FRCI, ont étendu ces pratiques dans le sud du pays pendant la crise postélectorale de 2010-2011, instaurant ce que le Groupe d’experts de l’ONU a qualifié de « réseau militaro-économique » d’une valeur de plusieurs millions de dollars. Ce réseau reprend le système de commandement par zones que les Forces Nouvelles avaient employé dans le Nord, répartissant le pays en zones économiques, des « com-zones », contrôlées par un commandant. Voir Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire, établi en application du paragraphe 16 de la résolution 2045 (2012) du Conseil de sécurité », Comité des sanctions du Conseil de sécurité établi par la résolution 1572, Doc. ONU S/2013/228, 17 avril 2013, http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N13/264/10/PDF/N1326410.pdf?OpenElement (consulté le 11 novembre 2015), par. 102-109, 150-154. Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire établi en application du paragraphe 19 de la résolution 2101 (2013) du Conseil de sécurité », Comité des sanctions du Conseil de sécurité établi par la résolution 1572, Doc. ONU S/2014/266, 14 avril 2014, http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=S/2014/266&referer=http://www.un.org/press/en/2014/sc11372.doc.htm&Lang=F (consulté le 11 novembre 2015), par. 62-63.

[172] Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire », 2014, par. 69 ; Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire », 2015, p. 3 ; entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONU, Abidjan, 7 août 2015.

[173] Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire », 2014, par. 69.

[174] Entretien de Human Rights Watch avec un diplomate, Abidjan, mai 2015. Voir également Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire », 2015, par. 222.

[175] « Côte d'Ivoire : deux anciens ‘com-zone’ inculpés par la justice », RFI.

[176] Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire », 2015, résumé et par. 163-164, 173-174, 188, 191-192, 217 ; « Special Report: Why gold threatens Ivory Coast's peace », Reuters, 7 mai 2015, http://www.reuters.com/article/2015/05/08/us-ivorycoast-goldarmyspecialreportidUSKBN0NS0V620150508#h0itivE phBwOsaXj.97 (consulté le 5 novembre 2015). Le Groupe d’experts a également rendu compte de l’implication de Wattao dans un racket ciblant le secteur des transports à Abidjan, où il était chef de la sécurité de la zone Sud jusqu’en juillet 2014. Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire », 2014, par. 32-38. Voir également Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire », 2015, par. 251-252.

[177] En 2013, 1 996 personnes ont été intégrées dans le service pénitentiaire, 1 000 dans les services forestiers, et 2 000 en tant qu’agents des douanes. Autorité de Désarmement, Démobilisation et Réinsertion des Ex-combattants, « Tableau Réinsertion-Réintégration jusqu’à septembre 2014 » (dans les archives de Human Rights Watch).

[178] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 7 août 2015 ; entretien téléphonique avec un diplomate, 30 avril 2015.

[179] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 7 août 2015.

[180] Idem.

[181] En octobre 2013, le Groupe d’experts a déclaré que grâce au contrôle qu’ils exercent sur le processus de DDR, les anciens commandants des FN sont « en mesure de maintenir leur contrôle sur les réseaux militaires à l’intérieur et à l’extérieur des Forces républicaines de Côte d’Ivoire et servir ainsi leurs propres intérêts financiers, militaires et politiques ». Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport de mi-mandat du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire en application du paragraphe 19 de la résolution 2101 (2013) du Conseil de sécurité », Doc. ONU S/2013/605, 14 octobre 2013, http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N13/512/82/PDF/N1351282.pdf?OpenElement (consulté le 5 novembre 2015), par. 6.

[182] « Côte d’Ivoire : Nulle part où se tourner pour obtenir une protection - La vie quotidienne dans le Nord est marquée par des crimes violents », communiqué de presse de Human Rights Watch, 15 décembre 2014, https://www.hrw.org/fr/news/2014/12/15/cote-divoire-nulle-part-ou-se-tourner-pour-obtenir-une-protection ; « Côte d’Ivoire : Extorsion aux mains des forces de sécurité », communiqué de presse de Human Rights Watch, 29 juillet 2015.

[183] Entretien de Human Rights Watch avec des membres du personnel d’une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 2 août 2015 ; entretien avec un agent du gouvernement local, Bouaké, 8 octobre 2014 ; entretien avec une ONG ivoirienne, Bouaké, 10 octobre 2014 ; entretien avec un agent de l’ONUCI, Bouaké, 7 octobre 2014 ; entretien avec un diplomate international, 13 octobre 2014.

[184] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un diplomate international, Abidjan, 30 avril 2015 ; entretien avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 3 août 2015.

[185] Entretien de Human Rights Watch avec un agent du gouvernement local, Bouaké, 8 octobre 2014.

[186] Entretien de Human Rights Watch avec un officier des FRCI, Duékoué, 25 mai 2015.

[187] Human Rights Watch, Bien loin de la réconciliation, p. 61.

[188] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Bouaké, 7 octobre 2014.

[189] Entretien de Human Rights Watch avec un juriste ivoirien, Bouaké, 7 octobre 2014.

[190] Entretien téléphonique mené par Human Rights Watch, 23 octobre 2015.

[191] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 6 octobre 2014 ; entretien avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 3 août 2015.

[192] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 6 octobre 2014 ; entretien avec un groupe international de défense des droits humains, Abidjan, 29 mai 2015.

[193] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 6 octobre 2014 ; entretien avec un groupe international de défense des droits humains, Abidjan, 29 mai 2015.

[194] Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique, Principe L.

[195] Entretien de Human Rights Watch avec le commissaire Ange Kessy, Abidjan, 29 mai 2015 ; entretien avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 6 octobre 2015.

[196] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 7 août 2015 ; entretien téléphonique avec un diplomate, Abidjan, 30 avril 2015 ; entretien avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 3 août 2015.

[197] Le 18 novembre 2014, différents groupes de soldats des FRCI ont érigé des barricades et bloqué des rues devant des casernes à Abengourou, Abidjan, Aboisso, Bouaké, Daloa, Korhogo, Odienné et Yamoussoukro, en signe de protestation contre des impayés de soldes et d’autres avantages financiers. À Bouaké, les manifestants ont brièvement pris le contrôle de chaînes de télévision et de radio nationales, ainsi que pénétré dans le dépôt d’armes des FRCI et pillé des postes de police. Conseil de sécurité de l’ONU, « Trente-cinquième rapport du Secrétaire général sur les opérations des Nations Unies en Côte d’Ivoire », Doc. ONU S/2014/892, 12 décembre 2014, http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=S/2014/892 (consulté le 16 novembre 2015), par. 22. Plusieurs diplomates ont dit à Human Rights Watch qu’ils soupçonnaient d’anciens commandants des Forces Nouvelles qui jouent désormais un rôle de premier plan dans les FRCI d’avoir joué un rôle dans l’organisation des manifestations. Le Groupe d’experts de l’ONU, dans son rapport d’avril 2015, indiquait que « l’autorité de la hiérarchie militaire est toujours sapée par des dissensions résultant d’affiliations antérieures », et que la manifestation du 18 novembre 2014 « pourrait ne pas avoir été spontanée ». Conseil de sécurité de l’ONU, « Rapport final du Groupe d’experts sur la Côte d’Ivoire », 2015, par. 55-56.

[198] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec Drissa Soumahoro, président de la Confédération des organisations de victimes de la crise ivoirienne (COVICI), Abidjan, 16 octobre 2015.

[199] Résumé du rapport final de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR), p. 21 (dans les archives de Human Rights Watch). Voir également « Ordonnance n°2011 -167 du 13 juillet 2011 portant création, attributions, organisation et fonctionnement de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation », Côte d’Ivoire, disponible sur Abidjan.net, http://www.abidjan.net/gouv/p.asp?id=11 (consulté le 5 novembre 2015), art. 5.

[200] Résumé du rapport final de la CDVR (dans les archives de Human Rights Watch), p. 17. La CDVR a également établi 37 commissions locales, 6 à Abidjan et une dans chaque région administrative, pour appuyer ses activités.

[201] Entretien mené par Human Rights Watch, Yopougon, Abidjan, 4 août 2015.

[202] Idem.

[203] La CDVR a été chargée de « proposer les moyens de toute nature susceptibles de contribuer à guérir les traumatismes subis par les victimes ». Voir « Ordonnance n°2011 - 167 du 13 juillet 2011 », Côte d’Ivoire, article 5. Le terme « réparations » n’apparaît de manière spécifique que dans une ordonnance ultérieure. Voir « Ordonnance N° 2014-32 du 04 février 2014 relative à la poursuite des missions de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation, Côte d’Ivoire, art. 1. Voir également Résumé du rapport final de la CDVR (dans les archives de Human Rights Watch), p. 20.

[204] Voir Résumé du rapport final de la CDVR (dans les archives de Human Rights Watch), p. 74, 79.

[205] Gouvernement de la Côte d’Ivoire, « Remise du Rapport final de la CDVR : Charles Konan Banny recommande des journées nationales de la mémoire et du pardon », Côte d’Ivoire, http://www.gouv.ci/actualite_1.php?recordID=5153 (consulté le 11 novembre 2015).

[206] Résumé du rapport final de la CDVR (dans les archives de Human Rights Watch), chapitre 4.

[207] « Remise du Rapport final de la CDVR : Charles Konan Banny recommande des journées nationales de la mémoire et du pardon », Côte d’Ivoire.

[208] « Ordonnance N° 2015-174 du 24 Mars 2015 portant création, attributions, composition et fonctionnement de la Commission nationale pour la réconciliation et l’indemnisation des victimes des crises survenues en Côte d’Ivoire, dénommée CONARIV », Côte d’Ivoire, art. 2 (dans les archives de Human Rights Watch). Banny a été remplacé par l’archevêque de Bouaké, Paul Siméon Ahouana, même si sept des neuf commissaires de la CONARIV faisaient également partie de la CDVR.

[209] « Ordonnance N° 2015-174 du 24 Mars 2015 », Côte d’Ivoire, art. 14-17 (dans les archives de Human Rights Watch).

[210] Entretien de Human Rights Watch avec le responsable d’une association de victimes, 5 août 2015.

[211] Entretien de Human Rights Watch avec un militant de l’opposition, Guiglo, 24 mai 2015.

[212] Human Rights Watch, « Ils les ont tués comme si de rien n’était », p. 137.

[213] Entretien de Human Rights Watch avec un universitaire ivoirien travaillant sur les questions relatives à la justice transitionnelle, Abidjan, 7 mai 2015.

[214] Idem.

[215] Entretien de Human Rights Watch avec le responsable d’une association de victimes, Abidjan, 5 août 2015.

[216] Résumé du rapport final de la CDVR (dans les archives de Human Rights Watch), p. 93-94.

[217] Idem, p. 95.

[218] Résumé du rapport final de la CDVR (dans les archives de Human Rights Watch), p. 100.

[219] Un universitaire ivoirien a déclaré que la présence de Banny dans les enregistrements était un des facteurs qui empêchaient la diffusion des émissions, affirmant toutefois également que « ceux qui sont au pouvoir craignaient que certains éléments des audiences publiques ne remettent en question leur propre responsabilité dans les crimes qui ont été commis ». Entretien de Human Rights Watch avec un universitaire ivoirien travaillant sur les questions relatives à la justice transitionnelle, Abidjan, 7 mai 2015.

[220] FIDH, « Côte d’Ivoire : choisir entre la justice et l’impunité », p. 12. Entretien de Human Rights Watch avec un expert de la justice transitionnelle, Abidjan, 31 juillet 2015.

[221] Conseil de sécurité des Nations Unies, Résolution 2226 (2015), Doc. ONU S/RES/2226 (2015), adopté le 25 juin 2015, http://www.un.org/en/ga/search/view_doc.asp?symbol=S/RES/2226%282015%29&referer=http://www.un.org /en/sc/documents/resolutions/2015.shtml&Lang=F (consulté le 11 novembre 2015), p. 6.

[222] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 9 novembre 2015.

[223] Entretien de Human Rights Watch avec un militant de l’opposition, Guiglo, 24 mai 2015.

[224] Principes fondamentaux de l’ONU concernant le droit à réparation des victimes, par. 11(b).

[225] Président Alassane Ouattara, « Fête de l'indépendance : Message du Président de la République à la Nation », discours télévisé, 7 août 2015, http://www.ado.ci/accueil.php (consulté le 5 novembre 2015).

[226] Entretien mené par Human Rights Watch, Abidjan, 1er août 2015.

[227] Idem.

[228] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de la CONARIV, Abidjan, 7 août 2015 ; entretien avec un expert international des questions relatives aux réparations à accorder aux victimes, Abidjan, 31 juillet 2015 ; entretien téléphonique avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 27 août 2015. La CONARIV a réalisé son propre recensement des victimes à l’échelle nationale, pour donner aux victimes une chance supplémentaire de se faire connaître, du 18 mai au 30 juin 2015. « Côte d’Ivoire : l’indemnisation des victimes de la crise postélectorale démarrera en juillet (Commission) », Abidjan.net, 5 mai 2015, http://news.abidjan.net/h/550862.html (consulté le 5 novembre 2015). La période de recensement a été prolongée jusqu’au 30 juin 2015. « Côte d’Ivoire : le recensement des victimes des crises prorogé jusqu’au 30 juin », Abidjan.net, 20 juin 2015, http://news.abidjan.net/h/555726.html (consulté le 5 novembre 2015). Depuis, la CONARIV a organisé un autre mois de recensement, de début septembre à début octobre, et prévoit de donner aux victimes une dernière chance de s’inscrire fin 2015 ou début 2016.

[229] Entretien de Human Rights Watch avec un expert international des questions relatives aux réparations à accorder aux victimes, Abidjan, 31 juillet 2015 ; entretien téléphonique avec un agent de l’ONU, Abidjan, 27 août 2015. La CONARIV est en train de dresser une liste définitive, archivée dans une base de données créée à cet effet, qui permettra d’éviter que le nom d’une victime n’apparaisse plusieurs fois. La CONARIV procède également à une vérification pour évaluer les revendications des victimes, qui comprendra une référence à des pièces justificatives et, si nécessaire dans des cas spécifiques, des enquêtes de terrain. Entretien de Human Rights Watch avec un agent de la CONARIV, Abidjan, 7 août 2015.

[230] « Loi portant identification des victimes et réparation des dommages de guerre /crises survenues en Côte d’Ivoire », (exemplaire de la version préliminaire détenue dans les archives de Human Rights Watch). Au moment de la rédaction des présentes, la CONARIV envisageait de lancer un processus de consultation sur cette loi en décembre 2015.

[231] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 27 août 2015. Les 4 500 victimes se composaient de 3 500 individus qui avaient perdu des membres de leur famille, chacun d’entre eux ayant reçu 1 million de FCFA (environ 1 615 US$), ainsi que de 1 000 individus qui avaient été blessés, et dont le dispositif d’indemnisation comprenait une assistance médicale gratuite et 150 000 FCFA (environ 242 US$) pour couvrir leurs frais de transport.

[232] « Cérémonie officielle d’indemnisation des victimes : l’allocution du Président Alassane Ouattara », Abidjan.net, 4 août 2015, http://news.abidjan.net/h/560901.html (consulté le 18 novembre 2015).

[233] Entretien téléphonique mené par Human Rights Watch, Abidjan, 17 novembre 2015.

[234] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 27 août 2015 ; entretien avec un expert international des questions relatives aux réparations à accorder aux victimes, Abidjan, 31 juillet 2015 ; entretien avec le responsable d’un groupe de victimes, Abidjan, 5 août 2015.

[235] Entretien mené par Human Rights Watch, avec le responsable d’une association de victimes, Abidjan, 6 août 2015.

[236] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, Abidjan, 27 août 2015.

[237] « Visite d’État : six à huit milliards pour l’indemnisation de près de 4500 victimes de la crise post-électorale (Ouattara) », Abidjan.net, 26 juillet 2015, http://news.abidjan.net/h/560284.html (consulté le 5 novembre 2015).

[238] Entretien de Human Rights Watch avec Drissa Soumahoro, président de la Confédération des organisations des victimes de la crise ivoirienne (COVICI), Abidjan, 6 août 2015 ; entretien avec le responsable d’une association de victimes, Abidjan, 5 août 2015.

[239] International Center for Transitional Justice (ICTJ), « Reparations in Theory and Practice », Reparative Justice Series, https://www.ictj.org/sites/default/files/ICTJ-Global-Reparations-Practice-2007-English.pdf (consulté le 5 novembre 2015), p. 4 ; HCDH, « Les instruments de l’État de droit dans les sociétés sortant d’un conflit : Programmes de réparation », Doc. ONU HR/PUB/08/1, 2008, http://www.ohchr.org/Documents/Publications/ReparationsProgrammes_fr.pdf (consulté le 5 novembre 2015), p. 13.

[240] Les Principes fondamentaux de l’ONU concernant le droit à réparation des victimes présentent les cinq formes de réparation, l’indemnisation financière n’étant que l’une d’entre elles. Ces cinq formes sont la restitution, l’indemnisation, la réadaptation, la satisfaction et les garanties de non-répétition. Principes fondamentaux de l’ONU concernant le droit à réparation des victimes, par. 19-23. Entretien de Human Rights Watch avec un agent de l’ONUCI, 5 novembre 2015 ; entretien avec un expert international des questions relatives aux réparations à accorder aux victimes, Abidjan, 31 juillet 2015.

[241] Entretien de Human Rights Watch avec un agent de la CONARIV, Abidjan, 7 août 2015 ; entretien téléphonique de Human Rights Watch avec le professeur Mariatou Koné, Abidjan, 17 novembre 2015. Le professeur Koné a déclaré que le programme gouvernemental de réparation finirait par inclure « des réparations collectives, des réparations symboliques, la gratuité de la scolarité pour les orphelins et des allocations versées aux veuves ».

[242] L’ICTJ, avec le soutien de l’Union européenne, conseille actuellement la CONARIV sur la conception d’un programme de réparations, tandis que l’ONUCI prévoit de déployer un expert de réparations auprès de la CONARIV.

[243] Entretien de Human Rights Watch avec Me Théodore Dagrou, magistrat à la Cour suprême, Abidjan, 27 juillet 2015.

[244] Entretien de Human Rights Watch avec un chef communautaire, Bloléquin, ouest de la Côte d’Ivoire, 22 mai 2015. Entre janvier et mars 2015, une série de raids transfrontaliers dans le sud-ouest de la Côte d’Ivoire ont semblé cibler des communautés immigrantes, et déclenché une série de représailles alléguées contre des chefs communautaires autochtones. En mai 2015, le Conseil danois aux Réfugiés (DRC) a déclaré que les incursions armées et les conflits qui se sont produits dans l’ouest de la Côte d’Ivoire début 2015 montraient que la région était « vulnérable aux risques de tensions intercommunautaires » et que « l’accès à la terre, source majeure et récurrente de conflits, constitue l’épine dorsale de ces tensions ». DRC Protection Report, jan.-fév. 2015 ; DRC Protection Report, mars-avril 2015.

[245] Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (ACHPR), adoptée le 27 juin 1981, OAU Doc. CAB/LEG/67/3 rév. 5, 21 I.L.M. 58 (1982), entrée en vigueur le 21 octobre 1986, art. 14.

[246] Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ICCPR), art. 14.

[247] Idem, art. 14. Voir également Principes des Nations Unies concernant la restitution des logements et des biens dans le cas des réfugiés et des personnes déplacées (« Principes Pinheiro »), Doc. ONU E/CN.4/Sub.2/2005/17 (2005), avalisés par la rés. 2005/21 Sub-Com., Doc. ONU E/CN.4/2006/2 à 39 (2006), Principe 12.

[248] Human Rights Watch, « “Cette terre est la richesse de ma famille” : Agir contre la dépossession de terres suite au conflit postélectoral en Côte d’Ivoire », 9 octobre 2013, https://www.hrw.org/fr/report/2013/10/09/cette-terre-est-la-richesse-de-ma-famille/agir-contre-la-depossession-de-terres, pp. 17-24.

[249] Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille », p. 1.

[250] Environ 200 000 Ivoiriens ont fui vers le Liberia, principalement depuis l’ouest de la Côte d’Ivoire. Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille », p. 1.

[251] Idem, p. 2-3.

[252] Entretien de Human Rights Watch avec le chef d’une communauté burkinabé, village situé près de Bloléquin, 22 mai 2015.

[253] Entretien de Human Rights Watch avec le chef d’une communauté burkinabé, village situé près de Duékoué, 25 mai 2015.

[254] ACHPR, art. 14 sur le droit à la propriété. Pour de plus amples informations, voir Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille », pp. 108. Dans tous les cas d’occupation illégale d’une terre – que l’acheteur ait obtenu cette terre à l’issue d’une vente illégale ou par la force – le propriétaire légitime s’est vu refuser ce droit.

[255] Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (ICESCR), art. 11, adopté le 16 décembre 1966, G.A. Rés. 2200A (XXI), 21 U.N. GAOR Supp. (No 16) à 49, Doc ONU A/6316 (1966), 993 U.N.T.S. 3, entré en vigueur le 3 janvier 1976.

[256] Entretien de Human Rights Watch avec un agent du gouvernement ivoirien, Abidjan, 3 août 2015 ; entretiens avec des diplomates, Abidjan, 28 et 31 juillet 2015. Voir également Dr Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI, Rapport final », République de Côte d’Ivoire, ministère de l'Agriculture, direction du Foncier rural, août 2014, p.17, 31 (dans les archives de Human Rights Watch).

[257] Entretien de Human Rights Watch avec un agent du gouvernement ivoirien, Abidjan, 3 août 2015. Voir également Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI, », p. 11, par. 4. Les bailleurs de fonds internationaux, dont l’UE, la France, la Banque mondiale et la Banque africaine de développement, ont alloué des fonds significatifs à des projets destinés à faire connaître la loi de 1998 au niveau local et à appuyer les institutions locales chargées de l’enregistrement des terres. Entretien de Human Rights Watch avec un agent du gouvernement ivoirien, Abidjan, 3 août 2015 ; entretien avec des diplomates internationaux, Abidjan, 28 et 31 juillet 2015.

[258] Cette réforme avait pour but de résoudre les cas où des non-Ivoiriens croyaient avoir acheté les droits coutumiers relatifs à une terre mais ne pouvaient pas enregistrer leur titre en vertu de la loi de 1998. Les changements ont ouvert la nationalité ivoirienne aux résidents nés à l’étranger vivant en Côte d’Ivoire depuis avant l’indépendance, ainsi qu’à leurs descendants, et aux personnes nées en Côte d’Ivoire de ressortissants étrangers entre décembre 1961 et janvier 1973, ainsi qu’à leurs descendants. Par ailleurs, la loi permet à ces personnes d’acquérir la nationalité ivoirienne par déclaration, et non par le processus de naturalisation normal. « Loi portant dispositions particulières en matière d’acquisition de la nationalité par déclaration », Assemblée nationale de Côte d’Ivoire, adoptée le 23 août 2013, http://www.assnat.ci/sites/default/files/PROJET% 20DE%20LOI%20ACQUISITION%20DE%20LA%20NATIONALITE.pdf (consulté le 9 novembre 2015) ; Ange Aboa, « Ivory Coast lawmakers pass critical land, nationality laws », Reuters, 23 août 2013, http://www.reuters.com/article/2013/08/23/us-ivorycoast-laws-idUSBRE97M0Y120130823 (consulté le 5 novembre 2015).

[259] Entretien de Human Rights Watch avec un chef de village, village situé près de Bloléquin, 23 mai 2015.

[260] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un expert international des questions foncières, Paris, 22 juillet 2015.

[261] Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI », pp. 32, 37, 39, 42, 43.

[262] Idem, pp. 32, 37.

[263] Décret n°99-593 « Portant Organisation et Attributions des Comités de Gestion Foncière-Rurale » (C.G.F.R), 13 octobre 1999, disponible à http://faolex.fao.org/docs/texts/ivc69126.doc (consulté le 13 novembre 2015) ; Décret n°99-594, « Modalités d’application au domaine foncier rural coutumier », 13 octobre 1999, disponible à http://www.foncierural.ci/reglementation-fonciere-rurale/13-decrets-d-application/45-decret-n-99-594-du-13-octobre-1999-fixant-les-modalites-d-application-au-domaine-foncier-rural-coutumier-de-la-loi-n-98-750-du-23-decembre-1999 (consulté le 13 novembre 2015). Le texte manque de clarté quant aux relations entre les comités villageois instaurés pour soutenir l’application de la loi de 1998 et les chefs de villages qui généralement résolvent les litiges fonciers coutumiers sans lien avec la certification foncière. Un expert ivoirien a déclaré à Human Rights Watch que la législation ivoirienne ne donne pas aux comités fonciers villageois compétence sur les litiges fonciers sans lien avec le processus de certification, qui reste du ressort des chefs de villages. Les comités fonciers villageois ont toutefois du mal à résoudre les litiges liés à la certification foncière – qui met l’accent sur la personne qui détient les droits coutumiers à la terre – puisqu’ils n’ont pas à jouer ce rôle lorsque des litiges similaires surviennent dans des circonstances normales. Entretien de Human Rights Watch avec un spécialiste des questions foncières travaillant pour une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 3 août 2015.

[264] Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI », p. 56.

[265] Document politique du ministère de l’Agriculture, juillet 2015 (dans les archives de Human Rights Watch), p. 6.

[266] Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI », p. 17.

[267] Entretien de Human Rights Watch avec Constant Delbé Zirignon, Abidjan, août 2015.

[268] Document politique du ministère de l’Agriculture, juillet 2015 (dans les archives de Human Rights Watch), p. 6.

[269] Idem, p. 17. Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille », p. 101. Entretien de Human Rights Watch avec un expert international des questions foncières, Abidjan, 28 juillet 2015.

[270] « Ordonnance n0°2011-262 du 28 septembre 2011 portant orientation de l’organisation générale de l’Administration territoriale de l’État », Côte d’Ivoire, http://www.dgddl.interieur.gouv.ci/?page=cadre&cat=ordonnances (consulté le 3 septembre 2013). Entretien de Human Rights Watch avec un spécialiste des questions foncières travaillant pour une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 3 août 2015. Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille », p. 72. Pour un complément d’information sur le rôle des chefs de villages, voir Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI », p. 55.

[271] Entretien de Human Rights Watch avec un chef communautaire de Guéré, village situé près de Bloléquin, 23 mai 2015 ; entretien avec le chef d’une communauté burkinabé, village situé près de Guiglo, 23 mai 2015 ; entretien avec le chef d’une communauté burkinabé, village situé près de Duékoué, 25 mai 2015 ; entretien avec un agent du gouvernement local, Bloléquin, 22 mai 2015 ; entretien avec un universitaire ivoirien travaillant sur les questions foncières, Abidjan, 27 juillet 2015 ; entretien avec un membre du personnel d’une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 28 juillet 2015.

[272] Entretien de Human Rights Watch avec un chef de village, village situé près de Bloléquin, 23 mai 2015.

[273] Cette hiérarchie n’est pas toujours suivie, certaines personnes s’adressant directement au sous-préfet. Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille », p. 73; Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI », p. 12, par. 11 ; Norwegian Refugee Council (NRC), « Land Conflict and Food Security in the Liberian-Ivorian Border Region », décembre 2012, http://www.globalprotectioncluster.org/_assets/files/field_protection_clusters/Cote_d_Ivoire/files/HLP%20AoR/Land_Conflict_and_Food_Security_Liberian_Ivoirian_Border_Region_2012_EN.pdf (consulté le 5 novembre 2015), p. 17. Tout comme les chefs de villages, les sous-préfets essaient souvent de résoudre les conflits fonciers en recherchant un consensus, bien qu’ils soient prêts à arbitrer les désaccords si nécessaire. Voir Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI », p.55.

[274] Entretien de Human Rights Watch avec un spécialiste des questions foncières travaillant pour une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 3 août 2015. Voir également Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI », p. 55.

[275] Entretien de Human Rights Watch avec un spécialiste des questions foncières travaillant pour une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 3 août 2015.

[276] Entretien de Human Rights Watch avec le chef d’une communauté burkinabé, village situé près de Bloléquin, 22 mai 2015.

[277] Entretien de Human Rights Watch avec un chef communautaire de Guéré, village situé près de Duékoué, 25 mai 2015.

[278] Entretien de Human Rights Watch avec un chef communautaire de Guéré, village situé près de Duékoué, 25 mai 2015.

[279] Entretien de Human Rights Watch avec un agent du gouvernement local, Bloléquin, 22 mai 2015 ; entretien avec un spécialiste ivoirien des questions foncières d’une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 3 août 2015.

[280] Entretien de Human Rights Watch avec un chef communautaire, village situé près de Bloléquin, 23 mai 2015 ; entretien avec un universitaire ivoirien travaillant sur les questions foncières, Abidjan, 27 juillet 2015.

[281] Entretien de Human Rights Watch avec un universitaire ivoirien travaillant sur les questions foncières, Abidjan, 27 juillet 2015 ; entretien avec un spécialiste ivoirien des questions foncières d’une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 3 août 2015.

[282] Entretien de Human Rights Watch avec un chef communautaire, village situé près de Bloléquin, 23 mai 2015 ; entretien avec un chef communautaire, village situé près de Duékoué, 25 mai 2015. Voir également Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille », p. 102.

[283] Entretien de Human Rights Watch avec un chef de village, village situé près de Bloléquin, 23 mai 2015.

[284] Entretien de Human Rights Watch avec un chef de village, village situé près de Duékoué, 25 mai 2015.

[285] Entretien de Human Rights Watch avec un chef de village, village situé près de Guiglo, 24 mai 2015.

[286] Entretien de Human Rights Watch avec un spécialiste ivoirien des questions foncières d’une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 3 août 2015 ; entretien avec un chef de village, village situé près de Duékoué, 25 mai 2015.

[287] Entretien de Human Rights Watch avec un spécialiste ivoirien des questions foncières d’une organisation humanitaire internationale, Duékoué, 25 mai 2015 ; entretien avec un chef de village, village situé près de Duékoué, 25 mai 2015.

[288] Idem.

[289] Entretien de Human Rights Watch avec un expert international des questions foncières, Abidjan, 28 juillet 2015.

[290] Entretien de Human Rights Watch avec un membre du personnel d’une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 31 juillet 2015.

[291] Entretien de Human Rights Watch avec un chef de village, village situé près de Bloléquin, 23 mai 2015. Les communautés immigrantes vivant souvent dans des campements éloignés du village autochtone, le chef de village a également plus de mal à maintenir son autorité sur l’ensemble de la population. Entretien de Human Rights Watch avec un spécialiste ivoirien des questions foncières d’une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 3 août 2015.

[292] Entretien de Human Rights Watch avec un expert international des questions foncières, Abidjan, 28 juillet 2015 ; entretien avec un expert international des questions foncières, Abidjan, 22 juillet 2015 ; Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille », p. 78.

[293] Entretien de Human Rights Watch avec un spécialiste des questions foncières travaillant pour une organisation humanitaire internationale, Abidjan, 3 août 2015 ; entretien avec le représentant d’une ONG, Abidjan, 1er août 2015.

[294] Idem, p. 72.

[295] Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI », p. 73.

[296] Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille », p. 77.

[297] Document politique du ministère de l’Agriculture, juillet 2015 (dans les archives de Human Rights Watch).

[298] Entretien de Human Rights Watch avec un agent du ministère ivoirien de l’Agriculture, Abidjan, 4 août 2015.

[299] Entretien de Human Rights Watch avec un diplomate, Abidjan, 31 juillet 2015 ; entretien avec un expert international des questions foncières, Abidjan, 28 juillet 2015.

[300] Frédéric Varlet, « Étude d’impact social du volet d’appui à la mise en œuvre de la loi sur le foncier rural du PARFACI », p. 69.

[301] Idem.

[302] Idem, p. 74.

[303] Entretien de Human Rights Watch avec un chef communautaire, Duékoué, 25 mai 2015.

[304] Entretien de Human Rights Watch avec un diplomate international, Abidjan, 31 juillet 2015.

[305] Entretien de Human Rights Watch avec un agent du ministère de l’Agriculture, Abidjan, 4 août 2015.